Pour tous les fans de récits de soldats, le salon des Ecrivains-Combattants est indéniablement l’endroit où il faut être, avec le Festival International du Livre Militaire de Coëtquidan ou le stand du Ministère de la Défense au Salon du Livre de Paris. Nous n’allions pas rater l’occasion d'y retrouver des auteurs déjà connus et faire de nouvelles rencontres ; en conséquence, direction Saint-Mandé ce samedi 15 novembre où était organisée la 84e édition.
Avec une pensée pour ceux qui ne peuvent se déplacer sur Paris, voici notre mili-reportage.
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Avec le CNE Brice Erbland, 1er RHC, actuellement détaché au Ministère de la Défense.
De chouettes retrouvailles, car ce pilote de Tigre, vétéran d’Afgha et de Lybie, portant beau le bleu cobalt, nous le connaissons bien. Nous avions d’ailleurs débuté le blog avec « Dans les griffes du Tigre », mais notre texte était loin d’être à la hauteur du récit de Brice (il fallait bien débuter…). Nous avons donc décidé de reprendre notre recension et produire une version totalement refondue pour 2015. Patience.
C’est toujours un honneur de rencontrer un grand ancien comme le CDT Arrighi : Commandos Parachutistes, Commandos Nord-Vietnam, Régiment de Corée en Indochine, prisonnier du Vietminh, Guerre d’Algérie comme Légionnaire. .. « L’épreuve du guerrier – Récits de guerre » sont ses mémoires, mais aussi, dixit le Commandant, un « coup de gueule » contre les détracteurs de l’Armée et un plaidoyer pour tous ceux qui sont tombés pour la France en Indo et AFN. Inutile de vous dire que l’on a hâte de le lire…
« Monsieur Tchad ». Le Général y a en effet servi à trois reprises : commandant à Abéché puis chef de l’Etat-Major franco-tchadien à Fort-Lamy en 1970-72 ; Commandant de l’opération Tacaud en 1979-80 ; Enfin en 1987, inspecteur d’Epervier. Nous n’avons que trop ponctuellement abordé ce théâtre d'opérations ; belle occasion de rectifier le tir avec « Face à Kadhafi – Opération Tacaud ». Avec une pensée pour mon petit-cousin du 28e RT qui s’y trouve actuellement en OPEX.
Avec le LTN Jean-Marie Mathieu, vétéran d’Algérie 57-58, et ses filles.
Sorti de Cherchell (EOR), Jean-Marie Mathieu rejoint les Diables Rouges du 15.2 avant d’être affecté à l’état-major de la ZEC (Zone Est Constantinois). Partisan de la décolonisation, patriote critique, il désapprouve certaines méthodes de répression employées dans le cadre des « pouvoirs spéciaux ». Après nos amis Zeller, Delcayre ou Hutin, farouchement favorables à l’Algérie française, "l'autre point de vue" donc, mais qu’il convient évidemment d’aborder, par honnêteté intellectuelle (chacun connaissant la complexité du drame algérien).
Nous laissons maintenant une place aux enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants de combattants. Ils ont toute leur place ici. En publiant des témoignages, ils se sont investis pour que la mémoire de leurs anciens ne s’envole pas avec eux. Qu’ils en soient remerciés.
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Avec Mme Fabienne Monclar, fille du GAL Raoul Magrin-Vernerey dit Monclar.
« Monclar ». Voici un nom qui « sonne » dans l’histoire de France. Saint-Cyrien ; Première-Guerre mondiale durant laquelle il est blessé 7 fois ; Légionnaire au Proche-Orient pendant l’Entre-Deux-Guerres ; Narvik pendant la Campagne de France ; Londres dès le 21 juin 40, Campagne d’Afrique puis de Syrie à la tête de la 13e DBLE, refusant à chaque fois de porter les armes contre les Français restés fidèles au gouvernement de Vichy ; Indochine ; il termine sa carrière militaire en abandonnant ses étoiles de Général pour prendre le commandement du bataillon de Corée comme Lieutenant-Colonel… « Bayard du XXe siècle » comme est joliment sous-titrée la biographie de Mme Monclar, dédiée à son père. Tout juste paru. Un livre évidemment incontournable.
Avec Mme Sophie Lamy, arrière-arrière-petite-fille du Poilu Louis-Auguste Hubert, 109e RI.
L’année du Centenaire de la déclaration de la Grande Guerre est l’occasion de nombreuses publications d’historiens et biographes et c’est heureux. Mais quand c’est une jeune femme qui s’intéresse directement à la vie de son arrière-arrière-grand-père pendant le conflit, c’est encore mieux. Outre l’intérêt historique évident de carnets tenus au jour le jour par un Poilu, la démarche tord le cou à une idée communément admise sur le peu d’intérêt manifesté par les jeunes générations pour l’histoire de notre pays et la mémoire de nos soldats. Voici donc « Souvenirs de guerre 1914-1918 » journal de marche de Louis-Auguste Hubert, instituteur, mobilisé au 109e RI, proposé et édité par Sophie Lamy. Nous saluons l’initiative.
Avec Mme Martine Veillet, petite-fille du médecin militaire Louis Maufrais.
Dans la même rubrique « témoignages de la Grande Guerre », deux livres publiés par Martine Veillet : Le premier est basé sur les carnets et transcriptions d’enregistrements audio de son grand-père, médecin militaire dans les tranchées. De l’Argonne au Chemin des Dames, en passant par Verdun et la Somme. Publié en 2008, ce témoignage d’exception a suscité de nombreuses réactions, en premier lieu dans la famille Maufrais, la découverte de nouveaux documents, des lettres… ce qui a permis à Mme Veillet de publier « Ils étaient camarades de tranchées – sur les traces de Louis Maufrais ». Deux tomes donc, qui se donnent la réplique, richement illustrés de photos inédites. Un must. Et si vous en doutez notez que plusieurs grandes maisons d’édition étaient volontaires pour la publication (Robert Laffont remportant la mise). On souhaiterait à ce propos que ces éditeurs, disposant de moyens marketing importants, laissent plus de place aux témoignages de nos soldats, au milieu des futiles bios d’aussi futiles « people ». Le business, ok, mais le devoir de mémoire, c’est bien aussi.
Avec Florian Hollard, fils de Michel Hollard, résistant.
« Michel Hollard – Le Français qui a sauvé Londres » est un livre sur un homme méconnu et pourtant on lui doit, grâce à son action d’espionnage, la découverte puis la destruction des rampes de V1, destinés à ravager Londres. Dénoncé, Michel Hollard est arrêté, torturé, déporté au bagne de Neuengamme puis jeté dans la cale d’un navire promis au naufrage. Un monsieur discret, qui ne connut par les honneurs de la République, n’étant pas spécialement (impression de l’auteur) « dans les petits papiers » du GAL de Gaulle car indépendant des services de renseignement de la France Libre. Il sort d’un oubli immérité grâce à son fils Florian, auteur du texte basé sur ses souvenirs personnels et recherches.
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Aux éditions Le Cherche Midi. Disponible dans toutes les bonnes librairies et sites du Net.
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Avec Agnès Le Boudec-Andrieu et Bertrand Le Boudec, enfants du GAL (2s) Lucien Le Boudec.
Un véritable coup de cœur pour cette bio sur un grand ancien, Grand-croix de la Légion d’honneur, ancien du 6e BPC, blessé cinq fois au combat, appartenant à « Ceux de Tu Lé » et « Ceux de Dien Bien Phu ». Respect. Ses mémoires existent grâce à ses enfants Agnès et Bertrand qui ont publié ce livre remarquable, superbement illustré par les photos inédites issues de la collection de leur père. « Elevé à la dignité » a reçu le prix Jacques Chabannes 2014 de l’association des Ecrivains Combattants et ce ne peut être que mérité. Indispensable dans toute bonne bibliothèque mili.
Quant à toutes les autres personnes présentes, qu’elles reçoivent nos sincères excuses de ne pas les mentionner. Le salon des Ecrivains-Combattants est un beau succès, les livres nombreux et il nous est matériellement impossible de tous les couvrir : histoire, stratégie… Nous sommes les premiers à le regretter.
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Clin d’œil cependant à deux sympathiques écrivains-historiens, Gérard Bardy (à gauche sur la photo), à qui l’on doit une biographie de Susan Travers, unique femme Légionnaire, chez Pygmalion (vous connaissez notre affection pour la Légion…) et Alain Desaulty (à droite), que l’on retrouve toujours avec plaisir sur les salons, auteur « mili » prolifique. Citons son dernier livre : « 1954 – Le Tournant du siècle, l’année Dien Bien Phu » aux éditions Persée, disponible ici.
Et pour conclure, merci à l’association des Ecrivains-Combattants et son indispensable travail de mémoire, ainsi qu’à la ville de Saint-Mandé pour une organisation sans faille.
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Site de l’association des Ecrivains Combattants ici.
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
« Tu peux tuer toutes les hirondelles,
tu n'empêcheras pas le printemps de revenir. »
Proverbe afghan
Après-midi du 14 juillet, sur l’esplanade des Invalides, après l’émotion de la rencontre tant attendue avec le LCL Steve Jourdain, au gré de la discussion : « Tu connais le livre de Wali ? – Nan – C’est un ancien tireur d’élite. Vétéran d’Afgha. Photographe. C’est un chic type et son livre est super. Tu devrais le contacter… »
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Nos fidèles lecteurs savent déjà toute l’affection que nous portons à Steve Jourdain. La magie de cette relation fraternelle, établie par-dessus l’Atlantique, en quelques jours et par de simples échanges de messages, allait-elle se répéter avec son jeune compatriote Wali ? Le lien indéfinissable qui unit la communauté militaire et tous ceux qui revendiquent en faire partie, quand bien même civils, n’est-il qu’une vue de l’esprit ? Non. Cette fraternité est un fait : L’accueil du tireur d'élite est plus que chaleureux. Quelques échanges de mails comme avec Steve et déjà le sentiment de s’adresser à un ami. Magique.
Et puis nous recevons le livre. On le feuillette. On le lit. Et là encore, de la magie…
Je vous amène vers ces endroits où les lentilles que l’on voit sont celles attachées sur une arme. Plus qu’une mission de combat, bienvenue dans ce tour guidé et protégé derrière une infaillible vitrine de papier. Bienvenue dans cette patrouille alternant entre l’hiver et l’été ; près de ce que certains appellent l’enfer, mais surtout près de la beauté. Bienvenue dans une des contrées les plus dangereuses du monde. Voilà non pas les images d’une belle guerre, mais les belles images d’une guerre.
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La guerre, quoique parfois nécessaire, est toujours un échec de l’humanité. Les plus grandes victoires militaires sont aussi les plus grandes défaites humaines. La guerre est comme une partie de poker, à l’exception qu’ici, même le gagnant y perd quelque chose. A la guerre, impossible de se refaire. On ne reprend pas ce que l’on a perdu. Les mères ne reverront plus leur fils. Les sœurs n’embrasseront plus leur frère. Les familles des gagnants, comme celles des perdants, vivront à jamais avec le douloureux souvenir du grand départ vers le royaume des morts.
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D’un côté il y a les bombes et les embuscades. Il y a le fanatisme. Il y a l’ennemi. De l’autre, il y a les enfants qui jouent et des bergers qui conduisent leurs bêtes aux pâturages. La beauté se trouve même dans les pays en guerre.
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Entre l’objectif de mon arme et celui de mon appareil photo, il y a le soldat et le photographe. Il y a le guerrier et il y a l’artiste. Je portais mon arme comme un homme ; je jouais avec mon appareil photo comme un enfant.
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En une seule patrouille, on peut traverser tous les états d’esprit. On voit un enfant se lever dans les vagues d’une mer de blé et, quelques instants plus tard, un homme travailler à l’ombre d’un arbre penché. On passe du sifflement des balles au chant des oiseaux dans les champs. Du cadavre d’un combattant au regard candide d’un parent. Des larmes d’un soldat au charme d’une rivière sous un pont de terre. Du camouflage couleur désert aux vignobles tapissés de raisins verts. Du sang au rouge du soleil levant. Du désespoir à l’espoir.
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Un photographe est tel un magicien. D’un simple clic, il peut faire disparaître la laideur et arrêter le temps. Il peut isoler la beauté d’une toute petite fleur et l’enlever des ardeurs d’un désert. Il peut faire oublier une bataille aux générations à venir. Il peut rendre muet le calvaire des coups de feu et des explosions...
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… il peut capturer une âme prisonnière de la guerre et la placer dans un livre telle une œuvre sacrée dans la galerie d’un magnifique musée. Il peut rassembler des morceaux de l’enfer et les assembler en une mosaïque digne du paradis. Il peut recruter l’image de plusieurs orphelins isolés et lever une armée à la conquête des cœurs du monde entier.
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J’ai aimé ce pays, sa culture, ses gens. J’ai choisi de m’attarder à sa beauté. Malgré la guerre. Malgré mon métier de soldat. Car cette belle contrée est bien plus que des véhicules blindés et des soldats casqués.
***
Image may be NSFW. Clik here to view.Wali nait en 1981 à Montréal. Tireur d’élite du Royal 22e Régiment, seule unité d’active québécoise de l’armée de terre canadienne, il est déployé en 2009 en Afghanistan. Il y retourne l’année suivante pour former la police afghane. Son surnom de « Wali » lui est donné par les Afghans qui peinent à prononcer son nom. Soldat mais aussi artiste éclectique, Olivier est auteur (on lui doit le conte philosophique « Le voyageur sans nom »), compositeur de musique classique, réalisateur et évidemment photographe, pour le compte du R22eR et à titre privé.
Mon premier déploiement s’est effectué en tant que tireur d’élite au sein du Royal 22e Régiment. C’était en 2009. J’y suis retourné en 2010 avec une équipe de conseillers avisés pour former la police afghane. En tout, j’y ai passé 16 mois. Sans hésiter, j’y serais resté pour le double du temps.
Wali
Souvent, nous avons refermé les livres sur l’Afgha – soyons honnêtes – profondément émus, à commencer par celui de Steve, « Mon Afghanistan ». Avec « De l’autre côté de la lentille », nous l’avons fait avec le sourire, avec un sentiment d’espérance. Et ce n’est finalement pas si contradictoire, car le livre de Wali fait écho à celui de Steve : au-delà du fracas des armes, gardons en mémoire que tous nos soldats (français, canadiens, la nationalité compte-elle ?) se sont investis, ont soufferts, ont été blessés, ont perdu parfois la vie, pour une seule chose : pour que l’Afghanistan ressemble, enfin et exclusivement, à l’image qui prime dans « De l’autre côté de la lentille » : le sourire des enfants.
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ISBN : 978-2981232434 – Prix 24€ – format 21,6x21,6 - 170 pages.
Le livre se trouve facilement en France, Belgique, Suisse, Luxembourg, par exemple via Amazon.fr
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Pour mémoire, nous avons abordé « Mon Afghanistan », récit autobiographique du 2nd auteur du R22eR, notre camarade le LCL Steve Jourdain, ici.
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Hommage
A nos frères d’armes canadiens ;
158 ont perdu la vie en Afghanistan.
Aux blessés.
A tous ceux qui ont œuvré et œuvrent toujours pour la paix en Afghanistan.
Je me souviens.
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Wali en Afgha.
Au fil des mois, le corps et l’âme du soldat finissent par être marqués. Je m’en suis sorti avec quelques rares égratignures. La guerre ne m’avait pas tant changé. Elle avait simplement confirmé ce que j’avais toujours été au fond de moi : un soldat. Quand les personnes me demandent comment a été mon expérience en Afghanistan, je vois dans leur expression qu’ils s’attendent à une réponse triste et négative. Ils sont surpris et sourient quand je leur réponds que l’Afghanistan a été la plus belle expérience de ma vie.
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Tous droits réservés.
A moi, Auvergne !
Devise du 92e RI “Les Gaulois”,
attribuée au caporal Dubois du régiment d’Auvergne, lors de la bataille de Kloster Kampen contre l’armée anglo-prussienne, 1760, guerre de Sept ans.
Début 2012, le 92e Régiment d’Infanterie, constituant la base du Groupement Tactique Interarmes « Oies sauvages », s’entraîne sur sa terre d’Auvergne. Son déploiement en Afghanistan approche. Parmi les Gaulois, un drôle de personnage déambule, sans Famas, mais un appareil photo en bandoulière : Alphonse-Bernard Seny. Ainsi commence une belle aventure, qui trouvera son apogée en Surobi. Témoignage de cette page d’histoire, un livre photo comme on les aime : « Le temps de l’action ».
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Et c’est toute la vie des Gaulois et du GTIA qui s’expose à nos yeux, de bien belle manière : au rythme des 250 pages, on passe de l’entraînement dans les brumes auvergnates aux patrouilles sous soleil brûlant de l'Afghanistan; des convois sous tension à bouffer la poussière, à la vie dans la base, « soulevage » de fonte et repas appétissants (ou pas) ; des traits tirés par l’épuisement physique et mental, aux sourires lumineux lors des rares instants de détente ; de la promiscuité dans le VBCI ou la chambrée, à l’immensité désertique de la Surobi, qui pourrait être sublime si la mort ne se cachait pas derrière chaque caillou…
Tout cela en grand format, porté par un traitement chromatique malin : couleurs froides pour l’Auvergne, chaudes pour l’Afghanistan.
L’un des livres photo les plus réussi sur les troupes françaises au pays de l’insolence.
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Alphonse-Bernard Seny en Afghanistan
Quelques pages du livre, accompagnées des mots du Colonel Gilles Haberey, chef de corps du 92e RI, 2010-2012, commandant le GTIA en Afghanistan.
Voici venu le temps de l’action
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Nous avons gravi des collines, trébuchés sous des sacs trop lourds. Nous nous sommes relevés et nous avons repris notre chemin.
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Nous avons arpenté des pistes sans fin, parcouru des villages écrasés par le ciel et de verdoyants vergers de grenadiers.
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Nous avons été éblouis par le soleil qui brûlait la terre et nous avons écouté le silence de la montagne.
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Nous nous sommes préparés, sans peur, mais avec une légitime appréhension. Serions-nous prêts à cette rencontre avec l’ennemi ? Serions-nous prêts à cette rencontre avec nous-même ?
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C’est alors qu’est venu le temps de l’action.
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COL Gilles Haberey, chef de corps du 92e RI, commandant le GTIA « Wild Geese », Afghanistan, 2012.
Alphonse-Bernard Seny débute sa carrière de photographe dans les années 70 mais évolue rapidement vers la réalisation, vidéo-clips, publicités, films d’entreprise. A la fin des années 80, il réalise un film documentaire sur les enfants abandonnés de Saigon. Conquis par le Vietnam, il s’y installe pendant 7 ans et participe à la création d’un hôtel de luxe sur l’ancienne base des forces spéciales américaines de Nhatrang. De retour en France, il reprend sa carrière dans les médias, dont un documentaire plusieurs fois primé sur le photographe Tim Page, à qui l’on doit des images mythiques sur la guerre du Vietnam. Pas à pas, il revient vers son premier amour, la photographie. On lui doit par exemple le projet « Charlie won’t surf », exposition de photos sur les traces de la guerre en Extrême-Orient, avec l’effet toujours dévastateur de l’agent Orange sur les générations successives. En 2011, il est autorisé par l’armée française à suivre le 92e RI de Clermont-Ferrand, de son entraînement à son désengagement de Tora. Fruit de cette immersion : un lien affectif fort avec les Gaulois, et un livre remarquable, Le temps de l’action, qui concourt sans équivoque au titre de plus bel ouvrage photo sur l’engagement français en Afghanistan.
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Prix : 61,80€ (direct éditeur). ISBN 979-10-92076-00-4 format 24x30, 260 pages couleurs
Le Tigre du CNE Brice Erbland, auteur de « Dans les griffes du Tigre », en Afghanistan - Ceci est attesté par Brice lui-même, d’après le code de l’hélicoptère visible sur d’autres photos.
L’armée, ce n’était pas trop mon truc. Question d’époque. Un rien de rébellion aussi ? Je suis fils d’officier. Et pourtant, il fallait que j’y vienne, après m’être intéressé à ce qui « entourait » l’armée, les traces de la guerre par exemple, ou Tim Page. Au final, mon passé rock n’ roll m’a peut-être servi. J’y suis allé au culot, et cela a marché. Lors de ma première rencontre avec le Colonel, j’étais un rien tendu. Je ne savais trop à quoi m’attendre. Et puis le courant est passé, avec lui, puis avec ses hommes. J’ai eu pratiquement carte blanche. Tout s’est fait très naturellement, pas à pas. Oui, ma vision sur ce milieu à part a changé. J’avais conscience qu’en Afghanistan, sans eux et leur protection, je n’étais rien. Evidemment, une telle aventure laisse des traces. Ce sont des gens extraordinaires et se rapprocher de l’armée m’a peut-être aidé à mieux comprendre mon père.
Basé sur une conversation au F.I.L.M avec Alphonse-Bernard
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Hommage
Aux Gaulois du 92e RI morts pour la France,
Aux blessés.
Avec le salut fraternel du Chasseur et de la Russe-blanc
Au cœur de notre France
Existe un pays de montagnes
Où l'on entend encore les échos des grandes batailles.
La vie et la mort s'y côtoient encore.
Quand nos armes sont sur le terrain
S'il faut, ennemis, nous referons Gergovie.
"Nos pères les Gaulois", chant du 92e RI
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J’ai commandé des soldats exceptionnels.
J’ai commandé des hommes qui savent aujourd’hui ce qui est essentiel et ce qui n’est qu’accessoire.
J’ai commandé des hommes qui ont grandi.
J’ai eu l’honneur d’être parmi eux.
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Et l’Afghanistan ?
Qu’adviendra-t-il demain de ce pays terrible où quatre-vingt-huit de nos frères d’armes ont laissé leur vie ?
Nul de ne peut le prédire.
Mais une chose est sûre : aujourd’hui, les cerfs-volants flottent de nouveau dans le ciel afghan.
Les hommes de guerre sont de l’espèce qui se rase pour mourir. Ils croient à la rédemption de l’homme par la vertu de l’exercice et du pas cadencé. Ils cultivent la force physique et la belle gueule, s’offrant le luxe des réveils précoces dans les matins glacés et des marches harassantes pour la joie de s’éprouver.
Ce sont les derniers poètes de la gratuité absolue.
Jean Lartéguy
« Afghanistan », un mot qui restera à jamais gravé dans notre histoire. Mais « Afghanistan » n’est pas qu’un mot. « Afghanistan » n’est pas non plus qu’un morceau poussiéreux d’Asie ou règne depuis des siècles le fracas des armes. « Afghanistan » n’est pas qu’une mosaïque de peuples à l’esprit fier et combattant. « Afghanistan » n’est pas qu’une somme de traditions que nous, Occidentaux, pouvons juger archaïques. « Afghanistan » n’est pas que la mauvaise nouvelle du soir, annoncée d’un air apitoyé par le journaliste-star qui enchaîne, sans transition et retrouvant le sourire, avec la météo des plages.
« Afghanistan », c’est aussi une femme qui verse des larmes de joie, retrouvant son mari après six mois de stress et d’insomnies. C’est un homme sportif qui se demande comment vivre désormais, cloué dans un fauteuil roulant. C’est une femme qui pleure sa tristesse infinie, contemplant le lit de son fils, qui demeurera vide à jamais. C’est une femme fière d’avoir sauvé la vie de cette petite afghane, là-bas. C’est un homme qui s'est élancé sous le feu, pour secourir son frère d’armes blessé. Et cela le fait sourire, quand on le traite de héros.
« Afghanistan », c’est aussi ce soldat, et celui-ci, et celui-là…
Alors que sonne le désengagement, glas pour certains, joyeux carillon pour d'autres, que cette guerre est déjà, dans l'esprit de beaucoup, une "vieille histoire", nous avons voulu rendre à ces soldats l’hommage qu’ils méritaient.
Cependant, nous n’avons pas souhaité écrire sur eux, au-delà de ces quelques phrases d’introduction. Nous avons préféré nous comporter en porte-voix, leur laisser la parole, dans sa diversité : un kaléidoscope d'impressions, finalement plus complémentaires que contradictoires.
Écoutons-les et lisons-les. Ils méritent toute notre attention. Car « Afghanistan », par-dessus tout, c’est eux.
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Photo Sébastien Joly, réalisateur d'Aito– Guerriers du Pacifique. Le photographe à gauche est le regretté Yves Debay.
Combien d’hommes peuvent se targuer d’écrire l’Histoire , sinon d’en être acteur ?
Qui aujourd’hui vit intensément, non pas au travers d’un écran, mais ressentant les choses réellement ?
Qui est prêt à accepter la peur, le contact de la mort, le sacrifice de sa famille, pour la maigre gloire personnelle qu’est la fierté de servir son pays ?
CNE Brice Erbland, 1er RHC, « Dans les griffes du Tigre ». Ed. Les Belles Lettres
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Photo Sébastien Joly.
Je ne suis pas venu ici pour une médaille. Je suis venu parce que j'en ai reçu l'ordre. Parce que c'est mon travail. Parce que la solde, presque trois fois supérieure à celle que je perçois en France, va nous permettre de réaliser des projets. Parce que je savais qu'avec cette mission j'allais être, pendant six mois, au cœur de mon métier de militaire. Parce que je savais que j'allais me confronter au combat, connaître les giclées d'adrénaline, la peur aussi.
SGT Christophe Tran Van Can, 21e RIMa, “Journal d’un soldat français en Afghanistan”. Ed. Plon
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Photo Nicolas Mingasson, « Afghanistan – La guerre inconnue des soldats français » Ed. Acropole.
La guerre peut parfois sembler monotone, jusqu’au jour où elle rappelle à chacun de nous que nous sommes payés pour tuer. Et mourir.
En Afghanistan, nous ne savions jamais à quoi nous attendre en l’air. Le stress se vivait pendant la mission, directement au contact des hommes pris sous le feu ennemi. Le stress ne venait pas de la peur de mourir, mais de la rapidité des actions à mener, de décisions prises en l’espace de quelques secondes. Dans nos cockpits, nous étions immergés au cœur des combats. Là-haut, les équipages étaient le dernier maillon de la chaîne. Ils endossaient la responsabilité technique du tir et, en cas d’échec, ils devaient répondre de leurs actes.
CDT Marc « Claudia » Scheffler, EC 2/3 « Champagne », désormais Lieutenant-Colonel à l’EPAA, « La guerre vue du ciel ». Ed. Nimrod.
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Photo Sébastien Joly.
J’éprouve une admiration infinie pour tous les soldats français présents en Afghanistan. Ces quatre mille hommes (…) effectuent un travail grandiose. Quelles que soient les considérations politiques qui, forcément, les dépassent, quelle que soit la stratégie qui n’est pas toujours celle que la France aurait souhaitée, quel que soit le contexte qui revêt parfois des couleurs de guêpier, ces hommes vivent ici une mission noble.
Dessin de Bertrand de Miollis– œuvre originale offerte par l’artiste au Chasseur. « Haute Tension – Le 27e BCA en Afghanistan ». Ed. Gallimard.
Dans ce pays, comme dans d'autres théâtres de crise, il n'y a pas de coupure franche entre les amis et les ennemis, entre les insurgés les plus fanatiques et les partisans les plus convaincus du gouvernement légitime (...) Si ligne de partage il y a, c'est dans le cœur de chaque Afghan.
COL Benoît Durieux, 2e REI, in "Captain Teacher", CNE Raphaël Krafft, 2e REI, animateur de Radio Surobi. Ed. Buchet-Chastel
Chaque terroriste sait comment utiliser nos règles d'engagement à son profit. La question essentielle est simple: qui est prêt à aller le plus loin dans cette guerre? (...) Si vous ne souhaitez pas vous impliquer dans une guerre qui risque de dégénérer, alors, gardez-vous bien de vous y laisser entraîner.
Navy SEAL Marcus Luttrell, USA. « Le survivant ». Ed. Nimrod.
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Photo Jean-Christophe Hanché.
Nous ne sommes que de passage, nous ne pouvons prétendre changer ce monde auquel nous sommes trop étrangers.
LCL Geoffroy de Larouzière-Montlosier, 1er RTir, « Journal de Kaboul ». Ed. Bleu-Autour
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Photo Thomas Goisque, « D’ombre et de Poussière » éd. Albin Michel & « Haute tension » éd. Gallimard.
Les soldats ont rempli la mission qui leur était donnée, en pacifiant la zone dans laquelle ils intervenaient. Le dernier mot reviendra néanmoins à la population locale, qui choisira plus librement qu'elle pouvait le faire avant le début du conflit le parti du pacificateur ou celui de ceux qui s'y opposaient. A terme, la solution en Afghanistan demeurera afghane.
LCL Bernard Gaillot, 13e BCA, "De l'Algérie à l'Afghanistan", ed. Nuvis.
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Photo Thomas Goisque.
[On] me demandait mon ressenti par rapport à notre présence ici. J’étais convaincu de notre nécessité, mais j’étais inquiet de l’opinion publique. La population française semblait peu préoccupée par ses soldats qui donnaient leur vie pour la sécurité nationale, voire internationale (…) Cela nous blessait. Nous avions le sentiment d’avoir combattu pour rien, sachant qu’au fond de nous, ce n’était pas le cas.
ADJ Sylvain Favière, infirmier-para (désormais réserviste), « Ma blessure de guerre invisible ». Ed. Esprit Com’
Au fil des mois, le corps et l’âme du soldat finissent par être marqués. Je m’en suis sorti avec quelques rares égratignures. La guerre ne m’avait pas tant changé. Elle avait simplement confirmé ce que j’avais toujours été au fond de moi : un soldat. Quand les personnes me demandent comment a été mon expérience en Afghanistan, je vois dans leur expression qu’ils s’attendent à une réponse triste et négative. Ils sont surpris et sourient quand je leur réponds que l’Afghanistan a été la plus belle expérience de ma vie.
Je repensais à Tagab. Je ne réalise pas que je n’y retournerai plus jamais. J’ai l’impression que je vais me réveiller, tôt ou tard, dans mon petit box, avec Fab dans le lit au-dessus de moi… J’ai vraiment l’impression d’avoir oublié quelque-chose là-bas, d’y avoir laissé je ne sais quoi.
CCH Julien Panouillé, 1er RCP, « 197 jours – Un été en Kapisa ». Ed. Mélibée
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Photo José Nicolas – « Afghanistan – Task Force Lafayette » Ed. L’esprit de tous les combats.
Et je me pris à rêver que j’étais sur le terrain avec les gars, les accompagnant une dernière fois pour écraser l’ennemi.
SGT Paul ‘Bommer’ Grahame, The Light Dragoons, rattaché au Mercian Regiment, Royaume Uni, « Appui feu en Afghanistan ». Ed. Nimrod
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Photo Thomas Goisque.
L’expérience afghane a laissé en moi des blessures indélébiles, mais elle a aussi renforcé les fondements de mon engagement. Le sens profond du pacte qui nous unit s’est dévoilé dans les vallées touraniennes : une confiance absolue entre les hommes, l’esprit collectif poussé jusqu’à sa dernière extrémité. Avec l’amour, il s’agit à mon sens du lien humain le plus fort qui soit.
LTN Nicolas Barthe, 21e RIMa, désormais Capitaine au RICM après un passage au RSMA Guadeloupe, « Engagé ». Ed. Grasset
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Photo José Nicolas.
J’ai vu le mal. J’ai vu des enfants déchiquetés par des bombes. J’ai vu des blessés aux membres dilacérés par les explosions. J’ai vu des corps que le feu avaient rendus méconnaissables. Derrière chacun de ces blessés, il y a un autre homme qui a armé une bombe, qui a visé et tiré avec son arme, qui a fait exploser sa ceinture piégée (…). Je n’avais jamais capté auparavant autant d’intentions homicides qu’ici. Je te tue, tu me tues, il se tue, nous vous tuons, vous nous tuez, ils se tuent.
Et j’ai vu le bien. Je n’ai jamais vu autant de dévouement la patience de soustraire un homme à la mort. Sur le terrain, de jour comme de nuit, des brancardiers secouristes, des infirmiers et des médecins risquent leur vie pour sauver celle des autres. Cinq d’entre eux l’ont déjà donnée. Malraux écrivait : « Je cherche cette région cruciale de l’âme où le mal absolu s’oppose à la fraternité ». J’ai vu et éprouvé cette fraternité.
Professeur (Général) Patrick Clervoy, Service de Santé des Armées, « Dix semaines à Kaboul ». Ed. Steinkis.
Je repense à l’opération « Dinner out » [conquête de la vallée d’Alasay], au Caporal-Chef Belda qui doit être fier de nous, à toutes nos familles qui nous ont attendus avec calme, patience et dignité. Je regarde ces chefs de section, les Lieutenants Lazerges, Chantrel et Brunet, l’Adjudant Bouaouiche et leurs commandants d’unité, les Capitaines Minguet et Gruet et je pense à tous leurs camarades officiers, sous-officiers, chasseurs, légionnaires, artilleurs, cavaliers, transmetteurs, à tous mes Tigres de la Kapisa. Je mesure toute la chance que j’ai eue de commander des soldats de leur valeur. Ce sont eux les artisans de nos succès et les vrais vainqueurs de la Kapisa.
Tout le reste n’a que peu d’importance.
COL Nicolas Le Nen, 27e BCA, commandant le GTIA « Tiger », « Task Force Tiger ». Ed. Economica
La guerre, je l'ai fréquentée en d'autres lieux en tant que reporter. J'ai attendu de nombreuses fois qu'elle survienne pour rassasier ma soif d'adrénaline, me rappeler ou rappeler aux autres que j'existe, m'exalter de vivre un moment extraordinaire, historique parfois, ou simplement pour avoir de quoi écrire un article. (...) [Mais] être acteur à la guerre, c'est autre chose. Je m'en rends compte aujourd'hui. Je me rends compte que les militaires, finalement, quand ils sont sains d’esprit et "bien tassés dans leurs bottes", n’aiment pas la guerre, ou du moins, l’aiment parfois moins que nous [les journalistes]. Et c'est heureux.
CNE (r) Raphaël Krafft, COS, journaliste rattaché au 2e REI, animateur de Radio Surobi, « Captain Teacher », Ed. Buchet-Chastel
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Photo José Nicolas.
Aujourd’hui la mission est terminée, le fanion [du GTIA] Raptor a rejoint définitivement les murs de la salle d’honneur du 1er Régiment de Chasseurs-Parachutistes. Mais l’on dit qu’à chaque visite, à chaque souvenir évoqué en sa présence, il retrouve ses couleurs vives et l’aigle sur le tissu reprend son vol suspendu pour « fondre du ciel » à jamais. On dit même qu’il se met alors à parler de ces hommes et de ces femmes qui sont allés jusqu’au bout de leurs rêves et de leurs convictions, de ces hommes et de ces femmes qui ont gagné là-bas, loin de leur pays, le seul combat qui vaille la peine d’être vécu, celui que l’on livre contre soi-même, pour les autres, jusqu’au sacrifice de sa vie.
COL Renaud Sénétaire, 1er RCP, commandant le GTIA Raptor, auteur de « Les aigles dans la vallée », Ed. Mélibée. Préface à « 197 jours – Un été en Kapisa », CCH Julien Panouillé, 1er RCP. Ed. Mélibée.
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Photo Alphonse-Bernard Seny.
J'étais fier de commander mes hommes, me souciant de leurs tâches et surtout de leurs préoccupations. J'étais heureux d'être avec eux au bar, le soir, en rentrant de mission, une fois que tout était terminé, que la pression était tombée, avant de recommencer tôt le lendemain. Heureux de ne faire qu'un avec eux. Heureux car ils me le rendaient bien et l'on pouvait sentir entre nous, sans que cela ait été décidé, une complicité de ce lien particulier et fort qui unit les hommes après qu'ils ont traversé ensemble des épreuves qui ne peuvent être fidèlement narrées.
J’ai commandé des soldats exceptionnels. J’ai commandé des hommes qui savent aujourd’hui ce qui est essentiel et ce qui n’est qu’accessoire. J’ai commandé des hommes qui ont grandi. J’ai eu l’honneur d’être parmi eux.
Et l’Afghanistan ? Qu’adviendra-t-il demain de ce pays terrible où quatre-vingt-huit de nos frères d’armes ont laissé leur vie ? Nul de ne peut le prédire. Mais une chose est sûre : aujourd’hui, les cerfs-volants flottent de nouveau dans le ciel afghan.
COL Gilles Haberey, chef de corps du 92e RI, commandant le GTIA « Wild Geese ». Préface à « Le temps de l’action », Alphonse-Bernard Seny. Enfin!Editions.
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Photo Nicolas Mingasson.
Chacun, un jour prochain, regagnera, qui sa famille, qui ses parents ou ses amis. De nouveau, la vie « quotidienne » reprendra le dessus, mais n’y aura-t-il rien de changé en nous ? Ce séjour de cinq mois ou plus, parfois beau, parfois laid, parfois joyeux, parfois triste, n’aura-t-il laissé aucune trace dans nos vies ? N’aura-t-il pas façonné, d’une impression qui nous était insoupçonnée au départ, notre façon d’appréhender le monde, et celle dont on veut vivre et aimer en ce monde ? Peut-être même que notre cœur a été mis à nu et que notre vie émotionnelle, sentimentale, affective et amoureuse s’en est trouvée transformée et pourquoi pas transfigurée ? La fragilité de l’existence que nous avons pu « apprécier » ici ne va-t-elle pas nous apprendre à aimer « différemment » ceux qui nous sont chers et même ceux que nous n’aimions pas assez, jusqu’ici ?
Comment parler en deux mots de nos morts et de nos blessés, sans tenir de propos sacrilèges ?
Simplement redire que, loin des images hollywoodiennes, la détresse de nos blessés n’est jamais belle. L’héroïsme de nos morts n’est pas de réussir à susurrer quelques mots glorieux à l’oreille d’un camarade à l’instant du trépas. Il est de s’être investi jusqu’au bout, avec forces et faiblesses, pour simplement tenir son rôle parmi ses frères d’armes.
SCH Jocelyn Truchet, 13e BCA. Photo Philippe de Poulpiquet, « Pour la France », Ed. Grrr…art.
La guerre d’Afghanistan s’achève et ses protagonistes entrent peu à peu dans l’oubli. D’autres conflits font leur apparition, au Mali ou ailleurs. Mais les blessés de guerre porteront toute leur vie le vivant témoignage de leurs batailles. Quatre ans plus tard, ma blessure est toujours là et ma souffrance physique quotidienne. Je ne pense pas m’en débarrasser un jour. Lorsque mon nerf me lance, j’ai le sentiment que ma jambe coupée est toujours là et que c’est elle qui me fait souffrir. Les médecins appellent cela « le membre fantôme ». Je serre les dents, je me plie en deux sous la douleur et j’attends que la souffrance passe. Ce fantôme va et vient plusieurs fois par jour et apparaît sans prévenir. Avec le temps, j’apprends à vivre avec lui. Cela fait partie de mon sacrifice. Je ne m’en plains pas et je ne regrette rien.
SCH Jocelyn Truchet, 13e BCA, « Blessé de guerre », autoédité.
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Photo Philippe de Poulpiquet, « Pour la France », Ed. Grrr…art.
Perdu, déstabilisé, isolé dans sa souffrance, il est ainsi depuis son retour d’Afghanistan, voici plus de deux ans… Seul le désespoir empêche de croire à des jours meilleurs. Or toute la richesse du cœur de l’homme se résume à l’espérance que nous ne devons jamais perdre. Il nous faut espérer pour lui et avec lui, car l’espérance est souvent ce qui reste quand tout est parti à vau-l’eau. Le travail d’accompagnement sera long, mais il n’est pas permis de croire à son échec.
Je pense d’abord aux familles, à celles et à ceux qui ont perdu un proche, aux blessés graves, à toutes les personnes dont la vie sera irrémédiablement différente. Elles nous donnent des leçons quotidiennes de courage et de modestie. L’institution, je pense, en tire des leçons de vérité. Lorsque les cercueils sont alignés devant vous, vous prenez la réalité en pleine figure (…) A titre personnel, ces cérémonies d’hommage m’ont appris une plus grande humilité. J’ai un garçon qui part dans quelques jours en Afghanistan. Et je me dis : « Et si cela m’arrivait, à moi ? Si notre garçon devait être tué là-bas ? ». Frappé en plein cœur, comme toutes ces familles que nous avons tenté de réconforter, saurions-nous alors nous comporter plus dignement que beaucoup d’entre elles ?
Général de corps d’armée Bruno Dary, ancien Gouverneur Militaire de Paris. Postface à « Afghanistan – Task Force La Fayette », José Nicolas. Ed. L’esprit de tous les combats.
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Photo José Nicolas.
On ne se débarrasse pas des morts. Ils sont là. Ils forment un cortège amical et funèbre qui nous attend désormais de l’autre côté du miroir.
Certains pourront toujours prétendre que nous n’avons influé sur rien, que ces dix années de guerre en Afghanistan ont été inutiles, mais il suffirait que germent les quelques graines d’espoir que nous avons semées lors de nos mandats successifs, pour que rien n’ait été inutile.
Et même si rien ne germe, pourquoi devrions-nous regretter d’avoir essayé ?
Pourquoi devrions-nous renier ceux qui ont été tués ou blessés, en essayant ?
SCH Yohann Douady, 2e RIMa, « D’une guerre à l’autre ». Ed. Nimrod
Hommage
Aux morts pour la France en Afghanistan
31 août 2004 - CPL Murat YAGCI - 1er RPIMa
21 octobre 2004 - 1CL Thierry JEAN BAPTISTE - 3e RH
21 octobre 2004 - MDL Simah KINGUE EITHEL ABRAHAM - 3e RH
11 février 2005 - CPL Alan KARSANOV - 2e REI
17 septembre 2005 - CCH Cédric CRUPEL - 1er RPIMa
4 mars 2006 - PM Loïc LEPAGE - Commando Trépel
15 mai 2006 - 1CL Kamel ELWARD - 17e RGP
20 mai 2006 - ADC Joël GAZEAU - 1er RPIMa
20 mai 2006 - CCH David POULAIN - 1er RPIMa
25 août 2006 - PM Frédéric PARE - FORFUSCO
25 août 2006 - CCH Sébastien PLANELLES - CPA 10
25 juillet 2007 - ADC Pascal CORREIA - 1er RCP
23 août 2007 - MDL Stéphane RIEU - 1er RHP
21 septembre 2007 - ADC Laurent PICAN - 13e BCA
18 août 2008 - SGT Damien BUIL - 8e RPIMa
18 août 2008 - CPL Kévin CHASSAING - 8e RPIMa
18 août 2008 - ADJ Sébastien DEVEZ - 8e RPIMa
18 août 2008 - CAL Damien GAILLET - 8e RPIMa
18 août 2008 - SGT Nicolas GREGOIRE - 8e RPIMa
18 août 2008 - CPL Julien LE PAHUN - 8e RPIMa
18 août 2008 - SGT Rodolphe PENON - 2e REP
18 août 2008 - CPL Anthony RIVIERE - 8e RPIMa
18 août 2008 - CPL Alexis TAANI - 8e RPIMa
19 août 2008 - CPL Melam BAOUMA - RMT
22 novembre 2008 - ADC Nicolas REY - 3e RG
11 février 2009 - CDE Patrice SONZOGNI - 35e RAP
14 mars 2009 - CCH Nicolas BELDA - 27e BCA
24 mai 2009 - CCH Guillaume BARATEAU - 9e CCT / 9e BLBMa
1er août 2009 - CCH Anthony BODIN - 3e RIMa
4 septembre 2009 - CCH Johan NAGUIN - 3e RIMa
6 septembre 2009 - SGT Thomas ROUSSELLE - 3e RIMa
27 septembre 2009 - CPL Kévin LEMOINE - 3e RIMa
27 septembre 2009 - ADC Yann HERTACH - 13e RDP
27 septembre 2009 - BCH Gabriel POIRIER - 13e RDP
27 septembre 2009 - CCH Ihor CHECHULIN - 2e REI
8 octobre 2009 - SCH Johann HIVIN-GERARD - 3e RIMa
11 janvier 2010 - ICS Mathieu TOINETTE - 402e RA
12 janvier 2010 - LCL Fabrice ROULLIER - 1e BM
13 janvier 2010 - MDC Harouna DIOP - 517e RT
9 février 2010 - CPL Enguerrand LIBAERT - 13e BCA
8 avril 2010 - CPL Robert HUTNIK - 2e REP
22 mai 2010 - CBA Christophe BAREK-DELIGNY - 3e RG
7 juin 2010 - SCH Konrad RYGIEL - 2e REP
18 juin 2010 - BCH Steeve COCOL - 1er RHP
6 juillet 2010 - ADJ Laurent MOSIC - 13e RG
10 août 2010 - 1CL Antoine MAURY - 1er RMed
23 août 2010 - CNE Lorenzo MEZZASALMA - 21e RIMa
23 août 2010 - CCH Jean-Nicolas PANEZYCK - 21e RIMa
30 août 2010 - ADC Hervé ENAUX - 35e RI
15 octobre 2010 - ICS Thibault MILOCHE - 126e RI
17 décembre 2010 - CBA Benoît DUPIN - 2e REG
18 décembre 2010 - MA Jonathan LEFORT - Commando Trepel
08 janvier 2011 - SGT Hervé GUINAUD - RICM
19 février 2011 - CCH Clément CHAMARIER - 7e BCA
24 février 2011 - ADC Bruno FAUQUEMBERGUE - CFT
20 avril 2011 - CCH Alexandre RIVIERE - 2e RIMa
10 mai 2011 - 1CL Loïc ROPERH - 13e RG
18 mai 2011 - 1CL Cyril LOUAISIL - 2e RIMa
1er juin 2011 - SGT Guillaume NUNES-PATEGO - 17e RGP
10 juin 2011 - CCH Lionel CHEVALIER - 35e RI
10 juin 2011 - LTN Matthieu GAUDIN - 3e RHC
18 juin 2011 - CPL Florian MORILLON - 1er RCP
25 juin 2011 - CCH Cyrille HUGODOT - 1er RCP
11 juillet 2011 - BCH Clément KOVAC - 1er RCh
13 juillet 2011 - CNE Thomas GAUVIN- 1er RCP
13 juillet 2011 - ADC Laurent MARSOL- 1er RCP
13 juillet 2011 - ADC Emmanuel TECHER -17e RGP
13 juillet 2011 - ADC Jean-Marc GUENIAT - 17e RGP
13 juillet 2011 - SGT Sébastien VERMEILLE – SIRPA-Terre
14 juillet 2011 - MA Benjamin BOURDET - Commando Jaubert
7 août 2011 - CCH Kisan Bahadur THAPA - 2e REP
7 août 2011 - CPL Gerardus JANSEN - 2e REP
11 août 2011 - SGT Facrou HOUSSEINI ALI - 19e RG
14 août 2011 - CNE Camille LEVREL - 152e RI
7 septembre 2011 - CNE Valéry THOLY - 17e RGP
14 novembre 2011 - 1CL Goran FRANJKOVIC - 2e REG
29 décembre 2011 - ADC Mohammed EL GHARRAFI - 2e REG
29 décembre 2011 - SGT Damien ZINGARELLI - 2e REG
20 janvier 2012 - ADC Fabien WILLM - 93e RAM
20 janvier 2012 - ADC Denis ESTIN - 93e RAM
20 janvier 2012 - SCH Svilen SIMEONOV - 2e REG
20 janvier 2012 - BCH Geoffrey BAUMELA - 93e RAM
27 mars 2012 - CDE Christophe SCHNETTERLE - 93e RAM
9 juin 2012 - MAJ Thierry SERRAT - GIACM
9 juin 2012 - ADJ Stéphane PRUDHOM - 40e RA
9 juin 2012 - MLC Pierre-Olivier LUMINEAU - 40e RA
9 juin 2012 - BCH Yoann MARCILLAN - 40e RA
7 août 2012 - ADC Franck BOUZET - 13e BCA
5 août 2013 - ADJ Gwénaël THOMAS - BA 123
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Photo US Army
Hommage
Aux soldats de l’ISAF de toutes nationalités, nos frères d’armes, morts en Afghanistan,
Aux milliers de soldats de l’Armée Nationale Afghane, nos frères d’armes, morts pour leur pays,
Aux contractants, journalistes, morts en Afghanistan,
Aux blessés dans leur chair, dans leur psychisme.
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Photo Sébastien Joly
A la mémoire des civils afghans.
C'est sûr que nous vivons des temps difficiles, mais je regarde les choses de façon pragmatique : Il y avait deux écoles à Surobi en 2002, il y en a plus de vingt aujourd'hui. Il ne faut pas être ingrat. Les gens oublient vite. Moi, je me range dans le camp de ceux qui apportent le savoir et l'éducation.
Aziz Rahman, animateur de Radio Surobi,
radio "communautaire" en langue pashto fondée par le COL Durieux, 2e REI.
« Captain Teacher », CNE (r) Raphaël Krafft, COS rattaché au 2e REI, Ed. Buchet-Chastel
Nous avons apporté notre soutien à leur projet d’ériger une stèle à Coëtquidan, en mémoire des 89 soldats français morts pendant le conflit.
Outre les fonds pour le monument, les Dolos ont réuni 15 000 € qu'ils ont offerts à Terre Fraternité, association qui vient en aide aux blessés et familles endeuillées.
Nous vous avons conté cette belle aventure, à laquelle nous sommes fiers d'avoir participé, ici.
Mais le soutien, comme le devoir de mémoire, doit continuer ! Rejoignez comme nous un autre beau projet, initié par le LTN Youri Féral : "1 Run ou 1 don pour nos blessés de guerre".
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***
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Photo Sébastien Joly
Comme nos camarades des autres armées, les aviateurs ont affronté avec courage les risques de leur action en Afghanistan. Je m’incline devant la mémoire de tous ceux qui l’ont payé de leur vie, de tous ceux blessés dans leur chair et dont le mérite n’a d’égal que la noblesse de leur mission.
Général d’armée aérienne Jean-Paul Paloméros, Chef d’état-major de l’Armée de l’Air. Préface à « Afghanistan – Regards d’aviateurs », CNE Charline Redin, SIRPA-Air, désormais ECPAD.
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Photo Thomas Goisque.
Nous pouvons être fiers du comportement remarquable des soldats français en Afghanistan.
Général d’Armée Bertrand Ract-Madoux, Chef d’Etat-Major de l’Armée de Terre. Préface à « L’Afghanistan en feu », CCH Emmanuel Gargoullaud, RICM. Ed. Economica
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Photo Thomas Goisque.
S’il vous arrive de rencontrer un de ces soldats, je suis convaincu qu’il appréciera que vous lui disiez merci. Merci pour son service. Merci pour son sacrifice. Nos soldats méritent de se faire dire merci.
Ils sont ce que ce pays a de plus noble. Ils sont ce que ce pays a de mieux.
LCL Steve Jourdain, Royal 22e Regiment, frère d’armes québécois. « Mon Afghanistan », Ed. Athéna.
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.
Il n’est de vie que grande, arrachée à la facilité et à la torpeur.
Il n’est de vie que volontaire, celle qu’on bâtit de ses mains, sans illusion.
Il n’est de vie que confiante : au loin les pessimistes, les dilettantes, ceux qui doutent.
Il n’est de vie que généreuse : la vie, la vie fraternelle qu’attendent, que réclament les hommes.
Maréchal Lyautey.
« Je vous aurais bien donné mon livre mais on me les a tous piqués ! A la place, je vous propose du champagne. Ah non, pas au bar ; j’en ai apporté, regardez. Je n’ai qu’un verre donc nous boirons tous dedans. Cela ne vous gêne pas, n’est-ce-pas ? Blanc ou rosé ? »
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Nota : la dédicace est un nième trait d’humour de Bob, que nous sommes seuls à pouvoir comprendre…
Quand vous approchez de Bob Maloubier au salon des Ecrivains-Combattants, vous vous demandez comment aborder ce Monsieur qui a tout vu, tout vécu, rencontré le monde entier. Et puis voilà, avec ces quelques mots rapportés plus haut, envolée la timidité naturelle face à une Légende (car Bob en est une, au risque de blesser sa modestie). C’est clair, le bougre a du charme ! Et ce charme, cet humour (toujours bienveillant), cette carrière d’exception, nous les avons retrouvés avec bonheur dans les pages de « L’espion aux pieds palmés », suite de l’autobiographie de Bob, après « Agent secret de Churchill ». A vous d’en juger.
A mon retour [du Laos], couturé, paludéen, parasité, décoré, j’étais auréolé de moins de gloire que deux ans auparavant lorsque j’avais libéré Limoges. La défaite des petits hommes jaunes conclue à quinze mille kilomètres d’ici touchait moins les Français que le dernier tirage de la Loterie Nationale ! Après m’avoir serré dans ses bras, mon père m’a dit : « Tu ne possèdes aucun diplôme. Pour tout bagage tu sais sauter en parachute, démolir des ponts et tuer. Ticket non valable dans le civil, mon petit. »
J’ai donc pris le chemin de la Muette [siège du SDECE , Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage, ancêtre de la DGSE].
1946, Création du 11e Bataillon Parachutiste de Choc à Mont-Louis en Cerdagne sur une initiative du COL Fourcaud
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Saut à Calvi, 1948 - collection Claude Hiroux, 1er et 11e Choc
Le bataillon « spécial » de Fourcaud prend corps, subit un entraînement rude, s’aguerrit, s’épanouit en montagne, en plaine, sur les eaux et s’exerce à la guerre subversive. Nous sommes convoqués à Paris pour les félicitations d’usage, supposons-nous…
« - Vous semez la terreur sur vos Harley Davidson chevauchées, en croupe, par des amazones à moitié nues, m’a-t-on dit. Je n’évoquerai pas le cas du frère du plus célèbre guitariste du monde pourchassant, pistolet au point, l’un d’entre vous qui, semble-t-il, avait fait les yeux doux à sa femme. Et ces parties de 421 au zinc de La Coba, hein ? Vous vous liguez contre un malheureux mari… dont la jolie épouse se morfond. Il perd. Vous le mettez à l’amende : ingurgiter des cocktails de votre invention, explosifs, qui le mettent hors de combat. Pendant ce temps, sa moitié est conviée à une partie de jambe en l’air sous une barque retournée [… ]
- Vous nous avez confié la mission d’établir les bases d’une unité atypique capable de mener une guerre subversive, n’est-ce-pas ? User de moyens classique n’aurait mené à rien. Nous avons adopté des méthodes originales, non conventionnelles… »
1951, Fondation des nageurs de combat. Entrainement avec les Britanniques de la SBS
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Canoé de la SBS en 1951
Nous slalomons entre deux croiseurs, six cargos et un pétrolier dont les feux surgissent soudain comme des comètes au-dessus de nos têtes ! Nous prenons du retard et embouquons la Hamble River au renversement de la marée. Avancer à contre-reflux, galère ! Nous touchons enfin au point d’atterrage, à marée basse ou presque. Nous puisons dans nos dernières forces pour tracer notre sillon dans les cents mètres de vase qui nous séparent de la terre ferme, tailler à la machette une cache à notre canot dans un buisson de genêts et nous effondrer. A l’aube, deux heures plus tard, le commandant de l’école en personne nous rend visite ! Il vient s’assurer que nous sommes camouflés suivant les règles et… que nous sommes rasés.
A quatre-vingts mètres, légère oppression : l’air se fait rare. Je l’aspire à l’économie, par petites bouffées, avaricieusement. Par bonheur je suis un animal à pouls paresseux, à capacité pulmonaire réduite d’autant plus qu’une balle de Lugger, don d’un Feldengendarmes, a oblitéré le lobe de mon poumon droit. Je palme nonchalamment. Coup de pouce à la tige de réserve d’air en me murmurant les dernières paroles murmurées sur l’échafaud par la toute jeune princesse de Lamballe : « Encore une petite minute, Monsieur le bourreau ! ».
« - Sous prétexte d’une manœuvre « proche de la réalité », un poste de gendarmes maritimes a été sauvagement attaqué par des nageurs masqués ! Six d’entre eux ont été précipités dans un bassin, les autres, estourbis par des grenades au plâtres ont été couverts d’ecchymoses. Je compte sur vous pour identifier les coupables, n’est-ce-pas Capitaine ? »
A l’occasion du prochain briefing, l’œil sévère, après avoir exprimé les griefs de l’amiral à la classe réunie, je conclus : « Je ne doute pas que l’un d’entre vous se fera un devoir de dénoncer les coupables ! ». Le regard reflétant une absolue candeur, quarante lascars aux pieds palmés hochent le chef à l’unisson. Personne ne pouffe. Les plongées répétées, c’est connu, provoquent des amnésies. Or nous plongeons beaucoup...
Ne vous inquiétez pas pour Floch. Vous l’avez sorti de l’eau si vite que sa petite narcose sera sans conséquence. Demain, il aura une grosse migraine, c’est tout ! »
J’ai perdu une belle occasion de me taire…
Au cirque, lorsqu’un trapéziste s’écrase, le spectacle continue ; en escadrille, lorsqu’un avion s’abat, tous les pilotes décollent. Chez nous, lorsqu’un plongeur se noie, nous nous jetons à l’eau. Un remède pour conjurer le sort, dit-on.
- Ah non ! Pas question qu’un officier de l’armée française se fasse prendre la main dans le sac en train de trucider un honorable homme d’affaires étranger… surtout en pays neutre ! Imagine le scandale international, les interventions de l’ONU ! Non, tu driveras, de loin, des opérateurs. Le SR en a dressé une liste : des malfrats condamnés pour une bagatelle et auxquels on offre prime et remise de peine. Pour moins que ça ils tueraient leur vieille maman.
1956, Le Caire, malette encombrante devant la Grande Poste, place Tahir
Lorsque je freine à son approche, d’un geste théâtral, il exhibe la mallette qu’il cachait derrière son dos et la brandie en s’écriant d’une voix hachée :
« - Je n’ai pas pu la laisser… ou plutôt, lorsque je suis sorti, le planton m’a couru après pour me la rendre ! Il l’avait trouvée !
- Mais enfin comment a-t-il fait ? Vous l’aviez bien cachée dans le capharnaüm du couloir, non ?
- C’est-à-dire… je l’avais laissé sous ma chaise… Enfin, je… »
Il bafouille, mon dynamireto gesticule, puis soudain me balance son fardeau par la fenêtre ouverte de la portière, fait demi-tour et s’éloigne à grands pas, me laissant sur les genoux une machine infernale réglée pour exploser dans une heure au plus. Et au Caire, à l'heure du déjeuner les embouteillages sont inextricables !
En 1960, Bob désormais trop « mouillé », Main Rouge oblige, est mis au vert par le SDECE. Alors, élevage de chèvres dans le Bourbonnais ? Il tente bien l’expérience (véridique) mais chassez le naturel, il revient au galop et la suite de sa carrière (purement civile ? hum…) est toute aussi rocambolesque : Forestier au Gabon, il met sur pied la garde personnelle du président M’Ba ; Pour Elf, il prospecte au Nigéria en pleine guerre du Biafra. Cette seconde partie du livre, tout aussi passionnante, nous plonge au cœur de la Françafrique puis de la guerre commerciale pour l’or noir aux pays des mille et une nuits. Golfe Persique, Arabie Saoudite : le marché du pétrole explose et les contrats d'armement avec...
Quant à « l’affaire » du Rainbow Warrior, il en connaît les dessous.
Voilà. Pas simple de résumer une telle vie et si notre texte peut sembler long, nous avons pourtant sabré allègrement dans tous les évènements rapportés par Bob. Nous espérons vous avoir donné l’envie d’en savoir plus et de lire le livre. Et si l’occasion se présente de rencontrer Bob, foncez…
***
Image may be NSFW. Clik here to view.Robert « Bob » Maloubier nait le 2 février 1923 dans une famille aisée, française mais vivant jusqu’en 1920 aux Etats-Unis. En 1941, il s’enrôle dans l’aviation. Il tisse des liens dès 1942 avec le SOE, les services secrets britanniques, et rejoint Londres en 1943. Il est parachuté en France pour aider les réseaux de la Résistance et participer aux sabotages. En décembre il échappe aux Allemands mais est grièvement blessé (il porte toujours la balle logée dans son poumon). Il retourne à Londres, avant d’être parachuté à nouveau en 44, dans la région de Limoges dont il participe à la libération. En 1945, il intègre la Force 136 des SOE et est parachuté au Laos toujours occupé par les Japonais. A son retour en France, il rejoint le SDECE (actuelle DGSE). Il participe à la fondation du Service Action (11e Bataillon Parachutiste de Choc) en 1947 puis développe l’unité des Nageurs de Combat en 1952. Rappelé au SDECE, il enrôle des « barbouses » dont Jo Attia, ancien du gang des Tractions de Pierrot-le-fou, pour exécuter des contrats contre les financiers et vendeurs d’armes du FLN. Quittant officiellement les services secrets en 1960, il devient forestier au Gabon, y forme la garde personnelle du président M’Ba dans un contexte très Françafrique. En 1962 il est recruté par le pétrolier Shell puis Elf pour prospecter, notamment au Nigéria. Il est à Lagos en 1968 lorsqu’est déclenchée la rébellion du Biafra soutenue en sous-main par la France. Il termine sa carrière professionnelle au Moyen-Orient en étant promu Représentant des Français de l’étranger et Conseiller du commerce extérieur.
Auteur prolifique, on lui doit 9 livres, Robert Maloubier est Chevalier de la Légion d’Honneur, Croix de guerre 1939-1945, Chevalier de la Médaille de la Résistance. Il est décoré des médailles des Evadés, Coloniale agrafe « Extrême-Orient », France-Libre, ainsi que de l’ordre de l'Empire Britannique, 1939-45 Star, France and Germany Star, Distinguished Service Order (DSO) et Member of the British Empire (MBE) et enfin l’un des rares Commandeurs de l’Ordre du Million d’Eléphants du Laos, car décerné par un roi disparu des écrans il y a des lustres. Il a été blessé trois fois.
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Nos rencontres avec Bob. En haut le champagne (cf intro). Au milieu Natachenka sous le charme. En bas, Natachenka, jalouse (voir la conclusion) - nous accompagnant, le COL Thierry Jouan, 1er RCP et DGSE, auteur d’Une vie dans l’ombre.
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ISBN-13: 978-2268075129 – prix 21,90 € – format 23x15,2 - 300 pages, cahier-photo
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Joachim du Bellay
Farfouillant sur le Net à la recherche d’illustrations pour nos textes, nous sommes tombés un beau jour sur ce cliché d’un Légionnaire tendant la traditionnelle ceinture bleue de son camarade, en plein désert. Ce fût une vraie baffe artistique, un sentiment difficile à exprimer, mais une certitude : ce cliché avait sa place au Panthéon des photos mili. Hélas, l’auteur n’était pas mentionné.
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Alors, évidemment, nous avons mené notre enquête : quel photographe pouvait se cacher derrière ce cliché d’un esthétisme extrême ? Il a été facile a trouver : Charles Fréger. Mais là, heureuse surprise : nous n’avions pas qu’une photo « coup de maître » à nous mettre sous la dent, mais une œuvre d’ampleur, débutée il y a quinze ans : des centaines de photos, près de 25 livres, toute une série de portraits de groupes dont les membres sont indentifiables par le port d’un uniforme ou d’une tenue particulière, dont évidemment les militaires.
Mais trêve de blabla. Faites-vous votre propre idée. Plongez dans « Outremer ». Laissez vagabonder votre imagination. Reflux des vagues, vent dans les élingues, cris des mouettes, crissement du sable…
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Base navale de Toulon, 2012-2013
Ils avaient pris la mer, des histoires de sirènes dans la tête.
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Base navale de Nouméa, 2012
Parfois ils cherchaient par-dessus bord leurs silhouettes qui longeraient la coque du bateau fendant les eaux.
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Base navale de Nouméa, 2012
Au loin, ils guettaient la terre.
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Djibouti 13e DBLE, 2011
Ils l’avaient imaginée toute de sable immaculé et ce cieux innocents.
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Base navale de Nouméa, 2012
Prodigue, elle leur tendrait des colliers de fleurs blanches.
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Base navale de Nouméa, 2012
La destination, quand bien même elle leur était connue, ne pouvait se résumer au point sur la carte et ils le savaient.
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Base navale de Nouméa, 2012
Arrivés à terre, ils continueraient à tanguer dans les eaux de l’inconnu.
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Porte-avion Charles de Gaulle, 2012
Et ce mystère, ils ne cherchaient pas à l’élucider pour rien au monde, c’est là leur voyage.
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Image may be NSFW. Clik here to view.Charles Fréger est né en 1975. Alors qu’il est étudiant aux Beaux-Arts à Rouen, un bateau de la Marine nationale fait escale et il s’essaie aux portraits de Marins. Un déclic se produit : « En une journée, tout a basculé. J'ai vu que c'était mon monde. Je travaillais déjà sur la sérialité. Dans l'uniforme, il y avait quelque chose de conceptuel, de froid, que j'aimais ». Dès lors, il ne photographie que des groupes dont les membres sont indentifiables par le port d’un uniforme ou d’une tenue particulière : militaires, sportifs, majorettes, chasseurs tribaux… Parcourant le monde depuis le début des années 2000, il dresse un inventaire intitulé « Portraits photographiques et uniformes », œuvre d’art majeure, unanimement reconnue dans le monde artistique.
« Fréger ne revendique pas de discours critique ou politique, il explore en artiste le portrait comme genre, en revisite constamment l’histoire et les méthodes à la façon d’un peintre officiel au service de lui-même, de tout-un-chacun et du monde entier. Si académisme il y a dans son protocole, c’est volontaire, comme pour interroger encore le portrait d’apparat, car il part toujours de là : un portrait où les modèles doivent être des sujets restitués dans leur identité mais aussi leur dignité. »
Didier Mouchel, Chef de projet photographie, Pôle Image Haute-Normandie
Se trouve facilement, par exemple en le commandant chez votre libraire préféré(e) ou sur le Net.
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Parmi la vingtaine de livres publiés par Charles et que vous retrouverez ici, outre « Outremer », trois sont consacrés au monde mili :
« Légionnaires», publié en 2002, composé bien évidemment de portraits de képis blancs, « Merisotakoulu» en 2003 sur les marins finlandais et « Empire» en 2009, dédié aux gardes nationaux et royaux (31 régiments ; Royaume-Uni, Espagne, Italie, Monaco, Suède, Vatican, etc.). Inutile de vous dire que nous souhaitons aborder ces livres à leur tour, en attendant avec une impatience que nous ne dissimulerons pas les futurs projets de Charles.
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Hommage
Aux morts pour la France dans les Théâtres d’Opérations Extérieurs.
Aux morts pour la France dans les départements et territoires d’Outre-mer, notamment en Nouvelle-Calédonie dans les années 80 et en luttant contre l’orpaillage en Guyane.
v2. Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de leurs auteurs. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
Le soldat n'est pas un homme de violence.
Il porte les armes et risque sa vie pour des fautes qui ne sont pas les siennes.
Antoine de Saint-Exupéry
Février 2013. Ce blog n’existe pas. Le RER m’emmène au Bourget où se déroule le salon de la formation aéronautique. Je ne m’y rends pas pour une reconversion professionnelle, ni même pour le beau musée de l’air qui l’accueille. Je vais à la rencontre du CNE Brice Erbland. Il y dédicace « Dans les griffes du Tigre » que je viens de terminer. C’est une première : je n’ai jamais rencontré de soldat-auteur. Je n’ai fait que les lire…
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Peut-être que la discussion qui s’en est suivie (après avoir repoussé l’équipe de France 2 au grand complet pour arriver à l’atteindre) ; peut-être que la photo prise à ses côtés (- C’est la première fois que je fais un truc pareil :) - Moi aussi :)) ou encore les mots qu’il m’a dit les yeux dans les yeux, remerciements sincères pour mon intérêt envers les soldats, ont-ils été à l’origine de la création de ce blog. C’est même certain, car il y eut comme une étincelle dans ma tête : ces garçons et ces filles sont formidables, ce qu’ils écrivent est formidable, mais on en parle si peu. Comme c’est dommage…
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Quelques semaines plus tard, Une Plume pour l’Epée naissait. Brice est donc, d’une certaine manière, notre parrain.
Mais parlons de « Dans les Griffes du Tigre ». Ce récit est l’un des rares témoignages sur l’action des aviateurs « légers » de l’Armée de Terre et sur l’opération Harmattan en Libye. A ce titre, il est incontournable pour tous les fans d’histoire et d’autobiographies mili. Mais ce n’est pas ce qui le classe parmi les beaux-grands témoignages militaires. Brice place en effet son discours dans le registre de l’intimité de l’âme. Il n’aborde pas seulement la vie opérationnelle d’un pilote d'hélicoptère, préparation de mission/mission/debriefing, mais également, et surtout, dans le ressenti du combattant : Tirer. Tirer, oui mais. Ne pas tirer.Tirer malgré tout. Tirer et tuer. Tuer, et après ?...
Installée dans le poste de commandement du groupement tactique auquel appartient la compagnie en difficulté, ma patrouille suit le déroulement du combat à la radio et observe minutieusement la carte où sont reportées les positions des nôtres. Cela fait plusieurs dizaines de minutes que nous bouillons intérieurement en ne nous posant qu’une seule question : mais qu’attendent-ils pour nous envoyer là-bas ?
Je suis encore à deux ou trois minutes de vol de la zone de combat. Je sais qu’il va falloir faire vite, car chaque seconde qui passe risque de voir un soldat français être blessé ou tué. Mais il est hors de question de faire quoi que ce soit tant que je ne suis pas sûr de voir toutes les positions occupées par la compagnie. Dans le cas contraire il y aurait toujours un risque de tirer sur une position amie. Le tir fratricide, encore plus que le dommage collatéral, est ma hantise.
Afghanistan
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Afghanistan. Le Tigre de Brice Erbland [attesté par Brice lui-même d’après le code porté par l’hélico], photo Alphonse-Bernard Seny, auteur de « Le temps de l’action»
Les rafales courtes se succèdent ; j’ai vaguement conscience dans ma vision périphérique des gerbes d’étincelles qui déchirent la nuit à l’avant de mon canon. Je ne vois plus que mon écran, je ne vois plus que le cercle en son centre qui entoure deux paires de jambes et qui soudain ne laisse place qu’à un épais voile de poussière. La scène n’est plus visible et nous avons le temps d’effectuer deux tours supplémentaires avant que le nuage se dissipe. Ma caméra est toujours pointée sur l’objectif, mais les deux paires de jambes n’apparaissent plus à l’écran.
Je ne regrette absolument rien, car ce soldat aurait pu abattre l’autre Tigre. En quelque sorte, c’était lui ou mes deux camarades. Je n’ai même pas eu à choisir tant la décision était évidente. Dans la pénombre de ma bannette, pourtant, je ressens un certain malaise. Ma victime a beau ne pas être la première, loin de là, elle n’en reste pas moins un être humain. Cette réaction m’apaise, d’une certaine façon, car elle prouve que je reste malgré tout humain, baigné dans la considération et la sacralisation toute occidentale et chrétienne de la vie. Ma spiritualité a d’ailleurs grandement évolué depuis mon passage en Afghanistan. Le contact avec la mort a réveillé en moi un besoin que je croyais absent de mon cœur et de mon esprit. Alors, écoutant mon malaise, je prie pour ce soldat que j’ai tué.
Au large de la Libye
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Capitaine Brice Erbland
La mort est ainsi une comparse imposée lors de ces opérations. Dieu merci, je n’ai jamais eu à affronter la perte d’un camarade ou d’un subordonné, et je prie pour ne jamais avoir à y faire face. De nombreux soldats français y ont malheureusement été confrontés. Sur le terrain, ils doivent côtoyer la mort tous les jours et sont obligés de la provoquer de temps en temps. Mais malgré une préparation psychologique, malgré la conscience que le métier des armes peut impliquer de tels actes, ces derniers représentent de véritables chocs pour ceux qui les vivent. Chacun doit alors gérer ses émotions à sa façon. Certains semblent imperturbables, mais je reste persuadé qu’ils bouillonnent intérieurement, d’autres ont besoin de partager leurs sentiments.
Dans le monde qui a perdu le contact avec la tragédie de la guerre, aucun non-combattant ne peut imaginer la transformation radicale qui s’opère chez nos soldats après avoir vécu de tels moments.
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Image may be NSFW. Clik here to view.Saint-Cyrien, le Capitaine Brice Erbland sert au 1er Régiment d’Hélicoptères de Combat de Phalsbourg. Pilote de Gazelle et de Tigre, il participe aux opérations en Afghanistan et Libye. En juillet 2012, pour ses actions au combat, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur.
Actuellement détaché au Ministère de la Défense, Brice est marié et père de 4 enfants.
Nous avons la chance de bien connaître Brice. Nous avons également entendu des mots élogieux sur son compte, de la part de deux amis dont l’un a été son « boss » et l’autre est un padre célèbre ; mais nous ne rapporterons pas ces propos, pour ne pas blesser la modestie du capitaine… Vous pouvez cependant vous faire une idée du « bonhomme » en regardant cette vidéo, reportage de France 2 qui a reçu le prix Schœndœrffer 2014 [hé oui, c’est bien votre serviteur que vous apercevrez fugacement - mais je ne sais pas pourquoi on m'a "collé" en couverture !].
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Sur fond bleu cobalt ALAT, nos multiples rencontres avec Brice Erbland, désormais un familier de nos photos de groupies : Salon de la Formation Aéronautique 2013 au Bourget, 20h de France 2, Salon du Livre 2013 à Paris, Festival International du Livre Militaire 2013 à Coët’, Salon des Ecrivains-Combattants 2014 à Saint-Mandé…
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ISBN-13: 978-2251310046 – Prix 15,90€ – format 12,5x19, 108 pages, cahier-photo couleur
« Dans les griffes du Tigre » a été distingué en 2013 par le prix spécial de la Saint-Cyrienne, le prix « L’Epée et la Plume » et la mention spéciale du prix Erwan Bergot. Photo ci-dessus : Brice est aux côtés du GAL Patrick Champenois, auteur de « La chamelière de Bouyade », prix de la Saint-Cyrienne 2013 et du SGT Christophe Tran Van Can, 21e RIMa, auteur de « Journal d’un soldat français en Afghanistan », coécrit avec Nicolas Mingasson, prix de la Saint-Cyrienne 2012.
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Hommage
Au LTN Matthieu Gaudin, 3e RHC, mort pour la France en Afghanistan,
Au LTN Damien Boiteux, 4e RHFS, mort pour la France au Mali,
A tous ceux morts pour la France,
Aux morts en service commandé, avec une pensée pour ceux qui ont péri avec leurs camarades Dragons-Paras lors du crash de leur Cougar en 2009, au large du Gabon,
Aux blessés.
Avec le salut fraternel du Chasseur et le la Russe-blanc aux protégés de Sainte-Clothilde.
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Photo de Thomas Goisque
Combien d’hommes peuvent se targuer d’écrire l’Histoire, sinon d’en être acteur ?
Qui aujourd’hui vit intensément, non pas au travers d’un écran, mais ressentant les choses réellement ?
Qui est prêt à accepter la peur, le contact de la mort, le sacrifice de sa famille, pour la maigre gloire personnelle qu’est la fierté de servir son pays ?
[Préambule : notre « reportage » est en mode « affectif ». Nous ne sommes ni journalistes, ni officiels. Nous pouvons nous le permettre J]
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La Salon du Livre de Paris est notre premier rendez-vous officiel de l'année avec les mili-auteurs [car les rencontres suivantes se passent plutôt autour d’un verre ou d’un dîner… J]. Il lance notre année milittéraire, qui se poursuivra avec le Festival International du Livre Militaire de Saint-Cyr-Coëtquidan et le Salon des Ecrivains-Combattants, trois évènements que nous ne raterions pour rien au monde…
Comme les années précédentes (voir 2013 ici et 2014 là), le Ministère de la Défense a investi les lieux, fier de montrer aux visiteurs tous les talents de ses hommes et femmes, certes au top sur le terrain, mais aussi sur le papier !
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Gros succès public pour le stand R11 qui réunissait Terriens, Aviateurs et Marins. Tout avait été fait par le SIRPA : beau et grand espace idéalement situé, des centaines de livres présentés, allant du récit autobiographique à la BD en passant par l’histoire et la stratégie, et cette possibilité *formidable* d’échanger avec nos soldats, tous très disponibles.
Grande muette, disait-on ?
Pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’être présents, voici notre mili-reportage. [et comme à notre habitude, quelques petits messages privés aux auteurs suivent les photos…]
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Avec le CBA Rémi Scarpa, 92e RI, qui présentait son tout récemment paru « Offensive éclair au Mali ».
Cela commence fort avec ce livre, superbe hommage à l’éclatante victoire de nos soldats et de nos alliés africains au Mali. Magnifiquement illustré, reprenant des témoignages de tous les héros de Serval, laissant une place importante aux logisticiens (sans Tringlots, Transmetteurs, Ripainsels… pas d’opération). Dès à présent un classique. Précipitez-vous, il est déjà presque en rupture de stock !
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Chez Pierre de Taillac, éditeur engagé qu’il convient de soutenir. Disponible ici.
[Le 16 ? Formidable ! Un soldat-auteur portant *mon* béret noir ! Certes vous êtes déjà beau en TdF et bleu-cerise, mais alors, en bleu et jonquille, qu’est-ce-que cela va être…].
[Message subliminal : « Offensive éclair au Mali » est présélectionné pour le prix des cadets et nous prévenons amicalement nos amis Cyrards et Dolos que nous serons physiquement présents au Triomphe en juillet. Ce n’est pas pour influencer, n’est-ce-pas… J [on rigole]].
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Avec le LCL Hubert Le Roux, ayant été en charge du recrutement des sous-officiers et hommes du rang de l'Armée de Terre, auteur avec Antoine Sabbagh de « Paroles de soldats »
Magnifique initiative ! Une « collection » de témoignages de nos soldats, déployés dans le cadre des OPEX de 1983 à 2015. Liban, Golfe, Rwanda, ex-Yougo, Afgha, Libye, Mali, RCA… Idée lumineuse du LCL de donner la parole à ceux qui n’auraient pas osé se lancer seuls dans l’aventure de l’écriture (car c'en est une). Merci pour eux et merci pour nous.
[Désolé mon Colonel de vous avoir monopolisé pendant la visite du CEMAT. Mais nous avons vu qu’il était revenu vers vous pour papoter…]
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Avec le COL (r) Max Schavion, ancien chef de la Division Etudes, Enseignement et Recherche au sein du Service Historique de la Défense, porte-voix du CNE Manhès, combattant de la Grande-Guerre.
Certes en cette année de centenaire, il y a un « buzz » sur nos Poilus. Et c’est tant mieux ! Mais si vous ne deviez lire que quelques livres, celui-ci en ferait indéniablement partie… Nous ne pouvons être plus clairs.
[RdV au Triomphe, bar des Lieutenants, pour finir la conversation]
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Avec Arthur Hopfner, Commando Marine, qui présentait son second opus « L’empreinte du passé » sur le stand de son éditeur Edilivre.
Avec Arthur, nous ne sommes plus dans la phase découverte mais dans l’affection pure et simple. Arthur, c’est le béret vert dans toute sa splendeur. C’est un honneur d’être considéré par ce garçon comme des amis. Mais au-delà (mettons l’affectif de côté pour revenir à la littérature), c’est un auteur brillant, conservant, et c’est un plus, toute l’humilité des « gars biens ». Profitez de vos vacances ou d’un week-end et lisez ses romans « Toujours y croire » et « L’empreinte du passé ». Vous ne le regretterez pas.
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[Arthur ! Siiii ! Ecris ton autobiographie ! Ton pote Marius l’a bien fait et il ne semble pas le regretter, l’arsouille…]
[Heureusement que je n’ai lu ta dédicace qu’après t’avoir quitté]
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Avec Sylvain Tesson
Vous connaissez le trio ? Sylvain Tesson, écrivain, Thomas Goisque, photographe, Bertrand de Miollis, artiste. Ce sont des civils, mais de par leur histoire personnelle, familiale, affective, ils appartiennent à la belle fraternité mili. Nous avons donc profité de l’occasion pour échanger quelques mots avec Sylvain et de lui faire dédicacer « Haute-Tension – le 27e BCA en Afghanistan » et « D’ombre et de poussière » dont il est coauteur.
Nous n’en dirons pas beaucoup plus sur Sylvain si ce n'est qu'il va mieux et que nous nous en réjouissons.
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Nous avons abordé "Haute Tension", coécrit avec Thomas Goisque (photos) et Bertrand de Miollis (dessins) ici et "D'ombre et de poussière" avec Thomas sus-nommé, ici.
Jamais ces personnes ne recevront de médailles dans les salons du GMP ou du boulevard Saint-Germain, mais ce n’est pas si grave, car nous *savons* l’affection que leur porte nos soldats. Et cela vaut toutes les breloques.
[Domi : merci pour tout ce que tu fais, merci à toutes celles et ceux qui t'accompagnent !]
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Voici en quelques mots et photos la belle journée passée ce samedi 21 mars. Ce n’est qu’un pâle résumé de ce que nous avons vécu. Il y aurait encore tant à dire… mais nous ne pouvons tout raconter. La seule chose que nous répéterons, encore et toujours : Allez au-devant des soldats ! Echangez avec eux ! Osez ! Ils sont formidables...
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.
+ A la mémoire de mon oncle Pierre Dusausoy, 2e Régiment de Spahis Algériens, combattant de 1939-1940 +
« Si les musulmans d’Algérie et les Français veulent écouter ma voix, ils s’uniront pour ne former qu’un seul peuple ;
et ce peuple sera le plus grand et le plus puissant de la Terre »
Emir Abd el-Kader
C’est étrange. Nous n’avons pas de liens spécifiques avec l’Algérie ; nous ne sommes ni d’origine pied-noir, ni algérienne ; nous sommes nés après 1962 ; nous n’avons pas perdu de papa ou de tonton pendant le conflit. De ce fait, nous devrions garder une certaine distance vis à vis de ce conflit. De l’intérêt, certes, mais historique. Et pourtant nous nous sentons viscéralement impliqués. Il y a donc quelque chose de « spécial » avec l’Algérie, quelque chose de « plus », quelque chose de « pas guéri ».
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Alors oui, dans ce contexte, passer plusieurs heures à discuter avec le GAL Meyer, Spahi, bledard, défenseur de « ses » Harkis, refusant d’embarquer sans eux, alors qu’en 62 il n’est que lieutenant, un gamin, cela compte pour nous. Oh bien sûr, pour les plus jeunes de nos lecteurs, le nom de « Meyer », n’évoque rien. On ne vous en veut pas. Après tout, vous n’êtes pas responsables de vos programmes d’Histoire… Quant aux 80 000 Harkis massacrés après les "accords de paix" et dont vous n'avez pas non plus entendu parler, vous en voudront-ils, eux ? Inch Allah.
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LTN François Meyer
En novembre 1958, lorsque je traverse la Méditerranée, l’Algérie est sous le feu des combats depuis déjà quatre ans. J’arrive de Saumur et je débarque sur une terre française. Elle est appelée à le rester puisque le Général de Gaulle est récemment venu le dire : « L’Algérie est organiquement française aujourd’hui et pour toujours ».
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Au centre le LTN François Meyer, porte-étendard du 23e RS
Au temps des Léopards, les militaires de la Métropole nous moquent un peu. Hormis pour défiler, nous ne servons pas à grand-chose… Les jours de prises d’armes à Saïda, il est vrai, le régiment se présente dans sa tenue de tradition, chèches, burnous et sabres, et nous donnons l’image d’un monde d’avant-hier. Mais en opération, les pelotons ont une toute autre allure. Discrets et silencieux, nous nous affranchissons des pistes. « Ils passent partout et vont plus vite que nous ! » a-t-on lu dans un rapport interne de l’ALN [Armée de Libération Nationale algérienne]... »
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LTN François Meyer
En fin de journée, je donne fréquemment rendez-vous à Hamza, le chef des Harkis. C’est l’heure à laquelle Janet, mon sous-officier adjoint, place les sentinelles à leur poste. Nos chevaux sont abreuvés et nourris. Nous nous tenons en haut du ksar [fortin], au-dessus des rumeurs du peloton. Immobiles, nous observons au loin les premiers feux du campement et, beaucoup plus loin, ceux des bergers. C’est le moment où le vent du soir se lève et fait tourbillonner le sable. A cette heure, je me sens loin de la guerre et d’Alger.
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Février 1959, Saïda. Le 23e Spahis est passé en revue par le COL Bigeard – Collection particulière
[Au mess des officiers du 23e RS] « Ici comme ailleurs nous partirons… La France quittera l’Algérie ». Veut-il nous sonder ? En tous cas, la réflexion produit un effet profond. D’ordinaire, le soir au cours du dîner, nous parlons des affaires du jour (…) nous commentons peu les perspectives politiques. Et quand nous sortons de table, c’est pour passer au salon pour une partie de bridge (…) « La France quittera l’Algérie ! Scandaleux ! » Le Commandant Guyot quitte le salon avec indignation. Beaucoup d’indignation ! (…) Cette soirée ne ressemble plus aux normes. Resté seul avec nous, le Capitaine Gély nous fait servir un nouveau verre et nous garde longtemps. Il sait de quoi il parle. Il a servi au Tonkin dans les années 50 à la tête d’une section de Légionnaires...
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Commando « Griffon ». Au premier plan le LTN François Meyer ; 4ème au centre, le SLT Gilles d'Agescy.
Les Harkis sont lucides. Ils savent que le FLN est en train de gagner des points sur le plan politique et que les négociations engagées n’annoncent rien de bon pour eux. Mais beaucoup continuent d’espérer que l’Armée ne quittera pas l’Algérie sans qu’une paix certaine soit assurée pour tous. Ils pensent même que l’Armée aidera à la reprise d’une vie normale. Et croire cela ne relève ni de la naïveté, ni de l’imagination (…) Le Général de Gaulle lui-même, avec son immense prestige, n’a-t-il pas solennellement déclaré : « Je considère l’armée française, avec sa loyauté, son honnêteté, sa discipline, comme la garantie que la parole de la France sera tenue ».
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Harkis et Moghaznis de Bou Alam, assassinés le 23 avril 1962
Le 17, le maire de Bou Alam, Hadj Kaddour, six anciens Moghaznis et tous les Harkis de sa tribu sont emmenés et exécutés au lieu-dit Aïn Korima. Le 23, c’est au tour de neuf anciens supplétifs. Enlevés sous leurs tentes, ils sont sauvagement assassinés par le FLN dans le djebel Alouat. Les deux Spahis qui n’étaient pas rentrés le 12 avril étaient eux attachés, nus, promis au supplice. Mais ils arrivent à tromper la vigilance de leur gardien et à s’enfuir, profitant de la nuit. Ils gagnent ensuite un poste militaire et donnent l’alerte. Ils nous racontent que devant ses bourreaux, avant d’être exécuté, un Harki, Abid Mohamed, leur a lancé : « Il est plus facile de nous tuer aujourd’hui, maintenant que nous n’avons plus d’armes ! » Furieux, le chef FLN sort son poignard et lui coupe les lèvres avant de la mettre à mort. Le 26, six autres supplétifs sont enlevés et mitraillés près du village de Sidi Slimane.
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LTN François Meyer, commando 133 Griffon
Bien qu’officiellement dissout, le Commando est envoyé à la recherche des « criminels ». Nous arrivons bien trop tard pour attraper qui que ce soit (…) Au retour, alors que nous survolons les djebels en hélicoptère, à quelques kilomètres au nord de Bou Alam nous apercevons au sol un groupe d’hommes qui nous font des signes. Nous nous posons. Ce sont les Harkis du poste d’Agneb. Ce poste est tenu depuis 1960 par une Harka importante dont la fidélité et le courage au combat sont connus de toute la région. Aujourd’hui menacés, ils demandent à partir pour la France. A mon grand regret, je ne peux les prendre à bord, nos hélicoptères sont déjà chargés au maximum. Mais je leur promets d’alerter le commandement dès mon arrivée. Lentement, ces hommes s’éloignent de nous en silence. Forte image d’un abandon qui ne peut s’oublier.
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Le Djebel Dira. Collection particulière.
[Les soldats algériens de l’ALN] tournent autour de nous. Un officier vient protester sur place dès notre arrivée et réclamer la livraison des Harkis. Il est clairement éconduit. Trois jours plus tard, nous voyons enfin le « Djebel Dira » accoster. C’est bientôt l’animation de l’embarquement. Les Spahis ne sont pas peu fiers de cacher au milieu de notre groupe quelques Pieds-Noirs éperdus et menacés, qui n’ont pas pu avoir de place sur le bateau. Ils m’ont demandé mon accord.
Maintenant, c’est notre tour. Nous avançons sur la passerelle d’embarquement (…) Une section de Légionnaires arrive en chantant, impeccable, au pas.
Nous laissons derrière nous la pure lumière d’un 13 juillet à Oran. La chaleur et la brume légère vont arriver bientôt. Les eaux sales du port lèchent maintenant les flancs du bateau. Il s’écarte du quai, la terre d’Algérie s’éloigne lentement. Chez nous, c’est le silence.
***
Image may be NSFW. Clik here to view.Le Général François Meyer naît dans une honorable famille versaillaise. Saint-Cyrien, il rejoint la Cavalerie. Affecté au 23e Régiment de Spahis, il combat en Algérie de 1958 à 1962, à cheval, puis à la tête du 133e Commando de chasse harki « Griffon ». Très tôt conscient d’une indépendance inéluctable, il engage sa parole, accompagné par le SLT Gilles d’Agescy, son subordonné : ils ne quitteront pas l’Algérie sans leurs hommes. Mission accomplie, envers et contre toutes les « directives gouvernementales » mais grâce, il faut le souligner, aux Marins, en particulier les Commandos, qui facilitent l’embarquement à Oran. Parole tenue. Honneur sauf. Retrouvant Saumur, François Meyer n’aura de cesse de soutenir ses soldats musulmans et leurs familles, sauvés du massacre : aide à l’installation en Lozère avec le soutien de la famille de Lescure et du préfet, création d’une association, recherche d’emploi, lobby auprès des pouvoirs publics… Parallèlement, François Meyer poursuivra sa carrière militaire, commandant d'un régiment blindé au camp de Canjuers, dirigeant les travaux de la commission Armée-Jeunesse au cabinet du Ministre de la Défense dans les années 90.
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François Meyer, alors Colonel, entouré d’anciens Harkis sur le plateau de la Roure, en Lozère, en 1991.
Article sur le Général Meyer, sur le site de l’association « A.J.I.R pour les Harkis » ici.
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Avec le Général François Meyer, chez lui à Versailles
Pour une fois, nous ne citerons pas les médailles de l’auteur, aussi méritées soient-elles. En effet, un « titre », que les Harkis et leurs descendants lui ont attribué, et que nous reprenons à notre compte, éclipse les breloques : celui de « Juste parmi les justes ».
A Bou Alam, lorsque nous apprenons par la radio que 90% des Français approuvent la politique algérienne du Général de Gaulle et les accords d’Evian lors du référendum organisé en métropole seulement, le sentiment d’abandon est général.
Beaucoup (de Harkis) se retirent discrètement et rejoignent leur village d’origine (…). Malgré tout, d’autres demeurent près du poste. Certains continuent de croire en la promesse que nous leur avons faite, Gilles d’Agescy et moi-même : « Nous resterons avec vous jusqu’au dénouement », c’est-à-dire jusqu’à ce qu’il leur soit effectivement proposé protection et avenir. Cette parole, nous sommes déterminés à la tenir. Et en raison de la manière dont le FLN se comporte avec eux, il s’agit de garantir la possibilité d’un transfert en France.
Je me battrai pour cela.
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ISBN : 978-2854434606 - Prix ~21€ - Format 22,5x14, 215 pages – Cahier-photo N&B
Le livre, écrit en collaboration avec Benoît de Sagazan et paru en 2005, est épuisé. A dénicher sur le marché de l’occasion, par exemple sur Amazon.
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Hommage
Aux Harkis et Moghaznis morts pour la France,
Aux Spahis morts pour la France,
A tous les morts pour la France dans les départements français d’Afrique du Nord,
A tous les civils assassinés.
*
« Tous ceux qui, après le 1er avril, porteront encore l’uniforme des colonialistes ou logeront près des postes militaires signeront d’eux-mêmes leur arrêt de mort ».
Message du FLN, Wilaya 5, adressé au maire de Bou Adam le 19 mars 1962.
*
« Toutes les dispositions ont été prises pour qu’il n’y ait pas de représailles »
Discours de Georges Pompidou, Premier-Ministre, à l’Assemblée Nationale le 27 avril 1962.
*
L’historien Jean-Charles Mauffret estime à 80 000 le nombre des Harkis et Moghaznis massacrés après l’indépendance.
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En direction de la ville, l’entrée de la citadelle n’est pas entourée de murs, mais seulement de grilles. Faisant face à la foule hurlante [qui fête l’indépendance], j’observe un vieux Harki, seul. C’est le vieux Dine Ben Larbi, un ancien Spahi de l’Armée d’Afrique. Il a perdu femme et enfants pendant la guerre. On lui confie encore quelques tâches ménagères.
Je m’avance derrière lui pour l’inviter à se mettre à l’abri. Il se retourne. Je vois son visage baigné de larmes. Il me dit : « Ne me regarde pas mon Lieutenant, ne regarde pas un homme qui pleure. Mais moi tu vois, tout seul, je crie encore : Vive la France ! ».
Il se retourne et, s’avançant vers la foule hurlante, crie :
« Vive la France ! Vive la France ! Vive la France ! ».
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation des auteurs. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
Et maintenant, arrivé à la dernière étape, il me vient un remord d’avoir osé rire de vos peines,
comme si j’avais taillé un pipeau dans le bois de vos croix.
Roland Dorgelès, Les croix de bois.
Chère Roxanne,
Voilà, j'ai terminé « En terrain miné ».
Comme je ne sais pas par où commencer, je vais le faire par la fin ; tant pis pour le suspens : Le livre est à tomber par terre. Tout y est si intelligent, si drôle parfois, si déchirant (trop) souvent... Une réussite absolue.
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Oh certes tu peux me classer parmi les militaristes (enfin, je ne sais trop ce qui se cache derrière ce mot. Disons plutôt : "appartenant à la fraternité militaire" ?). Un livre reprenant les échanges entre une enseignante pacifiste (idéaliste ?) et un soldat perdu dans la misère afghane, je ne pouvais qu’être conquis (m’attendant à froncer les sourcils sur tes « positions », à l’occasion). Ouais.
Ceci étant, je place « En terrain miné » parmi les témoignages qui m'ont transpercé le cœur. Sur le fond (p* j'ai chouiné !) mais aussi sur la forme : L'échange épistolaire est un style littéraire qui fonctionne parfois (« Inconnu à cette adresse » de Kathrine Kressmann Taylor, par exemple) mais plutôt casse-gueule. « En terrain miné » fonctionne à 200%. Entre ton côté un rien « bobo » (je ne sais si cette expression est d’usage au Québec) (et je l’utilise en toute bienveillance) et celui du soldat-bon-gars-de-la-campagne de Patrick, la partie de ping-pong verbale est magnifique. Et puis tous ces silences imposés entre deux échanges, tous ces non-dits, tous ces évènements...
Les seuls contacts que nous avons avec l’armée sont lointains, irréels : « les troupes » sont sur « le terrain »… C’est qui, ça ? Qu’est-ce-que ça veut dire ? Pour nous, l’armée est un concept abstrait, déshumanisé.
~Roxanne
Dans la salle d’attente où les familles et les militaires étaient réunis avant le départ, on pouvait sentir l’angoisse et la tristesse, mais aussi la fierté et le goût du devoir. C’est difficile à expliquer. Comme un pompier qui rêve d’éteindre un feu (…) Dans cette salle, j’ai bien passé une heure avec mon fils Benjamin dans les bras. Si j’avais pu, je l’aurais mis dans mes bagages tellement c’était déchirant de devoir laisser ma famille seule durant plus de six mois. Ma fille Heidi était trop jeune pour comprendre, elle gambadait dans la salle.
~Patrick
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Photo CPL Olivier « Wali » Lavigne-Ortiz, R22eR
J’éprouve un certain malaise parce que vous m’envoyez des photos de vous en habit de combat, puis d’enfants aux sourires salis qui demandent des bonbons en échange des explosions qu’ils entendent… Je doute qu’on puisse sauver le monde, les enfants et leur sourire, avec une mitraillette sous le bras. Cela n’a pas de sens pour moi.
~R.
Grace au programme de reconstruction, une école de filles a été bâtie. Les villageois courageux ont choisi d’y envoyer leurs filles, même sous la menace de répression talibane. Les intégristes ont alors mis le feu au bâtiment. Ceci n’a pas découragé les familles qui ont restauré l’école et ont continué d’y envoyer leurs filles pour les instruire. Face à ce courage, cette détermination, les bourreaux y sont allés de manière plus dissuasive… Ils sont entrés un matin dans l’école et ont coupé la tête de l’enseignante pour ensuite la brandir face aux jeunes filles. Imagine le scenario chez nous ! Aurions-nous le courage d’envoyer nos enfants à l’école après une menace aussi sérieuse ? Les Afghans l’ont fait, parce qu’ils veulent que les choses changent. Alors, pour l’éducation dans ce pays, nous devons assurer la sécurité. Sinon, pour ces jeunes femmes, elle ne sera jamais possible.
~P.
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CPL Patrick Kègle, Afghanistan
Tu veux prendre les armes, lever une armée et sauver le monde ? Etre un héros ! … Mais, Monsieur Kègle, si nous devons laver toutes les crocheries de l’humanité, jusqu’où irons-nous ? (…) Là où la violence règne, seule la maîtrise de cette violence par une force plus grande encore peut arriver à contrôler le débordement, c’est ce que tu me dis.
Et ça me fait peur.
~R.
Je sécurisais seul un des côtés de l’école. Les jeunes filles d’environ seize ans étaient toutes aux fenêtres, curieuses de notre visite. Je sentais qu’il y avait un peu de jubilation dans l’air. Je me suis assuré de n’être vu par personne et leur ai envoyé un salut de la main très banal… les sourires sont apparus par dizaines. Immédiatement, je leur ai envoyé un baiser de la main, juste pour voir… J’ai presque senti les murs de l’école bouger, tellement elles étaient euphoriques !
~P.
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Photo CPL Olivier Lavigne-Ortiz, R22eR
L’autre jour, en lisant cette lettre où tu parlais de l’attentat et de ton inquiétude, je me suis aperçue que mes propos antimilitaristes, je les énonçais avec dureté et que, finalement, j’avais l’air plus agressive avec mon crayon que toi, malgré tes fusils. Moi qui prêche l’ouverture d’esprit, le respect et la compréhension de l’autre, je n’ai pas été très aimable depuis le début de cette correspondance et je m’en excuse. La vérité, c’est que cet échange m’apprend, soldat, à entendre autrement le discours militaire des hommes qui vont en pays de détresse.
~R.
Cette mission m’endurcit, mais en même temps je deviens plus émotif. C’est bizarre.
~P.
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CPL Patrick Kègle, Afghanistan, 3.5.2004
Tu as choisi un destin étrange, ami militaire. Plus jamais tu ne pourras, après ce que tu as vu, être innocent du monde, faire comme si « ça » - la pauvreté, la misère, l’horreur - n’existait pas.
~R.
Tu sais, je demande à Dieu tous les jours de me ramener en un seul morceau… ou le moins amoché possible. Je veux revoir ma famille ! J’ai un bébé… cela me torture l’esprit, l’idée qu’il ne me connaisse pas.
~P.
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CPL Patrick Kègle, Afghanistan, 6.5.2004
Une détonation plus forte que le tonnerre s’est fait entendre. J’ai reçu comme un puissant coup de poing et la poussière a envahi l’habitacle. Nous étions secoués… Mais Dieu a été avec nous ! Personne n’a été blessé ; nous avons eu peur pour le conducteur qui a été mis K.O. quelques secondes, mais rien de grave. Nous sommes demeurés calmes, car souvent, après l’explosion, les insurgés attaquent en embuscade (…) J’ai le dos et le cou un peu endoloris, mais ça devrait passer (…) On réussit quand même à rire de cette situation.
~P.
Est-ce que j’ai lu que ton blindé a roulé sur une mine ?
Je veux dire : tu as roulé sur une mine ?!
Et si j’ai bien lu, tes chums et toi riez de ça ?
Ma foi du bon Dieu ! Es-tu sûr que tu vas bien ?
~R.
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Afghanistan, 3 juin 2014. Photo Patrick Kègle
Je ne peux pas le jurer, mais je suis presque certaine que tu es malheureux de quitter l’Afghanistan avant la fin de ta mission. De laisser tes chums là-bas. D’abandonner les Afghans à leur triste sort.
Mais là, il faut rentrer chez toi.
~Roxanne
***
… Roxanne, Patrick, merci du fond du cœur pour ce livre magnifique.
~Alain
PS. C’est drôle quand j’y repense, l'impression qui ressort du livre : vous êtes tous les deux si attendrissants. A la rigueur, toi, c'est normal, tu es une fille et les filles sont attendrissantes de fait (hum) mais Patrick, le soldat, le costaud armé jusqu'aux dents, l'est tout autant.
PPS. Réflexion faite, si ce n’est un nourrisson, je ne vois pas ce qu'il y a de plus attendrissant qu'un soldat.
***
Image may be NSFW. Clik here to view.Roxanne Bouchard est écrivain et professeur de littérature au Québec. Outre « En terrain miné » coécrit avec Patrick Kègle, on lui doit « Whisky et paraboles » (VLB éditeur), prix Robert-Cliche et Grand-prix de la Relève Littéraire, « La gifle » (éd. Coups de Tête), « Crématorium circus » (VLB) et, tout récemment, « Nous étions le sel de la mer » (VLB), finaliste en France des prix Henri-Quéffelec et France-Québec 2015. Elle travaille actuellement à l'écriture de récits militaires (chouette !). Voir ici.
Patrick Kègle est caporal au célèbre Royal 22e Regiment, seule unité d’active québécoise de l’armée de terre canadienne. Déployé à deux reprises en Afghanistan, il est désormais Chevrier-Major à la Citadelle de Québec.
Site officiel de Roxanne ici ; page FaceBook du livre là.
Roxanne et Patrick en « live »
ISBN : 978-2896493470 - Prix : 18,17€ (24,95 $CAD) - Format 20,10x12,40, 237 pages, cahier-photo couleur.
Mili-Bibliothèque Royal 22e Régiment en Afghanistan
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Nous avons abordé « Mon Afghanistan » [Athéna Editions], autobiographie du LCL Steve Jourdain ici et « L’autre côté de la lentille » [éd. OLOrtiz], livre-photo du CPL Olivier « Wali » Lavigne-Ortiz là. « Vandoo » [22 prononcé à l’anglaise] est un roman du Capitaine-Adjudant René Vallerand, inspiré de son expérience afghane. Aux éd. Adrénaline, disponible chez Renaud-Bray ici.
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Hommage
Au soldat Sébastien Courcy, R22eR, chum de Patrick, mort le 16 juillet 2009 en Afghanistan,
Aux soldats canadiens morts en Afghanistan,
A tous les soldats morts pendant le conflit,
Aux blessés,
Aux femmes et maris, compagnes et compagnons, enfants, parents, familles et proches de tous les militaires déployés, ayant vécu dans l’angoisse pendant des mois,
A toutes celles et ceux qui cherchent à comprendre le sens de l’engagement de ces militaires.
A la mémoire des Afghans victimes de la barbarie talibane.
Je me souviens.
*
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Patrick Kègle, chevrier-major à la Citadelle de Québec, 10.12.2009
Ce que tu as fait pour sauver l’humanité n’est pas perdu, Pat. Ce que Sébastien a fait ne le sera jamais. Et c’est loin d’être un échec. Le sais-tu ?
Ta façon de sauver le monde, c’est de ne pas oublier Sébastien, de ne pas oublier les souffrances des Afghans, de ne pas oublier leur stress ni leur détresse.
Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.
Ces hommes en ont assez vu pour développer une lucidité intérieure légèrement désabusée et sarcastique, mais ils corrigent toujours la tristesse de l’âme par une féroce rage de vivre, une joie carnassière de l’instant et vouent à l’action un culte digne de l’antique.
Sylvain Tesson
Ah les Forces Spéciales françaises ! Tout le monde les « connait », tout le monde en parle : de sacrés mecs, hyper pro, le top, l’élite... L’aura est légitime. Mais au fond, qu’est-ce que l’on « sait » d’eux ? Mmmm ?
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Hé bien, pas grand-chose… jusque-là... Car grâce à « Task Force 32 » de Calvin Gautier, 1er RPIMa, vous êtes invités à plonger dans la vie d’un « Stick Action Spéciale », au combat, en Afghanistan. De l’inédit !
Alors, évidemment, notre opérateur a reçu l’aval de ses camarades et a édulcoré son propos (sécurité oblige). Reste que l’entrainement (intensif !), la vie dans la base et ses galères (p* la Logistique !), les ordres (mais c’est n’importe quoi !), le combat (oui, ça « défouraille »), les blessés (car le Taliban n’est pas un bras cassé)… Vous retrouverez tout cela dans le livre. Mais aussi la magnifique fraternité qui règne entre ces garçons (on ne va pas faire sourire en parlant d’amour… J) ; Et puis de l’humour, car on rigole beaucoup en lisant Calvin (le bar des SAS est équipé d’une « pole bar »… mais pas beaucoup de filles ; alors, qui danse ?).
Des hommes, quoi (fiers de se montrer des dessins d’enfants reçus de France pour les fêtes…).
Oui, les opérateurs des FS sont des hommes comme les autres.
En mieux.
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Briefing groupe avant le départ
Que veut exactement le haut commandement ? Juste rendre compte aux politiciens de nos ballades dans les vallées, sans faire de vagues, sans causer de pertes chez les salopards contre lesquels nous nous battons depuis dix ans ? Pour nous, c’est inacceptable, nous avons perdu des camarades dans ce conflit, alors il faut finir le boulot proprement et ne pas quitter l’Afghanistan comme des voleurs. Nous sommes là et nous comptons bien faire notre travail.
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Jalhorel, en position
Nous devons rester vigilants, parce que des infidèles, même inutiles sur une montagne perdue, ça reste une cible de choix. Avec Laurent, nous remarquons les petites habitudes des gars du groupe et les observons avec fierté. Glissés entre les rochers et dans les creux naturels du sol, malgré la fatigue et le froid, les gars sourient et sont prêts à réagir à un éventuel contact. C’est vraiment quelque chose d’exceptionnel d’être à la tête d’une telle meute.
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Poste de combat et look snowboardeur
Un chien errant monte sur la position. Il a l’air plutôt content de se trouver de nouveau copains. Il se trouve même un superbe jouet en déterrant une de nos charges explosives. Le malheureux se promène avec un pétard de 250g dans la gueule, poursuivi par Laurent qui a bondi pour récupérer la charge. (…) « Putain les enculés, ils ont même dressé des chiens en suicide bomber » !
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Opération Snake 22. Entrée du poste de Kalei-Pakistani dans lequel Jéjé, Virgil et Nigger sont blessés
Lorsque nous arrivons auprès de Jéjé, nous réalisons la gravité de la situation. Il gémit de douleur car il a des éclats de fragmentation métallique dans le visage, l’abdomen et les jambes. Sa jambe gauche est brisée au niveau du fémur et d’énormes lambeaux de chair pendent. Constant vérifie et resserre le garrot. J’essuie le sang sur le bas ventre pour mieux voir les plaies et Jéjé me demande de vérifier sa bite et ses couilles. Je lui conseille de ne pas regarder ses blessures et effectue ma vérification. Tout est là et en assez bon état (…) Constant empile les compresses sur la plaie pour arrêter les saignements et protéger la blessure. Pendant ce temps j’essaie de mesurer le pouls mais il est trop faible pour être perceptible. Jéjé a perdu une grosse quantité de sang et il est blanc comme un cul. Je le saisis en le rassurant, nos mains sont soudées par le sang coagulé. Il ne cesse de dire « Calvin, j’ai mal… ils m’ont eu ces enculés ! » « T’en fait pas Jéjé, c’est pas grave. On va te sortir de là vite fait ». Constant me demande « Tu as le pouls ? ». Comme Jéjé me regarde, je réponds « Oui, c’est nickel. » Constant comprend en voyant ma tronche que je mens.
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Jalorhel, Bravo team en action
Le groupe gicle aussitôt pour se poster et se préparer au combat (…) A 800 mètres de notre position, six insurgés se préparent à nous engager. Je fais ouvrir le feu juste au moment où ils placent une [mitrailleuse] PKM face à nous. Les Minimis et Damien engagent l’ennemi avant qu’il ne puisse s’installer. Les insurgés courent dans tous les sens. Chris effectue des tirs de saturation dès qu’une silhouette apparait au loin (…) « RPG ! » Les insurgés tirent deux roquettes en tir courbe pour essayer de compenser la distance mais elles tombent trop court. La PKM entre à présent dans la danse en tire de petites rafales précises. Les impacts de balles claquent autour de nos positions en faisant des bruits secs et des morceaux de rochers volent en éclats. Je télémètre la distance exacte de l’emplacement de la PKM avant de l’annoncer à Damien qui effectue les corrections nécessaires. Il ouvre le feu en coup par coup rapide et quelques secondes plus tard la PKM cesse son tir.
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Tentative de Snowboarding. Pas assez de pente…
Il a neigé à nouveau (…) Avec Laurent, nous faisons une petite balade dans la base pour nous décontracter et bavarder un peu au calme. Nous réalisons quelques photographies de paysage (…) Comme nous sommes plus près de la fin de nos carrières que du début, nous ressentons le besoin d’accumuler les souvenirs (…) J’imagine facilement dans 30 ans des conversations du style : « Tu vois, avant d’être un vieux con, papy était super cool, avec ses potes ils ont fait la guerre et c’était une sacrée bande de salopards ! »
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La popote SAS de la TF32 à Tagab
Le détachement qui nous relève arrive par convoi routier. Nous les guidons jusqu’à leurs chambres puis à une soirée karaoké organisée au foyer de la base. Lilian est le poulain du groupe, tous les espoirs des SAS reposent sur lui car les autres gars du groupe chantent comme des nazes. Je dépose les fameux tickets pour la sélection des chansons et choisis judicieusement deux titres : « Comme un ouragan » de Stéphanie et « Lolita » d’Alizée…
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Photo souvenir de l’opération Buffalo 60
Les gars se rapprochent et le SAS se réunit une dernière fois pour se dire au revoir avant les permissions. Juste à côté de Virgil, je m’aperçois que Laurent a un air bizarre, le regard fixé dans le vide et les yeux humides. Cela me parait étrange. Dans les semaines qui ont suivi, j’ai réalisé que moi aussi je n’étais pas dans mon état normal. Il a fallu que je m’habitue aussi à avoir les yeux humides et à me reprendre lorsque mon regard se perdait dans le vide.
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Image may be NSFW. Clik here to view.De par son appartenance aux Forces Spéciales, nous resterons discrets sur l’ADJ Calvin Gautier. Il suffit de savoir qu’il a parcouru le globe pendant vingt ans au service de la France, dont plusieurs déploiements en Afghanistan avec ses camarades du 1er RPIMa.
Il s’est forgé sa propre personnalité au cours des stages, des entraînements et des missions. Il a hérité des qualités des gens qu’il a côtoyés, qu’ils soient instructeurs ou camarades. Ils l’ont guidé sur ce chemin. Nous ne pouvons même pas imaginer les expériences qu’ils ont vécues ensemble. Je suis admirative envers chacun d’entre eux pour toutes les souffrances qu’ils ont endurées et qu’ils ont surmontées pour devenir ce qu’ils sont à présent.
Marina, compagne de Calvin.
Nos opérateurs SAS ne sont pas que des « bêtes de guerre », ils sont pétris d’humanité et elle affleure au détour du récit. Il y a ces petits gestes à l’égard des Afghans victimes du conflit ; cette complicité fraternelle entre membres du 1er RPIMa qui se retrouvent en famille ; cette connivence avec les « cousins » du 13e RDP, teintée d’estime et de respect mutuel ; ces rencontres impromptues et inoubliables avec des soldats français ou alliés, dont on partage le même sort au hasard du destin. Et puis il y a ces moments intemporels où, dans la tourmente, se forgent des amitiés éternelles, plus fortes que les liens du sang.
Souhaitons que notre patrie ait toujours des enfants animés de cet esprit d’audace et de victoire.
ISBN : 978-86-917707-0-9 – Prix 25€ - format 23x16, 280 pages, 64 photos couleurs, couverture rigide
Dans « Task Force 32 », Calvin Gautier ne parle pas de lui, mais du groupe, ce qui fait du livre un bel hommage à tous les opérateurs du 1er RPIMa et plus généralement aux FS. Il a été édité directement par l’auteur. Un autre challenge (et pas des moindres croyez-nous) relevé avec succès. Il est exclusivement disponible via le site de Calvin et l’association d’entraide Forces Spéciales « Fraternité et Esprit SAS ». Toutes les infos pour se le procurer sont ici. A réserver en envoyant un mail à cette adresse : tf32sas@gmail.com.
N’hésitez pas à contacter Calvin. Il est très pris mais sais se rendre disponible et accueil sympathique garanti !
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Hommage
Aux membres des Forces Spéciales morts pour la France en Afghanistan,
CPL Murat Yagci
CCH Cédric Crupel
ADJ Joël Gazeau
CCH David Poulain
BCH Gabriel Poirier
ADJ Yann Hertach
PM Loïc Le Page
PM Frédéric Paré
SM Jonathan Lefort
SM Benjamin Bourdet
CCH Sébastien Planelles
A tous les membres des Forces Spéciales morts pour la France, morts en service commandé,
Aux blessés.
Je ferai face à tout et je vaincrai.
Rien ne m’arrêtera, sauf la mort.
Et même si cela arrive, ce ne sera que temporaire,
Parce que ma mémoire motivera mes frères à triompher.
Code d’honneur de l’opérateur des Forces Spéciales.
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Un coup trop long et un coup trop court, le prochain est pour nous (…) J’étais touché (…) Je ressentais une douleur intense et je me suis injecté une dosette de morphine (…) J’ai examiné mon entrejambe parce que je craignais d’en perdre une (…) La douleur au ventre est rapidement devenue atroce (…)
J’entendais le Tigre faire les passages et tirer autour de notre position. Là, j’ai vu Constant, l’infirmier du stick, passer pour aller voir Jéjé, car il était vraiment dans un sale état. Quand j’ai vu Calvin, l’adjoint du SAS, avec son équipe, je me suis dit que j’étais sauvé. J’en avais les larmes aux yeux rien que de les voir. Je savais qu’ils allaient se battre pour nous et nous sortir de cette merde (…) Je les voyais se déployer avec rage pour nous sauver. Je regardais ces visages tendus. Les gars n’avaient qu’un seul objectif, nous sortir de là.
Curieusement, j’étais serein. Calvin et son équipe étaient là. Plus rien ne pouvait m’arriver.
Virgil, gravement blessé lors de l’opération « Snake 22 », 29 novembre 2011.
Le temps nous manque, mille fois hélas, pour aborder sous forme de recension tous les récits lus et appréciés. En guise de rattrapage, nous lançons une nouvelle rubrique, abordant de manière plus « synthétique » des livres à même de compléter votre milibibliothèque en fonction de vos centres d’intérêt. Cette fois-ci : la Guerre d’Algérie, avec un Zouave, un Fantassin (et ministre), un Chasseur d’Afrique et un Léopard de Bigeard ; la Guerre du Golfe, opération Daguet vécue par un pilote de Jaguar, et enfin les Forces Spéciales britanniques au travers de l’autobiographie d’un SBS.
Nous poursuivrons cette série au fil de l’eau et rien ne dit que certains de ces livres ne seront pas traités plus en profondeur dans le futur.
*
« Harkis, mes frères », SCH Jean Hinnerblès, 2e BZ, 94e RI
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Algérie, Jean Hinnerblès alias « Gerfaut », 24 avril 1961
Tendant l’oreille, il perçut comme un frôlement de chaussure sur le sol, aussitôt suivi par le bruit d’un caillou qui roule, ce qui confirma la présence du Fell sur la piste ; puis une ombre apparut sur le sentier, puis une autre, puis trois… Ils étaient là, à deux mètres du canon de sa carabine. Gerfaut attendit, le cœur battant, prêt à lui exploser la poitrine. Alors que le premier allait sortir de son champ de vision, reprenant son self-control, il pointa l’arme sur la cible mobile, en hurlant très fort : feu !
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« Harkis, mes frères », par le SCH Jean Hinnerblès, 2e BZ, 94e RI. Sept ans de combat en Algérie, à la tête d'un commando de chasse harki. Un récit écrit à la troisième personne, ce qui lui donne un petit côté roman de guerre.
Paru en 2010 chez Amalthée. ISBN 978-2310005050. Livre épuisé, mais nous pouvons mettre en relation avec l’auteur.
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« Il était une fois l’Algérie d’un appelé », Georges Pagé, 9e RCA
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Alger, 26 mars 1962
Ce samedi, je décide d’aller me recueillir rue d’Isly. Le drame a eu lieu il y a à peine cinq jours. Tout semble dévasté, gravats sur les trottoirs, impacts sur les murs et sur la chaussée. Des gens viennent des autres quartiers. On commente l’absence de tous ceux qui sont morts. Comme je suis habillé en militaire, certaines personnes me regardent de façon haineuse. Je comprends et ne m’attarde pas dans cette sinistre rue où tant de braves gens ont perdu la vie. L’armée a tiré sur des Français. C’est affreux.
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« Il était une fois l’Algérie d’un appelé – 1960-1962 », par Georges Pagé. Historique des dernières années de l'Algérie française, alors que l'auteur, appelé, est rattaché à l'état-major/9e Régiment de Chasseurs d'Afrique : communauté pied-noir du secteur d'Inkermann où Georges est basé, la rue d'Isly où il se trouve après la fusillade du 26 mars, le commando Georges, les SAS, ses rencontres a posteriori avec plusieurs acteurs des évènements (du GAL Massu à Pierre Messmer en passant par Michèle Hervé, grièvement blessée lors de l'attentat de l'Otomatic...), etc.
Paru en 2002 chez PG Editions. ISBN-13: 978-295182190. Il est possible de contacter l’auteur via son site ici.
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« Un seul cœur, un seul drapeau », CDT Hamlaoui Mekachera, 6e RTA, 60e RI
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Algérie, 9e Cie du 60e RI, ligne Morice. Au centre, Hamlaoui Mekachera.
Mon intégration au sein du régiment de l’ex-Royal Marine [60e RI] a soulevé une certaine animosité. Je le ressentais quotidiennement, étant considéré comme le « bouc émissaire » de la perte de l’Algérie. Cela occultait le fait que c’était bien moi le plus grand perdant de cette tragédie algérienne.
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« Un seul cœur, un seul drapeau », par le CDT Hamlaoui Mekachera. Orphelin de son père officier du 3e RTA, Mekachera intègre l'école des enfants de troupe de Miliana. Sous-officier sorti de Cherchell, il fait la campagne d'Indochine comme radio puis démineur du 6e RTA puis l'Algérie au sein du 60e RI. En 62, il rejoint la France et poursuit sa carrière d'officier dans plusieurs régiments d'infanterie. Quittant l'armée comme CDT, il est directeur de centre hospitalier, s'investit dans la vie associative, notamment auprès des musulmans rapatriés. Nommé délégué ministériel à l'intégration, membre du conseil économique et social, il termine sa carrière d'homme d'état comme ministre délégué aux anciens combattants. La partie "militaire" ne représente qu'un tiers du livre, essentiellement consacrée la période « enfant de troupe et école ». La seconde, «civile », est axée devoir de mémoire.
Paru en 2013 chez L’Harmattan. ISBN 978-2343017013. Disponible ici.
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« Trois ans chez Bigeard », 1CL Albert Bernard, 3e RPC
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Schneidenbach mortellement blessé le 21.11.1957 lors de l’opération « Timimoun ». Photo SCH Marc Flament.
[Schneidenbach] atterrit juste derrière le lieutenant Douceur et moi, en plein cœur du groupe rebelle. A peine libéré de son parachute, il part la mitraillette au poing avec d’autres camarades et ils arrosent la crête des dunes qui nous environnent pour dégager la zone de saut. Douceur se souvient avec émotion de cette dernière image qu’il garde de Schneidenbach progressant dans le désert. A la fin de la journée [nous retrouvons] le jeune homme en pleine agonie après avoir reçu une balle tirée à bout portant dans le front : sans doute s’est-il fait surprendre par un de ces redoutables tireurs isolés, enterrés dans le sable. L’infirmier Jacques Robert lui couvre le front d’un bandeau de compresses pour réduire l’hémorragie.
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« Trois ans chez Bigeard », récit du 1CL Albert Bernard, 3e RPC. Il n'y a pas plus légitime que le léopard Albert [en photo de couverture avec le CNE Florès] pour évoquer cette ambiance particulière qui régnait au sein du 3e RPC en 56/58 : Radio de la 4e Cie, il est sous les ordres des fameux CNE Florès ou LTN Douceur et en contact constant avec « Bruno », qui le surnomme "Beauté" du fait de sa voix joliment radiophonique...
Le bled, la bataille d’Alger, le « Je vous ai compris », le putsch ... tout cela vu de l'intérieur, suivi d’un document inédit de Bigeard, avec ordres du régiment, ordres du jour et notes de présentation de 1955 à 1957.
Paru en 2012 aux éditions LBM. ISBN 978-2915347913. L’éditeur a malheureusement disparu mais nous pouvons mettre en relation avec l’auteur.
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« Jaguar sur Al Jaber », CNE Alain Mahagne, EC 2/11 « Vosges »
Clip : Jaguar pendant la guerre du Golfe.
Ma verrière était perforée de part et d’autre et au milieu… il y avait mon casque. Dès lors, je réalisais que j’étais blessé. Aucune peur ne m’envahit, je restai lucide et maître de mes moyens. J’annonçais calmement mes problèmes à la radio :
« - Charly. Je suis touché. J’ai un trou dans la tête et je pisse le sang. – Tu confirmes Charly ?! »
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« Jaguar sur Al Jaber », par le CNE Alain Mahagne, EC 2/11 « Vosges ». Un des (trop) rares témoignages sur la 1ère guerre du Golfe et l'opération Daguet, et non des moindres, puisqu'Alain a participé au raid des 12 Jaguars, le jour J, sur la base aérienne koweïtie d'Al Jaber, fortement défendue par la DCA irakienne. Pour preuve, une balle a traversé son cockpit, le blessant à la tête...
Paru en 1993 (SHAA), réédité en 2011 aux éditions A4PM. ISBN 978-2-9536496-3-5. Pour se le procurer, contacter l’auteur ici.
N’oublions pas les 12 Français morts lors des opérations Daguet, Libage, MONUIK. Hommage à eux, aux blessés et à tous Ceux du Golfe.
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« En première ligne », Duncan Falconer, SBS, 14 INT
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Soldats de l’IRA [Armée Républicaine Irlandaise]
J’entendis un bruit, tout près ; un pied qui écrasait une brindille. Tous les sens en alerte, le front plissé à force de me creuser la cervelle, je retins ma respiration, mon cœur s’arrêta de battre. On aurait dit que tout se passait au ralenti. Le bruit reprit quelques secondes plus tard. Cette fois, j’en étais sûr, c’était un bruit de pas, suivi bientôt par un second. Mon cœur battait à tout rompre, j’avais une chape de plomb sur la poitrine. Quelqu’un s’approchait lentement le long de la haie. Je gardais la bouche entrouverte, réaction instinctive qui améliore la finesse de l’ouïe. Je pris plusieurs respirations profondes, l’adrénaline affluait dans mes veines. Je fis pivoter très lentement mon arme pour pointer le canon sur le bout de la haie, à quelques mètres devant moi. Encore un pas. J’effleurais doucement la détente.
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« En première ligne » de Duncan Falconer, plus jeune recrue de l’histoire du Special Boat Service. Une plongée [jeu-de-mot] passionnante dans l’univers du SBS et du « Det »/14 INT, piliers, avec le SAS, des Forces Spéciales de Sa Très Gracieuse Majesté. La sélection et l’entraînement, la lutte contre l'IRA, l’abordage des cargos et plateformes pétrolières… mais aussi, et peut-être surtout, une belle histoire d’homme(s). On peut remercier Nimrod de rendre accessible aux non anglophones des témoignages de cette qualité. A lire en parallèle à « Parcours Commando » de Marius.
Photos Natachenka/UPpL’E – Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
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Soirée du 22 juin dernier. Nous "papotons" avec le CDT Brice Erbland et sa charmante épouse, ponctuant le propos de nos habituelles facéties chasseresses. A notre gauche se trouve le GAL Georgelin, Grand Chancelier de la Légion d’Honneur. Un peu plus loin, le GAL Dary, ancien Gouverneur Militaire de Paris et le Médecin Général-Inspecteur de l’hôpital Percy, Christian Plotton. Nous venons de saluer le GAL Théry, Légionnaire croisé brièvement dans les années 80 à Berlin, devenu, par les hasards de la vie et dans un tout autre contexte, un fort sympathique collègue, ainsi que le copain-CBA Rémi Scarpa. Bientôt, nous rejoindrons Geneviève de Galard et son mari le Colonel de Heaulme. Nous avons des choses à nous dire…
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Où sommes-nous ? A la remise du prix de la Saint-Cyrienne 2015, sur l’invitation surprise (et vivement appréciée !) de Brice Erbland, parrain d’Une Plume pour L’Epée, lauréat du prix spécial 2013 pour « Dans les griffes du Tigre », membre du jury du prestigieux prix milittéraire attribué par l’association des Cyrards.
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Remise du prix par le Général de Corps d'Armée (2S) Dominique Delort, président de la Saint-Cyrienne, après un discours inspiré.
L’année 2015 consacre « Le visage des hommes » du Professeur Marie-Dominique Colas, médecin-en-chef psychiatre. Choix du jury qui nous plaît beaucoup : Qualité indéniable du récit, lecture facile grâce à un ton juste doublé d’une bonne pédagogie de « vulgarisation » ; témoignages nombreux, parfois éprouvants, toujours émouvants. Il est vrai que nous sommes un public acquis : les soldats blessés dans leur chair ou leur psychisme, les Gueules Cassées, les victimes du syndrome de stress post-traumatique ont une place particulière dans nos cœurs, comme ils doivent l’avoir dans celui de chaque Français. Nous avons d’ailleurs souvent abordé ces hommes en détresse et leurs récits, SCH Truchet, ADJ Favière, CCH Geoffroy, SCH Douady, COL Boyer…
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Un jour de garde, un jour d’été comme les autres, dans un hôpital militaire : les blessés en fauteuil roulant circulent dans le hall où les visiteurs font mine de ne pas voir les visages bandés, les membres amputés. Les blouses blanches se croisent d’un pas pressé. Aucun bruit, aucun cri, un silence quasi religieux règne dans cette cathédrale de la douleur.
Midi : le « bip » retentit. Le service de réanimation demande d’urgence la présence du psychiatre. Un grand blessé, hospitalisé depuis une dizaine de jours, se réveille. Il ne supporte pas la machine qui lui permet de respirer : « Venez nous aider, nous allons le perdre ! » Comment faire ? Comment le sauver ? Il est pourtant revenu vivant du pire. Il a survécu à un attentat-suicide en Afghanistan. Dans la presse du jour, on peut lire qu’il a été « très abîmé ». Marc ouvre les yeux. Ce premier regard va inaugurer une longue histoire médicale, une aventure humaine.
« Le visage des hommes », Pr Marie-Dominique Colas
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CDT Brice Erbland
Vous écrivez : « Dans une société où le lien social se délite et où la solitude des individus les conduit à chercher dans la science un idéal sécuritaire en guise de religion, la blessure au combat, la « Gueule Cassée » est soit oubliée, soit érigée en enjeu de prouesses technologiques. »
Et vous parlez « d'une incroyable mobilisation des médecins pour gagner leur combat en ramenant plus de blessés à la vie, en essayant de diminuer les séquelles physiques, esthétiques et psychiques. »
Je ne peux m’empêcher, en cette époque de débat éthique sur la dignité des vies brisées par la maladie ou l’accident, de voir tout au long de votre livre la preuve irréfutable de l’importance et du succès de l’accompagnement humain par rapport à la facilité de l’abandon.
Extrait de l’éloge au médecin-en-chef Colas par le CDT Erbland
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Pr Marie-Dominique Colas entourée, de gauche à droite, par son chef, le Médecin Général-Inspecteur de l’hôpital Percy Christian Plotton ; la maman de la lauréate ; Madame Geneviève de Galard ; le Général Delort, président de la Saint-Cyrienne
Sortie de Santé-Navale, le médecin-en-chef Marie-Dominique Colas est professeur agrégé du Val-de-Grâce, psychiatre, chef d’un service de l’Hôpital d’Instruction des Armées Percy où sont accueillis les blessés de guerre. Médecin militaire avant tout, elle est régulièrement déployée en OPEX : Ex-Yougoslavie, Côte d’Ivoire, Afghanistan, Mali. Titulaire d’un doctorat de recherche en psychopathologie et psychanalyse consacré aux « Gueules Cassées », la réflexion qu’elle conduit sur la clinique de la défiguration et du blessé de guerre s’inscrit dans un engagement sans faille du Service de Santé des Armées au chevet de ceux qui ont choisi de servir la France.
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« Le visage des hommes », Pr Marie-Dominique Colas, Service de Santé des Armées, prix de la Saint-Cyrienne 2015.
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Aux éditions Lavauzelle
ISBN 978-2702516164 – prix 24€ - format 22x15 cm, 250 pages. Disponible ici.
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Geneviève de Galard et Catherine Guillaudeux des éditions Lavauzelle.
Et pour conclure, un petit instant de grâce, lorsque j’ai salué l’Ange de Dien Bien Phu : « - Broquet ? Comme Anne ? – Oui, ma cousine Anne – Ah, la Reine-Mère des convoyeuses ! Une femme formidable, disparue hélas bien trop tôt…». Marque d’attention qui m’est allée droit au cœur et sans doute à celui d’Anne, là où elle se trouve. Et la conversation a continué, avec Mme de Galard et son mari le Colonel de Heaulme. Il y aurait beaucoup à dire, comme une impression de toucher l’Histoire du bout du doigt, mais vous nous pardonnerez de conserver, une fois n'est pas coutume, notre petit jardin secret…
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Hommage
Aux Gueules Cassées,
A tous les blessés de guerre, blessés en service commandé.
« Nous éprouvions ce sentiment d'extrême liberté,
qui est l'apanage de ceux qui sont débarrassés de leur image,
et ont retiré du voisinage de la mort et de la cohabitation quotidienne avec la souffrance,
cette distance avec ce qui rend l'homme
si petit et si étriqué. »
Marc Dugain, La chambre des officiers
Site de la fondation « Gueules Cassées – Sourire quand même » ici.
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Hommage
Au personnel du Service de Santé des Armées.
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Prix de la Saint-Cyrienne 2015, Russe-blanc et Chasseur
Trois ans déjà… Je reçois une photo de Marc avec son épouse, assis côte à côte dans leur belle maison du sud. Leur sourire illumine ma journée. Quelques mots indiquent qu’ils n’ont pas oublié cette extraordinaire expérience humaine, cette rencontre dans les « tranchées » du sous-sol de l’hôpital Percy. Ils en sont sortis vivant par un « puits de lumière ». Leur visage exprime la douceur, la sérénité retrouvée et la joie d’être ensemble. Je me remémore cet instant où la vie ne tenait plus qu’à un fil, suspendue au verdict d’un dernier face-à-face avec un « médecin de l’âme », selon l’expression de certains patients. Je décide alors de reprendre contact avec Marc.
« Le visage des hommes », Pr Marie-Dominique Colas
En premier lieu, un mot sur nos hôtes, car si nous étions présents, c’est grâce à deux grands copains, dont nous avons été les « accompagnateurs » : l’ADC Jean-Claude Saulnier et l’éditeur Nimrod.
Il nous semble inutile de présenter Nimrod. Quel fan de récit de soldat ne connait pas cet éditeur ? L’un des (le ?) plus beaux catalogues milittéraires francophones, grâce à un haut niveau d’exigence sur les récits publiés doublé d’un vrai travail d’édition (plus rare qu'on ne le croit). Quant à l’ADC Saulnier : 2e REP, infirmier, ancien président des Sous-Officiers, 30 ans de Légion, de Kolwezi à l’Afgha… pour ceux qui n’en auraient jamais entendu parler (ayant vécu un certain temps sur Mars) un petit rattrapage est possible avec notre recension sur « Ma vie de Légionnaire » ici [publié justement chez Nimrod] .
Mais, à tout seigneur tout honneur, revenons-en aux lauréats.
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Le prix littéraire de l’Armée de Terre – Erwan Bergot 2015 remis à Sylvain Tesson pour « Berezina », par le Général de Corps d'Armée Bertrand Houitte de La Chesnais, Major Général de l'Armée de Terre, ancien chef de corps du 1er RI, en lieu et place du CEMAT, retenu par les évènements dramatiques du week-end.
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Le prix fêtait cette année ses vingt ans. Pour succéder aux Elie de Saint-Marc, Pierre Schoendoerffer et autre Pierre Darcourt, le jury a distingué « Berezina » de Sylvain Tesson, récit du périple de l’auteur et ses compagnons de route Thomas Goisque, photographe, Cédric Gras, directeur du centre culturel français de Donetsk et deux amis russes, Vassili et Vitaly, en side-car, sur les traces de la Grande-Armée en retraite. Un tel récit sort du « scope » du blog ; nous vous invitons donc, pour en savoir plus, à vous reporter à cet article du blog ami « Guerres et Conflits ». Nous rappellerons cependant que Sylvain a toute sa place ici, civil ayant une place particulière dans la littérature mili ; pour preuve, nous avons abordé deux de ses livres : « Haute Tension – Des Chasseurs alpins en Afghanistan» - avec Thomas Goisque et Bertrand de Miollis - et « D’ombre et de poussière», de nouveau avec Thomas.
En sus, une mention spéciale a été attribuée au Général Bernard Barrera, chef des forces terrestres au Mali, pour « Opération Serval », éditions du Seuil.
L’accueil que nous a réservé le Général a été des plus sympathiques. Il avait déjà entendu parler du blog il est vrai, par le LCL Steve Jourdain, R22eR, qui en avait fait la pub lors d’une rencontre au Québec. Mentionnons aussi que le Général a été chef de corps du 16e BC, ce qui créé des liens…
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Nous avons commencé à échanger et ce n’est qu’un début, puisque le Général sera présent au FILM de Saint-Cyr-Coëtquidanles 24 et 25 juillet prochains (et nous aussi évidemment).
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Et maintenant, notre rubrique « people » car vous savez à quel point nous aimons nous afficher, un peu fiers, aux côtés de nos soldats…
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Avec l’Adjudant-Chef Jean-Claude Saulnier venu tout spécialement de sa belle Corse d’adoption (il est pourtant difficile de quitter Calvi…). Magnifique personne, toute en humilité. Du beau grand Légionnaire !
Notre recension sur « Une vie de Légionnaire », éditions Nimrod, ici.
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Et nous avons même eu droit à notre cadeau Képi Blanc.
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Belles retrouvailles avec le Major Sylvain Favière, infirmier-para désormais réserviste, accompagné par Nathalie Léon, AS du 5e RHC de Pau.
Un grand bonheur de revoir Sylvain, rencontré il y a trois ans déjà, l’un des premiers auteurs à avoir été abordé sur ce blog. Recension sur son beau et grave récit (car il aborde le syndrome de stress post-traumatique) « Ma blessure de guerre invisible », ici.
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Le commandant Brice Erbland, 1er RHC, et Madame.
Un habitué ! Nous devons avoir 3723 photos avec Brice, donc pour une fois, le Commandant sans nous mais avec sa jolie épouse Marie-Charlotte. Notre recension sur « Dans les griffes du Tigre », éditions Les Belles Lettres, est ici.
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Un autre habitué, le Chef de Bataillon Rémi Scarpa, Gaulois du 92e RI, adjoint du Général Barréra lors de l’opération Serval. Nous n’avons pas encore trouvé le temps d’aborder sur le blog son « Offensive éclair au Mali », éditions Pierre de Taillac, mais l’avons fait sur notre page FaceBook ici.
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Retrouvailles à nouveau, cette fois avec le CCH Emmanuel Gargoullaud, portant beau les trois fourragères du RICM. Nous avons abordé « Afghanistan en feu », éditions Economica, ici. A noter qu’Emmanuel finalise un manuscrit sur sa dernière OPEX, « Sangaris » (RCA).
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Le rayonnant Sergent-Chef Jocelyn Truchet, 13e BCA. Encore un habitué d’Une Plume pour L’Epée, donc vous avez droit cette fois à une photo avec son amie. Notre recension sur « Blessé de guerre », autoédité, est ici.
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Belle brochette d'écrivains-combattants, n’est-ce pas. Et encore en manque-t-il : nous avons salué le Colonel Nicolas Le Nen, dont nous avons abordé le journal de marche en Afghanistan, « Task Force Tiger », ici, et un regret : avoir aperçu au loin le Capitaine Nicolas Barthe, vétéran d’Afghanistan avec le 21e RIMa, désormais au RICM, auteur d’ « Engagé ». Mais hélas il a quitté la soirée avant que nous ayons eu le temps de l’aborder. Flûte. Présentation de son brillant récit, paru aux éditions Grasset, ici.
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Russe-blanc et Président des Sous-Officiers de la Légion
Doit-on vraiment préciser que nous avons passé une excellente soirée ?
Et notre leitmotiv : allez au-devant des soldats ; les occasions sont nombreuses : JPO, défilés, salons… Intéressez-vous à eux, à leurs missions, abordez-les, parlez-leur !
Vous pouvez aussi en profiter pour les remercier pour leurs actions, leurs sacrifices et ceux de leurs familles, les risques encourus au service de la France, à votre service...
Extraits publiés avec l’aimable autorisation des auteurs. Droits réservés.
« La parole qui, trop souvent, n’est qu’un mot pour l’homme de haute politique, devient un fait terrible pour l’homme d’armes.
Ce que l’un dit légèrement et avec perfidie, l’autre l’écrit sur la poussière avec son sang. »
Alfred de Vigny
L’indifférence conduit à l’oubli. Tout homme ayant le sentiment de subir cet état de fait le vit comme une souffrance et nous le disons avec tristesse, mais c’est ce qu’éprouvent nombre de nos soldats : l’indifférence de leurs compatriotes. C’est d’autant plus cruel que la nation leur demande tant de sacrifices : éloignement de leur famille pendant des mois, enfants qui naissent et grandissent au loin, confrontation à des situations dramatiques voire traumatisantes, risque d’être blessé, tué…
Certains diront : « Ils ont choisi ». Certes. Mais en quoi ce choix autoriserait les Français à rester indifférent à leur sort, alors que ce sont ces mêmes Français qui les envoient au combat ?
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Alors, pour lutter contre l’indifférence, rien ne vaut la parole : raconter, décrire, expliquer, se livrer. Heureusement, la « Grande Muette » relève du mythe. Les soldats parlent, écrivent. Mais publier un livre n’est pas donné à tout un chacun. Partant de ce principe, le LCL Hubert le Roux et Antoine Sabbagh ont décidé de se positionner non en auteurs, mais en porte-paroles : Ils ont ainsi sillonné la France, collectionnant des interviews de combattants des différents théâtres d’opérations, du Liban à la RCA. Ils les ont ensuite retranscrits, in extenso. Ainsi est né « Paroles de soldats ». Un livre de fait et de par son style « brut de fonderie », ce qui le rend d’autant plus percutant…
« Paradoxalement, la guerre n’a jamais été aussi présente dans les imaginaires. Romans, séries, films, bandes dessinées, la guerre est partout. Sur fond de rap et de guerre urbaine pour Call of Duty (…) la guerre est bien là, mais vécue comme une épopée révolue ou une fiction et la fascination qu’elle suscite est inversement proportionnelle à l’oubli dans lequel sont tombés les soldats. »
Continuer à parler, soldats de France. Nous sommes plus nombreux que vous ne le croyez à vous écouter, à ne pas être indifférents, à ne pas vous oublier. Et quand bien même nous ne serions qu’une poignée aujourd’hui, ne présageons pas de l’avenir : il suffit d’une petite chaussette rouge sang, oubliée au milieu d’un linge immaculé, pour étendre après lessive de beaux draps roses…
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Mes camarades savaient que j’étais en dessous, mais je ne répondais pas. J’étais mort. En fait, j’étais toujours en vie, mais entre la vie et la mort. La souffrance est tellement forte. Des bouffées de chaleur m’envahissaient. J’étais complètement perdu. Et puis, à un moment, j’ai oublié la souffrance. J’ai pensé à ma famille. Je me suis senti bien. Et là, j’ai vu de la lumière. Les sauveteurs avaient encerclé le trou. Une main s’est tendue vers moi.
CPL Daniel, 1983, attentat du Drakkar, Beyrouth, Liban.
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Toutes les positions irakiennes sont embossées. Ils sont dans leurs trous. Il n’y a que nous qui bougeons. Quand on a face à nous des engins embossés, on demande un tir d’artillerie. Boum ! Boum ! Boum ! On observe le tir. Ça commence à bouger. Ca riposte un peu. L’ALAT arrive. Boum ! Boum ! Boum ! Ça balance les missiles et après nous on tire. Je me souviens plus de mon indicatif. Les rouges, machin, feu ! On tire ! Et puis, pouf, drapeau blanc.
Patrice, chef de peloton de chars, 1990, opération Daguet, Guerre de Golfe, Irak.
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J’avais déjà vu des morts. Nos morts. Nos beaux morts dans les cercueils. Refaits, pour être présentés à la famille. Mais comme ça, non… En plus de ça, de voir le traitement des cadavres, jetés, ramassés, jetés… C’est de la viande. C’est quelque chose de dégoutant dont il faut se débarrasser rapidement. Les Rwandais, je sais pas si ça leur faisait rien, mais vu de l’extérieur, aucune émotion. Ils regardaient, mais rien. Moi je prenais beaucoup de recul par rapport à tout ça : une protection, ouais. L’impression de vivre à côté de moi. D’avoir le moi physique présent et d’en être spectateur.
A mesure que le temps passait, on avait l’impression que, depuis le début, on nous avait raconté n’importe quoi. On était parti défendre les Bosniaques opprimés par les méchants Serbes ! Et quand vous arrivez au premier check point serbe et qu’ils vous disent « Soldats français gut ! Mitterrand pfff ! » en tournant le pouce vers le bas, vous voyez bien que c’est pas ce qu’on nous avait dit. Les Bosniaques, eux, ils nous ont « rafalés » d’emblée.
Jean, électromécanicien, 1994, Sarajevo, Bosnie.
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D’ap. photo Thomas Goisque
Pour moi, les Talibans ne combattent pas pour des motifs religieux, mais pour leurs intérêts personnels (…) Ils avaient une vision de l’Islam un peu sauvage, un peu barbare (…) L’Islam, je le vois comme ça, ne peut pas imposer à quelqu’un de faire ses prières, de faire le Ramadan, de ne pas manger de porc, si ça ne vient pas de son cœur. Faut que ça vienne de la personne. On peut expliquer que c’est bien de faire comme ça, mais l’imposer, voire tuer pour que les gens basculent dans la religion musulmane : non. Le Djihad, on me l’a jamais enseigné comme ça. Le Djihad, c’est l’époque du Prophète, quand on attaquait les intérêts de l’Islam sur le sol de La Mecque. Après, moi j’ai un autre Djihad, que mon père m’a appris : c’est l’éducation des enfants pour qu’ils fassent quelque-chose de leur vie.
Ce n’est ni la première ni la dernière fois que je tire. La première fois, mon cœur s’est emballé. Le stress, l’adrénaline, ont mis du temps à redescendre. Après, je n’ai plus jamais eu de stress. Quand je tire des bombes, il y a potentiellement des gens, que je vois ou que je ne vois pas. C’est peut-être un peu froid, mais ça ne me fait rien. Je ne suis pas un combattant, je ne combats pas avec mon FAMAS. Je suis loin.
La mort de Vormezeele ? Putain, oui, on l’a sue tout de suite (…) Ça fait mal au cœur. Moi, côté renseignement, je me dis : « Est-ce que j’ai bien géré la situation pour le préparer, pour qu’il ait tout pour se sauver ? » Vormezeele, il avait trente-deux, trente-trois ans. On se connaissait bien, depuis huit ans, on avait fait des missions ensemble. C’est moi qui suis rentré à la morgue, à l’hôpital, pour le couvrir et le ramener. C’était costaud de le voir comme ça en sachant comment il était avant, avec l’envie de combat, de chercher l’aventure et tout ça. Putain, la vie elle est rien !
ADC Cristian, 2013, opération Serval, Mali.
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On était une trentaine, même pas une section. Les mecs commençaient à nous contourner derrière avec des machettes. Ils avaient les yeux bleus, un cercle bleu autour des pupilles. Ils devaient prendre je ne sais quelle drogue. Ils étaient complètement shootés, complètement alcoolisés. Avec eux, il y avait plein d’enfant. Ils les mettaient devant eux en sachant que nous, les soldats français, on n’allait pas tirer (…) A ce moment, j’ai vu se planter devant moi un gamin de cinq ou six ans avec un bébé dans les bras. Un bébé de deux mois, pas plus. Au début, j’ai cru que le bébé suffoquait, qu’il nous l’amenait pour qu’on le soigne. Avant même qu’on puisse faire quoi que ce soit, le gamin a pris le nouveau-né à bout de bras et l’a jeté au sol. La tête s’est fracassée sur le bitume.
SGT Benoît, opération Sangaris, Bangui, RCA.
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La reprise du travail a été compliquée. Je dormais, je faisais pas trop de cauchemars, mais ce qui avait le plus changé chez moi, c’est que j’étais peut-être devenue un peu moins sensible face à certaines pathologies. Ça s’est beaucoup vu lorsque j’ai fait mes premières gardes aux Urgences. Les patients me disaient qu’ils avaient mal, ils souffraient réellement, mais pour moi, ils avaient leurs deux bras, leurs deux jambes, ils me parlaient, tout allait bien… Je voulais pas entendre ces souffrances-là et c’est pour ça que j’ai été voir un psy. Depuis, clairement, ça va mieux, mais c’est vrai que je suis peut-être devenue plus insensible à ce niveau-là.
Julie, infirmière, de retour de mission à l’hôpital international militaire de Kaboul, 2010, Afghanistan
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D’ap. photo Philippe de Poulpiquet
J’ai déplié la banquette devant la télé. On y a dormi juste avant son départ et il y a encore son odeur sur l’oreiller. Le matin, je ne lave pas les draps. J’ai le sentiment de dormir un peu plus avec lui. Je mets le traversin vertical dans le lit, comme ça, les premières nuits, j’ai la sensation de renvoi de chaleur, de ne pas être toute seule. C’est curieux ce qu’on fait des fois ! (…) Donc je dors dans la salle télé, je regarde des trucs en attendant le coup de fil. Je l’attendais vers 10h, il est 10h30. Et là, mon portable sonne. C’est Violaine, mon amie médecin. (…) « Tu tombes bien, j’entends du bruit en bas de chez moi » « T’inquiète pas, c’est nous ». (…) Je descends, j’allume la lumière, j’ouvre la porte, je vois Violaine. A côté d’elle, il y a son mari en grand uniforme. Il y a aussi la femme du chef de corps et le chef de corps, lui aussi en uniforme (…) et là, j’ai un flash.
Alice, veuve de guerre.
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Image may be NSFW. Clik here to view.Le Lieutenant-Colonel Hubert le Roux est officier supérieur d’active. Il a été chargé du recrutement des sous-officiers et hommes du rang de l’Armée de Terre. On lui doit, outre « Paroles de soldats », une biographie de Lartéguy, publiée chez Tallandier.
Antoine Sabbagh est historien et éditeur, ancien professeur de la Sorbonne et de l’Université de Columbia dans le cadre de son programme parisien.
Photo : rencontre avec le LCL le Roux au Salon du Livre de Paris 2015.
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ISBN : 979-1021004849 - prix 20,90 € - format 21,5 x 14,5 - 464 pages.
Les hommes de guerre sont de l’espèce qui se rase pour mourir. Ils croient à la rédemption de l’homme par la vertu de l’exercice et du pas cadencé. Ils cultivent la force physique et la belle gueule, s’offrant le luxe des réveils précoces dans les matins glacés et des marches harassantes pour la joie de s’éprouver.
Ce sont les derniers poètes de la gratuité absolue.
Jean Lartéguy
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Hommage
Aux conjoints, familles, proches des soldats.
C’est pour la Femme de militaire qui se lève tous les jours à 6h pour préparer les vêtements et le petit déjeuner pour ses enfants dont elle est seule à s’occuper. C’est pour la Femme de Militaire enceinte qui se demande si son homme sera rentré à temps pour voir venir au monde son enfant. C’est pour la Femme de Militaire qui habite une nouvelle ville et qui fait face à un nouveau départ sans avoir eu le temps de se faire des amis. C’est pour la Femme de Militaire qui annule ses projets du samedi soir pour rester près du téléphone, même si elle sait que la conversation sera pleine de grésillements et toujours trop courte. C’est pour la Femme de Militaire qui pleure en s’endormant dans un lit trop froid. C’est pour la Femme de Militaire qui se laisse aller à la détresse en se demandant si elle pourra revoir son homme vivant. C’est pour la Femme de Militaire qui a l’impression de mourir à l’intérieur chaque fois qu’il dit qu’il doit s’en aller, mais qui sourit malgré tout. C’est pour la Femme de Militaire qui fait la queue à la Poste avec un colis dans les bras en se demandant si les gâteaux seront toujours moelleux en arrivant. C’est pour la Femme de Militaire qui dine seule en s’inquiétant parce que cela fait plusieurs jours qu’elle n’a pas de nouvelles de « là-bas ». C’est pour la Femme de Militaire qui a des papillons dans le ventre en voyant son homme descendre du bus au retour d’OPEX. C’est pour nous toutes, pour les Femmes de Militaires tristes, les Femmes de Militaires seules, les Femmes de militaires fortes, un toast à nous, parce qu’un chèque de paie ne console pas, un oreiller à serrer dans ses bras n'est pas suffisant, une webcam n'a rien à voir avec la réalité, expliquer à un enfant qui pleure que papa ne reviendra pas avant 4 longs mois est ou sera notre lot à toutes, et que les femmes de civils n'ont pas idée de ce que c'est de sentir tous les jours que quelque chose vous manque. Nos soldats sont courageux, mais nous le sommes aussi.
A.M, femme de militaire.
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J’ai tout dit [à ma femme]. Pas sur le moment, parce que je ne voulais pas qu’elle s’inquiète mais, une fois rentré, je lui ai raconté. A mes parents aussi.
Je pense qu’il faut que les gens sachent ce qu’on fait.
Photos UPpL’E. Merci de nous consulter si vous souhaitez les réutiliser.
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Les habitués de ce blog savent que nous ne raterions le FILM pour rien au monde. Près de 10 000 livres proposés, abordant toutes les facettes de la littérature militaire, du récit à la BD en passant par l’histoire, la photo, la stratégie… et la présence d’une centaine d’auteurs heureux d’échanger sur leurs expériences et leurs livres. Un week-end exceptionnel pour les fans de milittérature, couplé à la JPO des écoles, parfaitement animée sur terre et dans les airs, du « Tonneau » à la majestueuse cérémonie nocturne du Triomphe.
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Un aperçu de notre week-end (sous le soleil !) à Coëtquidan ! (car Paris ne doit pas avoir le monopole des grandes manifestations...).
La 6e édition du FILM
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Un moment fort, nôtre rencontre avec le médecin Colonel Jean-Louis Rondy et le Sergent infirmier Heinrich Bauer, Légionnaires, vétérans d’Indochine, combattants de Diên Biên Phu, survivants des camps Vietminh.
La présence de ces grands anciens était due à l’éditeur Nimrod, qui vient de publier « Les chemins de Diên Biên Phu », écrit par Franck Mirmont (pseudo d’une personne éminemment connue dans notre petit monde milittéraire…), s’appuyant sur les souvenirs de six vétérans, Jean Guêtre, Commando Nord-Vietnam, Jean Carpentier, mécanicien-mitrailleur de la 28F, Bernard Ledogar, para du 6e BPC, Pierre Latanne, SLT du 5e BPVN, et donc le COL Jean-Louis Rondy et le SGT Heinrich Bauer, respectivement des 1er et 2e BEP.
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Conférence (passionnante) des COL Rondy, SGT Baueur et l’éditeur Nimrod (oui, vos serviteurs sont au premier rang !) – photo ESCC.
Nous terminons la lecture du livre et il est absolument remarquable. Se lisant comme un roman, l’épopée tragique de Ceux d’Indo glace le sang. On ne sort pas indemne de cette lecture, entre admiration sans bornes pour les soldats, effroi face à ce qu’ils ont vécu, tant au combat que dans les camps, et peut-être aussi un rien de colère, prescription ou pas, pour le Haut-Commandement et sa stratégie oscillant entre aveuglement et incompétence. Un livre qui fera date.
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En règle générale, nous ne publions nos dédicaces que dans le cadre des recensions, mais nous ne résistons pas à l’envie de partager celle-ci dès maintenant. Merveilleux autant qu’émouvant cadeau de l’éditeur Nimrod : une version « top-collector » des « Chemins de Diên Biên Phu », qu’il a pris soin de faire dédicacer avant le FILM par Bernard Ledogar , Jean Carpentier et Pierre Latanne, nous laissant le soin de compléter avec Jean-Louis Rondy et Heinrich Bauer. Malheureusement, Jean Guêtre est décédé avant la publication du livre.
Disponible aux éditions Nimrod ici. A noter qu’il est utilement complété par un essai du même auteur : « La Guerre d’Indochine vue par la CIA ».
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Retrouvailles avec le GAL Bernard Barrera, rencontré une première fois lorsqu’il a reçu le prix spécial Erwan Bergot pour « Opération Serval ». Sujet on ne peut plus maîtrisé, puisque le Général était le chef des opérations terrestres… En attendant de lire le livre et d’échanger sur le Mali, la conversation s’est orientée (comme c’est étonnant) vers notre cher 16e BC (le Général en a été chef de corps). Chasseur un jour…
CDT Erbland, COL Gout, GAL Pertuisel… les ALAT-men écrivent de plus en plus et c’est tant mieux ! La bibliothèque bleue cobalt se complète encore grâce au COL Pierre Verbog, chef de corps du 3e RHC, et son « Envoyez les hélicos » : ses carnets de guerre en Côte d’Ivoire, Libye, Mali. Aux éditions du Rocher, disponible dans toutes les bonnes librairies. Accueil très sympa du Colonel, accompagné de gentils compliments sur le blog…
Sur la photo, au second plan et discutant avec le padre Ducourneau, le CNE (r) Raphaël Krafft, COS rattaché au 2e REI en Afgha – Nous avons abordé son très réussi « Captain Teacher » ici.
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Pas de FILM sans aumônier ! Succédant aux padre Kalka et Venard présents l’année dernière, le festival accueillait le padre Jean-Yves Ducourneau, le plus costaud de l’aumônerie J, officiant à Saint-Maixent. Enfin l’occasion de papoter et nous ne nous en sommes pas privés (jusqu’à présent, nos échanges n’avaient été que « online »). Vous retrouvez ici notre recension sur « Les cloches sonnent aussi à Kaboul ».
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Si ce n’est avec l’ADJ Delsaut du GIGN, nous n’avons guère eu l’occasion d’aborder la Gendarmerie. Rectification de tir grâce au COL Stéphane Bras et « POMLT – Gendarmes en Afghanistan ». Un sujet hélas trop méconnu [on peut rêver qu’un jour les « grands » médias fassent leur travail d’information] : la formation des policiers afghans par des gendarmes français. Intéressant n’est-ce-pas ? Aux éditions Anovi, disponible ici.
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Le festival s’internationalise ! L’année dernière, nous avions la joie d’y retrouver le Canada, représenté par le LCL Steve Jourdain, R22eR (voir ici) . Cette année, c’est la Belgique qui était à l’honneur, avec le COL Bruno Smets, Chasseur Ardennais, vétéran de Bosnie. Son livre, composé de lettres envoyées à sa femme, alors que Bruno est commandant de compagnie, faisant avec ses hommes de « BELBOS » le tampon entre bosno-musulmans et bosno-croates, est très réussi. Nous l’aborderons dès la rentrée. Autoéditié, disponible ici.
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A nouveau le CBA Rémi Scarpa diront les habitués du blog ! J. Il est vrai qu’il est très présent dans le monde milittéraire ces derniers temps et que son beau livre « Offensive éclair au Mali » se vend comme des petits pains. [ce qui donne le sourire à son éditeur Pierre de Taillac à sa droite] [on rigole Pierre J]. Nous allons aborder le livre dans une chronique milibibli dès la rentrée.
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Rémi, outre le fait d’être un combattant, un auteur, un lecteur qui nous conseille toujours de très bons livres, est aussi, comme nous, amateur de figurines. Il a pu compléter sa collection au Triomphe, chez « Soldats d’Europe et d’ailleurs » auquel nous sommes heureux de faire une petite pub, tant leur travail est soigné. Voir leur site ici.
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Nous avions déjà eu la joie de rencontrer le Lieutenant-Colonel le Roux, de lire « Paroles de soldats » et de dire tout le bien que l'on pensait du livre ici. Nous l’avons donc retrouvé avec plaisir, faisant par la même occasion connaissance avec son coauteur Antoine Sabbagh.
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Encore des habitués d’Une Plume pour L’Epée ! A gauche notre Chef du 13e BCA, Jocelyn Truchet, à droite Sylvain Auché, ancien photographe de Saint-Cyr, fine « Canon ». Nous avons parlé de leurs livres « Blessé de guerre » ici et « Hommage et valeurs » là . Les coïncidences de la vie font qu’ils vont se retrouver tous deux prochainement à Lyon, s’étant lancés dans de nouveaux projets professionnels. Nous leur renouvelons tous nos vœux de succès !
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IL est cocasse que nos amis Légionnaires soient de si bons photographes, tout en détestant être pris en photos JVous imaginerez donc, entre vos serviteurs, Youri Obraztsov [oui, cela a parlé russe avec Natachenka]. C’est un auteur prolifique auquel on doit deux superbes livres photos pour les fans de képis blancs : « Peloton » et « Légion étrangère » – belles découvertes - mais aussi toute une série d’ouvrage sur le matériel. Pour une idée de ses publications, voir ici.
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Nous profitons de cet instant béret vert pour rappeler notre recension sur « La Légion dans la peau » de l’ADC Victor Ferreira, absent physiquement du FILM, mais bien représenté par une belle exposition de ses photos.
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Avec « Trahison sanglante en Afghanistan », Audrey Ferraro, ancienne militaire spécialisée dans la Com’, issue du 4e Bataillon de l’ESM et désormais réserviste, revient sur un des épisodes les plus douloureux de la campagne afghane : l’assassinat de cinq soldats par un Taliban infiltré, voire un déséquilibré. Nous en saurons plus en lisant son « Trahison sanglante en Afghanistan ». Aux éditions Publibook, disponible ici.
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« Monclar ». Voici un nom qui « sonne » dans l’histoire de France. Saint-Cyrien ; Première-Guerre mondiale durant laquelle il est blessé 7 fois ; Légionnaire au Proche-Orient pendant l’Entre-Deux-Guerres ; Narvik pendant la Campagne de France ; Londres dès le 21 juin 40, Campagne d’Afrique puis de Syrie à la tête de la 13e DBLE, refusant à chaque fois de porter les armes contre les Français restés fidèles au gouvernement de Vichy ; Indochine ; il termine sa carrière militaire en abandonnant ses étoiles de Général pour prendre le commandement du bataillon de Corée comme Lieutenant-Colonel… « Bayard du XXe siècle » comme est joliment sous-titrée la biographie de Mme Monclar, dédiée à son père, retrouvée au FILM après une première rencontre au Salon des Ecrivains-Combattants. Aux éditions Via Romana, disponible ici.
Rappelons que la 171e promotion de l’ESM 84/87 a été baptisée « Général Monclar »
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Le Triomphe est aussi l’occasion de remettre le prix des Cadets. Cette année, les Cyrards et Dolos ont distingué Jean-Christophe Notin pour « La Guerre de la France au Mali », aux éditions Tallandier. Dans son discours, l’auteur a souligné sa volonté de mettre à l’honneur « Ceux du Mali » et leur éclatante victoire sur les Djihadistes, tout en regrettant l’écho « limité » donné par nos médias…
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Et pour conclure sur le FILM, nous ne manquerons pas de saluer notre chère organisatrice et amie Delphine, qui ne compte pas son temps, croyez-nous, pour faire de « son » festival une réussite totale. Lors de la remise du prix des cadets, elle a reçu un hommage appuyé du Général Windeck, commandant les écoles. Hautement mérité.
Mais ce n’est pas tout à fait terminé… pas de FILM sans Triomphe !
Comme le veut la tradition, la 201e promo de la Spéciale et la 54e de l’EMIA ont reçu leurs noms de baptême.
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Pour les Cyrards : « Chef d’Escadrons de Neuchèze ». Cavalier, bataille de France avec le 1er GFC, résistant, prisonnier de la Gestapo, évadé, il rejoint l’Afrique du Nord, débarque en Provence. Il meurt au combat le 9 septembre 1944.
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Pour les Dolos, le bien connu Lieutenant Nungesser. Hussard au début de la Grande-Guerre puis chevalier du ciel, as aux 43 victoires, il disparait avec son camarade Coli aux commandes de « L’oiseau blanc » dans leur tentative de traversée de l’Atlantique.
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Pour illustrer ces deux beaux choix [et les superbes chants ! Bravo !], un livre sur les combats de la cavalerie française 1940-45, par Gérard Saint-Martin chez Economica et une BD sur Nungesser, par Fred Bernard et Aseyn à paraître en septembre chez Casterman.
Nous en profitons pour souhaiter une belle carrière aux sortants, Cyrards de la promotion « Lieutenants Thomazo », Dolos de la « Général Delayen », sans oublier le 4e Bataillon, une bonne continuation aux 201e, 54e et 200e « Capitaine Hervouët » et la bienvenue aux 202e et 55e !
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Nous souhaitons également une belle suite de carrière au Général Windeck, qui quitte la direction des écoles pour des nouvelles miliaventures…
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Nos photos du FILM et du Triomphe sont visibles et téléchargeables (pour un usage non commercial évidemment) ici.
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L’année dernière, nous avions passé un week-end extraordinaire, de si bons moments passés avec les padre Kalka et Venard, Steve Jourdain, Bernard Gaillot, Yohann Douady et tous les autres auteurs, l’émotion de voir s’éloigner en chantant la 52e promotion de l’EMIA « Ceux d’Afghanistan » avec laquelle nous avions des liens privilégiés. Nous vous avions raconté tout cela ici.
Nous aurions pu craindre, cette fois-ci, d’éprouver un peu de nostalgie. Mais le monde mili est ainsi fait que la magie opère, encore et toujours : l’accueil des soldats, des écrivains-combattants, sourires aux lèvres et regards francs, les bons moments passés au bar des Lieutenants et au Wagram, les démos spectaculaires, le fun du Tonneau et l’émotion de la cérémonie nocturne… (et puis aussi un p’tit cousin Dolo dans la Nungesser…). Que du bonheur…
Alors, nous nous donnons rendez-vous l’année prochaine à Coët’, amis lecteurs ?
Poursuivons la visite de notre bibliothèque militaire, entamée ici.
Cette fois-ci, nous revivons les combats d’un grand-ancien d’Indochine et d’Algérie. Nous accompagnons au Kosovo le chef des Forces Spéciales françaises et en Côte d’Ivoire un Commissaire des Armées. Nous visitons la base de Nancy-Ochey, tanière des Muds alias Mirage 2000D. Nous nous posons des questions sur nos valeureux Poilus et nous concluons, grâce à l'assistant militaire du chef des opérations terrestres de Serval, avec la brillante victoire de nos soldats sur les djihadistes au Mali !
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« De Saïgon à Alger », LV Bernard Bachelot, Dinassaut 6, 14F, 12F
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LCM en patrouille fluviale, Indochine
Certains hommes se sont finalement endormis couchés les uns sur les autres. A la surface du fleuve, l’eau phosphorescente scintille. Les remous font danser le reflet des étoiles et les lucioles transforment un palmier en arbre de Noël. Un souffle d’air fait vibrer le feuillage. Ce frémissement provoque un malaise. Et toujours le croassement lancinant des crapauds-buffles. Les guetteurs viets, tapis dans ces branchages, doivent écouter le passage du convoi. Les oreilles se tendent. Le bruit sourd d’un tam-tam. Est-ce la peur ? Non, le rythme est plus net maintenant : les Viets donnent l’alerte. Deux coups brefs, un coup sourd. Pam, pam, poum… pam, pam, poum… Les doigts se crispent sur les armes.
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Corsair de la 14F partant en mission depuis la base de Telergma dans le Constantinois, Algérie. Photo Bachelot
Le napalm s’enflamme à une vingtaine de mètres au-dessus de la grotte. Bien décidé à réussir ma deuxième attaque, je garde une ligne de vol parfaitement horizontale et attends « le plus tard possible ». J’appuie sur le bouton et tire violemment sur le manche. Le sommet de la falaise apparaît au-dessus du nez de mon appareil, trop haute me semble-t-il pour être franchie. Trop près de la montagne, je ne peux dégager en virage. En un mouvement reflexe, je pousse à fond la manette de gaz et accentue fortement ma pression sur le manche. Ma cellule se met à vibrer violemment, je suis à la limite du décrochage. La falaise fonce sur moi.
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L’exode, Alger, 1962.
Un choc, une blessure. En cet instant ma vie bascule. Un monde – le mien – s’effondre. Des valeurs essentielles auxquelles j’avais appris à croire et à être fidèle – patriotisme, honneur, parole donnée… - ont toutes été violées. Ne sont-elles plus désormais respectables ? Terrible déception qu’accompagne un sentiment de révolte qui, des années durant, me rongera et qui, 45 ans après, reste encore vivace.
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« De Saïgon à Alger » par le Lieutenant de Vaisseau Bernard Bachelot, EN48. Un monsieur discret, rencontré lors du salon des écrivains-combattants 2013, et pourtant un grand ancien : il a combattu de 51 à 53 sur les fleuves de Cochinchine, au sein de la Dinassaut 6, Flottille Amphibie Indochine Sud, avant de devenir pilote de l'Aéronavale, flottilles 14F puis 12F dont il prend le commandement. Formé aux Etats-Unis, c'est aux commandes de son Corsair qu'il intervient lors de la campagne de Suez puis de la Guerre d'Algérie - époque déchirante pour lui, Bernard étant pied-noir, amené à bombarder sa propre maison de famille… L'issue du conflit sonnera d'ailleurs le glas de son engagement militaire. Très beau récit.
Avec le LV Bernard Bachelot au Salon des Ecrivains-Combattants 2013
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« L’Europe est morte à Pristina », COL Jacques Hogard, Légionnaire
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Miliciens de l’UÇK [milice indépendantiste Albano-Kosovare]
Une embuscade vient d’être déclenchée par l’UÇK sur un convoi de civils serbes, deux cents tracteurs emportant hommes, femmes et enfants, sur la route reliant Pec à Mitrovica. Je fais effectuer une reconnaissance par un hélicoptère armé qui me rend compte de la position des éléments de l’UÇK. Je lui demande alors de tirer quelques rafales de semonce afin de les contraindre à décrocher et cesser cette agression inqualifiable sur des civils armés.
Quelques minutes plus tard, je suis, à ma très grande surprise, appelé à la radio par le Général britannique Mason qui m’enjoint de faire cesser les tirs contre ses SAS ! Je réalise alors que les éléments de l’UÇK qui se livrent à cette embuscade (…) sont encadrés – au minimum accompagnés- par mes « frères d’armes » des Forces Spéciales britanniques…
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« L’Europe est morte à Pristina » par le COL Jacques Hogard, Légionnaire, commandant le groupement interarmées des Forces Spéciales françaises au Kosovo, GIFS « Grakaniko », vétéran du Rwanda dont il a tiré un premier récit « Les larmes de l’honneur », que nous avons abordé ici.
Dire que le conflit au Kosovo a été « compliqué » est un euphémisme, l’implication occidentale pouvant (devant) faire débat. Jacques ne s’en prive pas, battant en brèche certains choix militaro-politiques Otaniens [il démissionnera d’ailleurs de l’Armée après cette OPEX]. L’Histoire jugera. En attendant, nous ne pouvons qu’espérer que les communautés serbe et albanaise trouvent le chemin d’une coexistence pacifique… Et souvenons-nous des neuf soldats français morts au Kosovo, entre 2000 et 2009. Hommage à eux et aux blessés.
Aux éditions Hugo Doc. A commander chez votre libraire ou sur le Net.
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Avec le COL Jacques Hogard, notamment après sa conférence sur le Kosovo à l’IDC en mai 2014
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« La nuit africaine », Commissaire des armées (CNE) Julien Eche
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La Vierge aux larmes de sang, œuvre de Sandre Wambeke inspirée du livre de Julien Eche
Les Français nous prennent pour des gosses souriants : l'Afrique heureuse, qu'ils disent. Un peu comme si nous n'étions pas assez civilisés pour avoir l'air grave. C'est qu'ici, jeune homme, nous savons dès la naissance que nous sommes mortels comme tous les hommes, et que la finalité, c'est la cendre. Alors la vie doit être heureuse, joyeuse, rythmée et agréable.
Vous autres Blancs, imaginez repousser sans cesse la mort, elle entre par trop en considération dans vos calculs ; il n'y a pour vous que l'épargne d'une vie, la position sociale, les chimères que votre société a inventé pour plus de richesse qu'il n'est physiquement possible (...) Alors vivez, oui, vivez ! Enchantez la vie des autres et faites en sorte d'être heureux, quoi qu'il vous arrive; Cela n'a rien de primitif. C'est au contraire la plus grande des sagesses.
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« La nuit africaine » par le Commissaire des Armées (CNE) Julien Eche est un récit romancé, inspiré de son déploiement en Côte d'Ivoire peu après la guerre civile : Un jeune officier part à la tête d'une petite unité pour montrer la présence française dans la brousse. Un parcours initiatique, vu initialement par le narrateur comme une aventure "à la capitaine Binger" (qui rallia Dakar à Kong à la fin du XIX°), mais qui, au gré des rencontres et évènements, ira bien au-delà de l'imagerie exotique véhiculée par les affiches ventant la Coloniale dans les années 30. Une belle histoire, bien menée et profonde. Pas seulement une autre vision de l'Afrique, une autre vision du soldat aussi...
« Dans le repaire du Mirage 2000D – Nancy-Ochey », Alexandre Paringaux, photographe
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Ses équipages sillonnent les cieux des Balkans, de l'Afrique, de l'Asie centrale et de l'Afghanistan. Cette omniprésence repose certes sur des matériels performants, en perpétuelle amélioration, permettant de répondre aux défis technologiques d'engagement toujours plus exigeants. Mais elle repose surtout sur les femmes et les hommes de la base aérienne de Nancy-Ochey qui permettent de répondre en permanence aux sollicitations opérationnelles. Quelle que soit leur spécialité, toutes et tous sont des rouages indispensables dans la performance de la BA 133. Dévoués et pugnaces, ils démontrent au quotidien un engagement sans faille, en dépit d'un environnement difficile. Les opérations menées au Kosovo, en République Démocratique du Congo, en Afghanistan, en Lybie ou encore au Mali attestent de leur engagement militaire et de leur abnégation.
Colonel Louis Péna, Commandant de la Base aérienne 133 « Commandant Henry Jeandet »
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« Dans le repaire du Mirage 2000D – Nancy-Ochey » n’est qu’un exemple parmi toute une série de beaux livres publiés par le photographe Alexandre Paringaux et Frédéric Lert, journaliste aéro de référence. On trouve en effet, dans la même collection, des ouvrages dédiés à ER 2/33 « Savoie », EC 3/3 « Ardennes », la Patrouille de France, les bases de Saint-Dizier, Mont-de-Marsan, Salon-de-Provence, les Forces Aériennes Stratégiques, le porte-avions Foch… Des livres-albums où l’on retrouve évidemment de superbes photos d’avions, mais aussi les hommes qui les font voler, les arment et les entretiennent ; ceux qui font fonctionner la base ; ceux qui la protègent. L’ensemble est visuellement remarquable, accompagné d’un texte fouillé et de nombreuses interviews. A chaque fois une petite bible, tant le sujet est traité avec exhaustivité. Attention, les tirages s’épuisent vite…
« Le petit quizz de la Grande-Guerre », Grégoire Thonnat
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De qui s’agit-il ?
De nos cinq arrière-grands-pères, combattants de la Grande-Guerre en France et Russie ; Abel, Ernest mort pour la France, Gaston, Fiodor et Vassilï
Si les taxis parisiens sont rentrés dans l’Histoire avec les « taxis de la Marne », qu’ont-ils fait qui écorne un peu le mythe ?
Ils ont mis les compteurs afin que les autorités militaires règlent la course !
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Avec « Le petit quizz de la Grande-Guerre » de Grégoire Thonnat, nous sortons évidemment de notre contexte « récit de soldat », mais ce livre mérite un coup de projecteur, bien qu’il soit d’ores et déjà un succès de librairie (25 000 exemplaires vendus). Il est composé d’une centaine de questions/réponses sur des évènements clés, anecdotes, idées reçues... Une manière ludique d’aborder la Première Guerre Mondiale, pour un prix modique (moins de 5€). L'Education Nationale pourrait tout à fait l’utiliser dans la cadre du Centenaire... (puisque l'on parle de pédagogie innovante, passons à l'acte).
Aux éditions Pierre de Taillac. Disponible ici. A noter, dans le même esprit et par le même auteur, le « Petit quizz de la Marine ».
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Avec Grégoire Thonnat et les éditeurs Pierre de Taillac et Nimrod, aux Invalides pour le centenaire de l’ECPAD
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« Offensive éclair au Mali », CBA Rémi Scarpa, 92e RI
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« Rapaces » de la 4e Cie du 92e RI au combat dans les rues de Gao. Photo ECPAD/Jérémy L, issue du livre.
Les « Cent jours » de l’offensive les avaient soudés ; la chaleur étouffante n’avait distingué ni les grades ni les armes d’origine ; l’ennemi, tenace et imprévisible, avait été vaincu par l’effort conjoint des combattants, ceux de l’avant, commandés par des états-majors réactifs, des logisticiens et des transmetteurs, des pilotes et des mécaniciens (…) Cette victoire des armes de la France, c’était celle de l’union, chère au cœur du Général de Monsabert , l’union des armes, des âmes et des cœurs.
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« Offensive éclair au Mali » par le CBA Rémi Scarpa, Gaulois du 92e RI. Ouvrage qui restera comme la référence sur Serval. En premier lieu, qui aurait été plus légitime que le CBA Scarpa, assistant militaire du GAL Barrera commandant les forces terrestres, pour écrire un tel livre ? Ensuite, vous y trouverez toutes les informations sur l’organisation de la force, le déroulement de l’opération au jour le jour, les unités impliquées (avec une large place laissée au Soutien, Transmetteurs, Tringlots, Logisticiens…), le matériel employé, les alliés africains, les insignes et fanions, des plans, les hommages à ceux qui sont tombés… le tout accompagné de témoignages. En sus, des clichés *sublimes* de l’ECPAD ou issus des collections particulières de nos combattants (ce qui en fait aussi un beau livre-photo). « Et c’est pas fini… » J En bonus, un film de 55 mn réalisé par l’ECPAD.
Extraits et photos (*) publiés avec l’aimable autorisation des auteurs et des éditions Nimrod. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.
Ce sera une guerre entre un tigre et un éléphant. Si jamais le tigre s'arrête, l'éléphant le transpercera de ses puissantes défenses. Seulement le tigre ne s'arrêtera pas. Il se tapit dans la jungle pendant le jour pour ne sortir que la nuit. Il s'élancera sur l'éléphant et lui arrachera le dos par grands lambeaux puis il disparaîtra à nouveau dans la jungle obscure. Et lentement l'éléphant mourra d'épuisement et d'hémorragie. Voilà ce que sera la guerre d'Indochine.
Ho Chi Min
Les grandes batailles - en premier lieu les grandes défaites - finissent toujours par s’inscrire dans l’imaginaire collectif parées d’une aura opéra-tragique-aux-accents-wagneriens. Diên Biên Phu ne fait pas exception à la règle : L’Indochine et son mal jaune ; des paras pain-pour-les-canards ; un ange prénommé Geneviève ; des collines-holocaustes portant des noms de fiancées, « Anne-Marie », « Eliane », « Huguette » ; des prisonniers « walking dead »…
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Nous inscrivant dans cette dynamique, nous aurions pu aborder le livre de Franck Mirmont et de ses six co-auteurs vétérans d’Indo en mode « romantique » : parachutage charge-chevaleresque à l‘Azincourt, corps à corps à-coup-de-pelle-bêche à l’Alésia, dernier carré on-vous-em* à la Waterloo, crépuscule d’un Empire à la Sedan. Cela aurait certainement « fonctionné » car tout cela est compris dans cette bataille. Cependant, nous l’aurions vécu comme une forme de malhonnêteté : c’est que, voyez-vous, « Ceux de Diên Biên Phu » - en tous cas les rares survivants des combats et des camps - sont là. Nous avons eu l’honneur de croiser leurs regards. Nous avons écouté leurs silences. Nous avons lu « Les Chemins de Diên Biên Phu ». Alors, nous renvoyons tout romantisme aux calendes thermopyliennes pour prendre à notre compte leur part d’effroi, ce qu’eux-mêmes vivent toujours, au jour le jour, 60 ans après ; de prendre notre part de « cela».
Avant de prendre contact avec chacun de ces « anciens », je ne savais rien de leur vie ni de leurs opérations. Je n’avais pas cherché à rencontrer des héros, des guerriers ou des soldats d’exception. Je voulais juste parler de « gens ordinaires » que le destin avait projetés au cœur de la guerre d’Indochine. J’ai découvert combien la route qu’ils avaient parcourue avait été longue. A plusieurs reprises, ces « gens ordinaires » avaient été confrontés à des événements ou à des drames extraordinaires. A ce que le légionnaire hongrois résumait d’un simple mot : « cela » ; un mot qui lui faisait baisser la tête et noyait ses yeux tant il refermait à lui seul de souvenirs et de violence.
« Vous allez être parachutés au-dessus de cette zone reproduite ici en miniature et qui se situe à 300 kilomètres à l’ouest d’Hanoï. Il s’agit de réoccuper cette région au cœur du pays thaï, vide de toute présence française, et d’y créer une base aéroterrestre, un bon point d’amarrage à partir duquel l’Armée pourra rayonner et contrôler, sinon empêcher, les déplacements du Viêt-Minh (…) Imprégnez-vous de la géographie du lieu, de sa topographie, des emplacements et des points caractéristiques qui vous aideront à vous repérer en arrivant au sol.
Un dernier mot. Cette zone a pour nom Diên Biên Phu. »
La troupe prend ses habitudes. Très tôt le matin, après la petite sortie équestre à travers le cantonnement du Lieutenant Decours, excellent cavalier, qui a récupéré un petit cheval thaï, c’est le départ vers le « chantier » [construction du camp retranché]. A midi, pause casse-croûte avec le monotone ordinaire de Fleury Michon, jusqu’au jour où, lassé de manger l’éternel bœuf-carottes ou mouton-haricots des boîtes de rations, le caporal-chef F. fait la surprise de ravitailler la section en viande fraîche et de servir de bons biftecks grillés appréciés par tous, même par le Lieutenant Decours. Et ce dernier, d’une naïveté désarmante, se désolera de ne plus trouver son cheval, qu’il ne reverra jamais – et pour cause.
Ignorants du danger qui couve, les officiels viennent se faire prendre en photo à Diên Biên Phu avant de s’émerveiller devant les camps de tente, les alvéoles à découvert de l’artillerie lourde, la piste d’atterrissage et ses avions parfaitement alignés ou encore les quelques abris creusés qui résistent parfaitement aux infiltrations de pluie, mais dont la structure ne saurait arrêter un obus.
(…)
Au cours de cette même période, les tirailleurs annamites reçoivent un nombre incroyable de télégrammes les rappelant dans leurs foyers, pour des raisons de santé. Un père est malade, une mère est souffrante, une grand-mère est en train d’accoucher, une tante est mourante… Parallèlement, les paysans thaïs de la vallée commencent à prendre le large. Au fil des jours, des villages entiers se vident et finissent par être complètement désertés.
17h10, l’artillerie viêt délivre toute sa puissance de feu. Une véritable grêle d’obus s’abat sur le camp avec précision et de manière ininterrompue. Lorsque les premières salves tonnent, les légionnaires du 1er BEP sont tout d’abord persuadés qu’il s’agit de l’artillerie du point d’appui Isabelle qui a ouvert le feu au sud, tant cette densité de feu leur semble impossible du côté viêt-minh. Mais il faut rapidement se rendre à l’évidence puisque ces tirs pulvérisent leurs propres positions. Les obus tombent par paquets de quatre ou de huit pour une efficacité maximale, à raison d’une dizaine d’obus à la minute pendant plusieurs heures. Plusieurs avions qui n’ont pas le temps de décoller sont foudroyés dans leurs fragiles alvéoles. Un dépôt d’essence s’embrase. L’intensité du feu continue d’augmenter dans un crescendo incroyable jusqu’à ce que la nuit tombe en se teintant de lueurs rouges.
Jean-Louis Rondy voit apparaître les premiers « fantômes » de Diên Biên Phu. Ces hommes au visage hagard et au treillis déchiré ou ensanglanté sont les rares légionnaires du 3e bataillon de la 13e DBLE à avoir échappé à la chute de leur point d’appui Béatrice, submergé vers 2 heures du matin à l’issue de combats au corps à corps venus solder cinq assauts successifs. Moins d’une vingtaine d’hommes, sur plus de 400, ont survécu aux vagues de bodoïs [fantassins viêt-minh] qui sont venues s’échouer contre leurs barbelés.
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[Le Légionnaire Matzke] a reçu une balle en plein visage qui lui a arraché la moitié de la mâchoire et les caillots de sang qui se forment dans sa gorge risquent désormais de l’étouffer. Le médecin lieutenant Rondy réagit tout de suite. Il sort un fil et une aiguille de sa trousse de secours, perce la langue du blessé et relie celle-ci au treillis de l’homme en tirant sur le fil afin que la langue pende en dehors de la gorge sans entraîner d’étouffement. Le lieutenant Desmaizières, qui assiste à la scène, interroge Rondy sur les soins qu’il vient de prodiguer.
« Il ne fallait surtout pas qu’il avale sa langue ».
[trois jours plus tard]
Alors que Desmaizières se redresse, un obus éclate devant lui. Il s’effondre, porte machinalement la main à son menton et constate que celui-ci a disparu. Sa bouche n’est plus qu’un immense trou, la peau de ses joues déchiquetées pend dans le vide. Il repense alors au geste qu’a fait le médecin lieutenant Rondy quelques jours plus tôt et il tire sur sa langue pour ne pas s’étouffer avec le sang ou les éclats de dents qui inondent sa gorge. Il rejoint un des chars d’appui tout en trouvant la force d’aider un légionnaire à l’épaule fracassées à avancer.
[il sera évacué dans un des derniers avions sanitaires à quitter le camp].
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La saison des pluies arrive, transformant les positions et leurs maigres abris en véritables bourbiers. Tout commence à manquer. Les hommes sont en guenilles, d’autres ont vieilli d’un seul coup et d’autres encore ne sont plus capables de résister à la fatigue. Les têtes sont vides, les corps sont épuisés. Un jour, Bernard Ledogar découvre une boîte de ration qu’il dévore aussitôt, tant sa faim est grande. Son repas achevé, il s’endort dans son trou avant d’être bientôt réveillé par une sensation étrange. La boue dans laquelle il est couché semble prendre vie. Des frissons lui parcourent le corps, comme autant de caresses légères et glacées. Il s’agit d’une myriade d’asticots qui viennent d’être libérés par l’explosion du ventre gonflé d’un cadavre, emprisonné dans une gangue de boue, sur lequel il s’était endormi sans s’en rendre compte.
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Charge de « bodoïs », image de propagande.
Les explosions des obus laissent la place à quelques coups de sifflet ou sonneries de trompe. C’est le signal adressé aux bodoïs pour qu’ils montent à l’assaut (…) Il faut les laisser venir jusqu’à mi-pente de la colline, attendre l’ordre d’ouverture du feu, garder les poings serrés contre la crosse du fusil-mitrailleur ou le doigt contre la détente tout en espérant que les barbelés fourniront les quelques précieuses secondes nécessaires pour ralentir cette marée humaine et provoquer des ravages dans ses rangs.
(…)
A peine les chargeurs sont-ils vidés qu’ils sont aussitôt remplacés pour que les armes puissent rependre leur assourdissant staccato. Les canons des armes chauffent rapidement, à tel point que cette chaleur se propage jusqu’aux chargeurs qui en viennent à bruler les mains des soldats lorsqu’il leur faut les remplacer. Bernard Ledogar tire, tire et tire encore. Il a l’impression que son FM va lui exploser à la figure tant le canon rougeoie dans l’obscurité. Il voudrait bien pisser dessus pour le refroidir, mais il n’en a pas le temps (…) Il a beau tirer, rien ne paraît ralentir l’avancée de l’ennemi. Bientôt, il est à court de munition (…) Bernard Ledogar empoigne sa pelle-bêche.
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Photo ECPAD/Daniel Camus via éd. Nimrod
Un silence de mort règne dans l’abri, avec pour seuls sons insoutenables le grincement lancinant des dents de scie sur la jambe. Subitement, le médecin lieutenant Madelaine ralentit le rythme de son mouvement.
« Heinrich, tu continues ».
Le sergent Bauer s’interroge quelques instants mais, sans poser de question, il prend le relais du médecin en même temps qu’un infirmier le remplace pour continuer à immobiliser le blessé. Tandis que le sergent poursuit l’opération restée en plan, le médecin lieutenant Madelaine va s’adosser contre une paroi de l’abri. Il exhale un long soupir, sort un paquet de cigarettes de sa poche et en allume une. Il tire une première taffe, ferme les yeux en recrachant lentement la fumée, puis renouvelle son geste machinalement.
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Le 7 mai, après les grondements de l’artillerie ennemie qui n’ont cessé de se faire entendre dans toute la plaine, un grand silence vient recouvrir le camp comme un linceul.
***
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Prisonniers de Diên Biên Phu
Bernard Ledogar s’inquiète de sa blessure au bras. Il n’avait jamais osé soulever le chiffon faisant office de bandage jusque-là, mais la plaie lui occasionne désormais des démangeaisons insupportables et il se résout à défaire le pansement pour voir ce qu’il y a dessous. L’odeur de putréfaction qui émane de la plaie lui fait craindre le pire. Alors qu’il déroule la bande de tissu, un flot d’asticots s’échappe de sa blessure pour tomber par terre.
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Jean Carpentier prisonnier au camp 42 (photo issue d’un film de propagande viêt-minh)
Les trois viêts semblent hésiter un moment sur la manière d’utiliser cet appareil, puis ils se décident. Le nouveau venu s’empare des câbles électriques s’achevant par une pince crocodile et vient fixer celle-ci sur l’un des testicules de Jean Carpentier. Il n’y a cependant pas de ressort sur cette pince et l’homme décide d’en refermer les mâchoires de manière artisanale. Il l’enroule dans un fil électrique qu’il passe ensuite autour d’une tige de fer, puis fait tourner cette tige sur elle-même afin de resserrer la pression sur les mâchoires. La douleur se fait de plus en plus grande, emprisonnant le testicule, l’écrasant, puis finissant par le broyer subitement, à la manière d’une coquille d’œuf.
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Pour s’assurer qu’un malade est bien mort, il suffit de constater l’immobilité du corps lorsque les mouches viennent pondre dans les plaies, la bouche ou les narines du cadavre. Chaque fois que cela est possible, et tant que l’odeur de putréfaction ne vient pas chasser celles des diarrhées ou de vomissures, les infirmiers gardent les cadavres deux ou trois jours de manière à disposer de quelques rations de riz supplémentaires qui leur auraient été servies de leur vivant. Ces morts ne sont enterrés que lorsque l’odeur devient vraiment trop insupportable.
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Jean Carpentier se sent totalement vidé, dépourvu de toute force physique et morale. Il ne voit plus désormais aucune lueur d’espoir, rien qu’un horizon noir peuplé de fantômes décharnés et dévorés par la vermine. Il éprouve une envie irrésistible de se laisser couler, de disparaitre pour ne plus sentir ses boyaux se tordre sous l’effet de la faim, ne plus affronter l’innommable, ne plus espérer en vain, simplement fermer les yeux et oublier.
***
Franck Mirmont est le pseudonyme d’une personne bien connue dans le monde de la littérature militaire. Il ne souhaite pas se mettre sur le devant de la scène, nous respecterons ce vœu.
Image may be NSFW. Clik here to view.Heinrich Bauer est né en 1930 à Kassel en Allemagne. Elevé dans une « Napola » (les Nationalpolitischen Erziehungsanstalten, internats de l'enseignement secondaire destinés à former l'élite de l’Allemagne nazi), errant de ferme en ferme à la fin de la guerre, il intègre comme nombre de ses compatriotes la Légion. Sergent infirmier, parachuté sur Diên Biên Phu avec le 2e BEP, prisonnier, il survit aux camps. Il quitte la Légion en 1955.
Image may be NSFW. Clik here to view.Jean Carpentier naît en 1931 dans la région d’Amiens. Engagé dans la Marine en 1948, il est formé à l’école des apprentis mécaniciens (« Les Arpettes »). Mécanicien volant de la flottille 28F sur Privateer, son avion est abattu lors d'une nouvelle mission sur Diên Biên Phu. Fait prisonnier, il est torturé dans les camps et en conserve de graves séquelles. Il quitte le service actif en 1965, se reconstruisant psychologiquement grâce au soutien de sa chère Josette.
Image may be NSFW. Clik here to view.Jean Guêtre est né en 1920 à Amiens. Engagé dès 1939 au 2e RCA, il débarque à Toulon avec la 1er RCuir. Après la reconquête de la France, il est blessé en Autriche. ADC en Indochine il combat dans le delta tonkinois avec le Commando Nord-Vietnam 45 puis 32 « Senée », tentant de desserrer l’étau sur Diên Biên Phu. Jean Guêtre est malheureusement décédé avant le projet de livre, mais avait pris soin d’écrire ses souvenirs et les transmettre à ses enfants.
Image may be NSFW. Clik here to view.Pierre Latanne naît en 1929 à Lourdes. EOR, il rejoint successivement les 18e RIPC et 3e BPC. Sous-Lieutenant du 5e BPVN, il est parachuté à deux reprises sur Diên Biên Phu, la seconde fois en plein combat. Gravement blessé, il survit aux camps et poursuit sa carrière dans l’Armée, en particulier au SDECE (Contre-Espionnage) qu’il quitte en 1990 avec le grade de Général.
Image may be NSFW. Clik here to view.Bernard Ledogar est né en 1933 en Alsace. Engagé en 1953 au 6e BPC, il est parachuté sur Diên Biên Phu. Force de la nature, combattant valeureux maniant la pelle comme arme de corps à corps, blessé plusieurs fois, il est fait prisonnier et survit aux camps. Il quitte l’armée après la guerre d’Algérie.
Image may be NSFW. Clik here to view.Jean-Louis Rondy naît en 1926 à Paris. Il fait le coup de feu en 1944 contre l’occupant et s’engage dans la foulée au Régiment de Marche du Tchad avec lequel il fait la campagne d’Allemagne. Intégrant Santé Navale, il est le médecin du 1er BEP à DBP. Survivant des camps – il pèse 43kg à sa libération - il poursuit sa carrière dans l’Armée, notamment en Afrique.
Nous tenons à remercier l’auteur qui nous a mis dans la confidence de son projet dès sa genèse (l’œuvre de sa vie, dixit J), nous donnant l’impression de faire partie de l’aventure (nous avons même tenté d’aider à fouiner dans les archives russes sur DBP (Natachenka a ses entrées J)). Nous n’oublierons pas nos déambulations dans Coët’ aux côtés des beaux Légionnaires Jean-Louis Rondy et Heinrich Bauer, se tenant bien droits, recevant, sourire espiègle et regard pétillant, les hommages des Cadets. Nous nous souviendrons de cette longue et touchante conversation avec Jean Carpentier et sa chère Josette. Nos pensées vont vers Pierre Latanne, dont le témoignage est déchirant ; et vers Jean Guêtre, qui veille désormais sur nous et doit être fier de ses descendants qui ont œuvré pour le devoir de mémoire en partageant ses écrits. Et nous allons conserver précieusement notre livre collector car dédicacé par les cinq co-auteurs survivants (superbe cadeau-surprise des éditions Nimrod qui savent à quel point leur attention nous a touchés) avec une mention spéciale pour Bernard Ledogar, dont l’écriture n’a jamais été le fort, mais a tenu à nous manifester son amitié – certainement l’une des plus belles dédicaces de notre milibibli.
Aux morts pour la France à Diên Biên Phu et partout ailleurs en Indochine,
Aux victimes de la barbarie viêt-minh dans les camps [taux de mortalité des prisonniers : 70%]
Aux blessés physiques et psychiques,
A tous les combattants de l’Union Française.
***
Le 4 octobre 2013, le général viêt-minh Võ Nguyên Giáp, vainqueur de Dien Bien Phu, disparaissait. Le ministre français des affaires étrangères lui a rendu un vibrant hommage :
J’ai appris avec émotion le décès du Général Giap. Ce fut un grand patriote vietnamien, aimé et respecté par tout son peuple pour le rôle éminent et fondateur qu’il a joué pour l’indépendance de son pays.
Il était profondément attaché à la culture française et parlait d’ailleurs parfaitement notre langue. Le Général Giap fut un grand patriote et un grand soldat. Alors que la France et le Vietnam sont devenus désormais des partenaires stratégiques, je salue aujourd’hui la mémoire d’un homme exceptionnel et présente mes profondes condoléances à sa famille et au peuple vietnamien.
Nous nous réjouissons, nous aussi, de la réconciliation franco-vietnamienne.
Cependant, il nous semble que le ministre aurait dû modérer son éloge funèbre d'un « mais cela».
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Survivant de Dachau ? Non. Survivant des camps viêt-minh.
Il n’y a qu’une seule chose qui permette à Jean-Louis Rondy de rester en vie. Un sentiment de haine absolu envers ces fanatiques qui, au nom de leur lutte pour l’indépendance et la liberté, cherchent précisément à éradiquer toute indépendance d’esprit et liberté de penser. Il lui arrive parfois de songer au camp de Dachau qu’il avait approché fin avril 1945. Une autre guerre, un autre monde, une autre horreur absolue. Mais au moins, les gardes des camps de concentration n’essayaient pas de convaincre leurs prisonniers de crier « Heil Hitler ! » tandis qu’ils les précipitaient vers la mort.
Suite de l’exploration de notre milibibli, dont vous retrouverez la première partie ici et la seconde là. Cette fois, nous sommes éclairés par le chef de l’opération « Tacaud » sur l’imbroglio tchadien dans les années 80 ; nous accompagnons un frère d’armes belge, Chasseur Ardennais, en Bosnie ; nous revivons l’Afghanistan en mode romanesque grâce à un Chasseur alpin ; et nous laissons la place à l’art et la poésie militaire (mais oui !) grâce à un Chasseur à pied.
***
« Face à Kadhafi - Opération Tacaud », GAL Pierre de Tonquédec, Para-Colo
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Le président Goukouni et le GAL Pierre de Tonquédec. Photo DR issue du livre.
En arrivant au pouvoir, chacun des présidents que le Tchad a connu depuis son indépendance est parfaitement conscient de l’absolue nécessité de réunir « tous les fils du Tchad » et de s’affranchir des redoutables clivages ethniques. Pourtant, très rapidement, chacun se met à redouter la « machination », le complot fomenté par des ethnies autres que la sienne et s’entoure, pour se protéger, de sa famille (…) Cette aveuglante méfiance, cette hantise du complot déforment les jugements et finissent par perdre les tenants du pouvoir (…) Dans un tel contexte les oppositions prospèrent, déstabilisant le pays et contraignant Paris à des interventions successives (…) Mais la France elle-même a sa part de responsabilité.
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« Face à Kadhafi - Opération Tacaud » par le Général Pierre de Tonquédec, « Monsieur Tchad ». Le Général, issu des Troupes de Marine, y a en effet servi à trois reprises : commandant à Abéché puis chef de l’Etat-Major franco-tchadien à Fort-Lamy en 1970-72 ; Commandant de l’opération Tacaud en 1979-80 ; Enfin en 1987, inspecteur d’Epervier. Un livre pour tout comprendre de l’imbroglio tchadien dans les années 70-80. Le temps a passé, le pays s’est largement pacifié et notre ancienne colonie figure désormais comme notre premier allié militaire africain. Souvenons-nous des 36 Tchadiens morts au Mali en combattant à nos côtés. Souvenons-nous aussi des 158 soldats français morts au Tchad entre 1968 et 2014. Hommage à eux et aux blessés.
Avec le GAL Pierre de Tonquédec au Salon des Ecrivains-Combattants 2014
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« Commandant de Compagnie - Lettres de Bosnie », COL Bruno Smets, Chasseur Ardennais, Belgique
Janvier 1994
Image may be NSFW. Clik here to view.Je voudrais comprendre ! Quel est le cadre général de ma future mission ? Quels sont les acteurs en Bosnie ? Que devons-nous y faire ? Quelles sont les raisons de notre présence dans cette contrée ? Quelles sont les lignes de front entre les belligérants ? Où la guerre s’arrête-elle ? La zone de Vitez est-elle sûre ? Quelles sont les règles d’engagement particulières à l’opération ? (…) Comme unité subordonnée [à un bataillon anglais] dois-je suivre et appliquer la législation britannique ou belge ? Je ne sais rien de tout cela et je ne serais pas surpris que personne en Belgique ne puisse me donner une réponse claire et précise à toutes ces questions. Nous sommes lancés à l’aventure, advienne que pourra !
Photo : Briefing à Santici, lors de l’arrivée du premier « lift ». A droite Bruno Smets
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Avril 1994
Image may be NSFW. Clik here to view.Stari-Vitez [est] un quartier chaud de Vitez où une minorité de Bosniaques reste encerclée par des Croates. Ils y vivent retranchés et barricadés dans l’angoisse permanente d’être attaqués par des milices croates extrémistes. Il s’agit donc d’un nid de résistance bosniaque (musulman) au sein même de la poche croate de Vitez qui est elle-même encerclée par d’autres Bosniaques, eux-mêmes entourés de Serbes et de Croates. Simple la situation en Bosnie, non ?
Photo : Ruines de la mosquée d’Ahmicci.
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Juin 1994
Image may be NSFW. Clik here to view.J’ai assisté, comme toutes les semaines maintenant, à la réunion hebdomadaire entre les commandants des brigades croate et bosniaque. A les voir assis ensemble autour d’une table, en train de boire du cognac à dix heures du mat’, j’ai parfois du mal à croire que début janvier – il y a à peine six mois – ils se tiraient dessus comme des lapins.
Photo : Rencontre entre les autorités militaires croates et bosniaques à Suha Voda. A droite Bruno Smets
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Septembre 1994
Image may be NSFW. Clik here to view.De retour au pays, je m’enquiers de ce qui a été écrit sur notre odyssée bosniaque. Je feuillette les revues militaires et articles de presse ; je ne trouve quasi aucune trace de notre passage en Bosnie. Il est bien connu que les trains qui arrivent à l’heure ne font jamais les gros titres de l’actualité.
Photo : La compagnie « BELBOS » derrière son capitaine Bruno Smets, 3.8.1994 Marche-en-Famenne
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Place aux frères d’armes belges ! « Commandant de Compagnie - Lettres de Bosnie » relate, au travers des lettres envoyées à sa femme, le déploiement en Bosnie du Colonel Bruno Smets, alors capitaine, commandant d’une compagnie de Chasseurs Ardennais. Formant le détachement « BELBOS » (pour Belgique-Bosnie), unité sous commandement britannique, Bruno et ses hommes font tampon entre Bosno-Croates et Bosno-Musulmans. Un bon récit, intime, mettant en exergue les difficultés rencontrées par les casques bleus, quelle que soit leur nationalité, en ex-Yougoslavie.
Le livre est disponible sur le site de Bruno ici (attention, plus beaucoup d’exemplaires en stock…).
« Le vent d’Alasay », Michel Sègre, Chasseur alpin
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Photo Thomas Goisque
Nous ne possédons rien, Tofan, que notre cœur et les actes que nous accomplissons. Les massacres perpétrés contre mon peuple m’ont appris que les hommes doivent d’abord être jugés sur ce qu’ils font, plutôt que sur l’appartenance à une famille, un clan ou une tribu. Se battre pour préserver la paix et la liberté est une cause noble ; se battre pour asservir les autres à ses propres lois ou parce qu’ils pensent et vivent différemment est un mal impardonnable. Peut-être ta lâcheté au combat est-elle d’abord le fruit de ton orgueil ? Le seul djihad qui vaille, mon ami, est celui que l’on mène contre soi-même pour être un homme droit, juste et bon.
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Derrière le pseudo de Michel Sègre se cache un militaire qui connait bien l'Afghanistan pour y avoir mené ses hommes à la victoire [nous vous laissons deviner de qui il s’agit]. L'auteur saisit l'occasion du roman, non pour prendre des libertés avec la réalité, mais pour présenter des points de vue variés : histoires croisées entre Chasseurs alpins en Kapisa, talibans et familles en France. Très bien mené, suspens à la clé. Intéressant de le lire en parallèle à « Task Force Tiger » du COL Nicolas Le Nen...
Avec le « mystérieux » J Michel Sègre , au Salon des Ecrivains-Combattants 2013
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« Soldat protecteur de notre liberté », Jean-Louis Martinez, Chasseur à pied
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Dessin Jean-Louis Martinez
J’ai froid.
En voyant mes frères morts, je me mets à penser :
« Je dirai à leurs proches qu’ils sont morts en héros ».
Mais que dis-je ? Comment les prévenir,
Si mon corps est sans vie, allongé sur cette piste.
Mon Dieu, ouvrez cette porte de l’Au-Delà,
Que je rejoigne mes frères, morts au combat.
« L’embuscade », hommage à « Ceux d’Uzbin »
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« Soldat protecteur de notre liberté » par Jean-Louis Martinez, autoédité. Un petit recueil qui mêle dessins et textes/poèmes en prose. Vraiment joli, vraiment réussi (et émouvant) (et de beaux coups de gueules aussi). Et puis, un beau livre d’un frère Chasseur à pied (Jean-Louis s’est engagé en 1975 au 2e GC), cela fait plaisir…
La première édition a vite été épuisée mais, heureusement, une seconde impression a été lancée et le livre est à nouveau disponible sur le site de Jean-Louisici. Et, autre bonne nouvelle, un tome 2 est en préparation !
14 novembre 2015. Lendemain d’une date qui restera à jamais gravée dans nos mémoires. Les yeux marqués par la nuit blanche, passée devant nos télés ou au téléphone, prenant des nouvelles de tous les proches potentiellement sur les lieux des attaques, la question s’est évidemment posée, légitime : quid du Salon des Ecrivains-combattants ? Nous avons appelé les organisateurs. « Oui, le salon est maintenu ». Dès lors, pas d’hésitation : les écrivains-combattants ne se repliaient pas, ils entraient dans une forme de résistance. Alors, nous aussi. Direction le salon !
Débutons par des retrouvailles.
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Faut-il présenter le GAL Bernard Barrera ? C’est bien lui qui, à la tête de sa vaillante Brigade Serval, avec le soutien de nos amis Tchadiens et Maliens, a écrasé les djihadistes au Mali. Sa présence était tout un symbole…
Nous terminons justement la lecture de son « Opération Serval ». Un superbe journal de marche, mettant en lumière l’une des plus éclatantes victoires de notre armée, laissant la part belle à toutes les femmes et hommes de l’opération, quelles que soient leurs fonctions (toutes sont stratégiques ; honneurs aux fantassins, paras, cavaliers, sapeurs, artilleurs, mais pas de réussite sans transmissions, logistique, matériel, santé…), ainsi qu'à nos alliés africains et belges. Un récit très humain, très terrain, bourré d’anecdotes, de rappel à d'autres époques, la guerre froide, la Bosnie, ses chers Chasseurs, appelés du 2e, engagés du 16e… Et puis un homme bien sûr très pro, mais aussi formidablement ouvert, accueillant, disponible et éminemment sympathique. Voilà, c’est dit, des fleurs bleues cerise et jonquille, méritées, quitte à mettre le Général, toujours d’une très honorable modestie, dans l’embarra J
Retrouvailles avec le LCL Hubert le Roux. Vous devez déjà tous connaître (et avoir lu !) « Paroles de Soldats », co-écrit avec Antoine Sabbagh. Une série de retranscriptions d’interviews de combattants des différents théâtres d’opérations, du Liban à la RCA en passant par la Bosnie, l’Afgha, le Mali… Un « must read » comme disent nos amis anglo-saxons. Pour ceux qui, malgré tout, le découvriraient, vous en saurez plus en lisant notre recension ici.
Nous en profitons pour remercier Hubert de nous avoir introduits auprès du Vice-Amiral Xavier Païtard, membre du conseil de l’association des Ecrivains-Combattants, auquel nous renouvelons tout notre soutien à son beau projet… [teasing : nous n’en dirons pas plus… pour le moment…].
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« Paroles de Soldats », LCL Hubert le Roux & Antoine Sabbagh. Editions Tallandier. Nous l’abordons ici.
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Et nous voici avec le Commissaire des Armées (CNE) Julien Eche, qui présentait « La nuit africaine », récit romancé inspiré de son déploiement en Côte d'Ivoire peu après la guerre civile. Là encore une réussite, une autre façon d’aborder la littérature militaire, une autre vision du soldat et le succès du livre (déjà réédité) est là pour le prouver. Comme il s’agit d’un roman, nous ne l’avons pas abordé sous forme de recension mais il figure dans une de nos rubriques « Milittérature » ici.
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« La nuit africaine », Commissaire des Armées Julien Eche. Editions L’Harmattan. Voir ici.
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Le salon est évidemment l’occasion de rencontrer de nouveaux auteurs. Voici notre « moisson 2015 » :
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A tout seigneur tout honneur, nous voici au côté du COL (r) Fred Moore, dernier Chancelier de l’Ordre de la Libération, Grand-croix de la Légion d’honneur. « Cela fait quelque-chose » de rencontrer un tel personnage, l’un des acteurs de la Libération de la France, engagé dans les FFL le 1er juillet 40 (il a rejoint l’Angleterre le 19 juin), expédition de Dakar, Levant avec les Spahis marocains, campagne d’Egypte et de Lybie, bloque a deux reprises les blindés germano-italiens en Tunisie, combat du Djebel Fadeloun, débarque en 44 en France avec la 2e DB, libération de Paris où il prend part à la prise de l’Ecole Militaire et du Bourget, libération de Strasbourg, de La Rochelle et campagne d’Allemagne… Longue conversation avec Fred, heureux de partager une foultitude d’anecdotes et vous comprendrez qu’il n’en manque pas !
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« Toujours Français Libre ! », COL (r) Fred Moore. Editions Elytis. A commander chez votre libraire préféré(e) ou sur le Net.
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Vous connaissez notre affection pour les Légionnaires. Nous n’allions donc pas rater l’occasion de discuter avec Jean Cornuault. Là-encore, quel parcours : entré à 17 ans dans les FFI, il participe à la libération de Saumur et de la poche de Saint-Nazaire. Engagé chez les Paras, il effectue un premier séjour en Indo. A son retour il intègre Saint-Cyr puis le prestigieux 1er BEP. De retour en Indochine, chef de section, il participe aux terribles combats de la RC4. Deux fois blessé il est capturé et passe 4 ans dans les geôles viet-minh. Puis c’est l’Algérie avec le 1er REP et 21e RTA. En 64, il est chef de bataillon au 9e RCP puis attaché-militaire adjoint à Moscou car il maîtrise le russe… Il quitte l’armée en 1970 pour entamer une carrière de juge d’instruction. Cela impressionne, non ? Hé bien oui, mais Jean Cornuault, comme tous les autres, a été particulièrement chaleureux, proposant même de faciliter un voyage au Vietnam (pays qu'il connaît comme sa poche) en partagerant ses tuyaux. Grand ancien, charmant monsieur.
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« Du sabre à la toge - Itinéraire d’un parachustiste ». Jean Cornuault. Chez IndoEditions. Disponible ici.
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Enfin, une rencontre que nous attendions avec impatience. Cela fait en effet quelque temps que nous avions repéré le COL Philippe Cholous et son « Deux ans dans les pas de Zamaraï Païkan, général et héros afghan ». Après le COL Stéphane Bras auteur de « POMLT, Gendarme en Afghanistan », l’occasion de revenir sur ces hommes en bleu (même s’ils portaient des treillis camouflés…) et réparer une injustice, car qui sait que de 100 à 200 gendarmes ont formé les policiers afghans et apporté leurs conseils à leurs chefs ? Pas grand-monde et c’est anormal !
Alors, une fois de plus, vous allez dire que nous trouvons tous les soldats très sympas, mais, que voulez-vous, c’est le cas, et notre gendarme costaud, au passé de marsouin, n’a pas dérogé à la règle.
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« Deux ans dans les pas de Zamaraï Païkan, général et héros afghan », COL Philippe Cholous. Editions Lavauzelle. Disponible ici.
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Site de l’association des Ecrivains-Combattantsici.
Nous ne présentons ici que six auteurs parmi les dizaines présents et nous en sommes les premiers désolés. Tous les autres auraient mérité un petit coup de projecteur. C’est bien évident. L’offre milittéraire est vaste et c’est tant mieux. A vous de vous rendre aux prochaines éditions de ce salon, sur le stand du Ministère de la Défense du salon du Livre de Paris, au Festival International du Livre Militaire de Saint-Cyr(et au moins un autre salon est en gestation, du côté des Gendarmes ; nous soutenons évidemment cette belle initiative. Nous n’en dirons pas plus pour le moment, mais une piste).
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Voilà ce que fût notre journée du 14 novembre 2015. Gardant dans nos pensées les victimes et leurs proches, saluant le courage des policiers et militaires, le professionnalisme des pompiers, des personnels de secours et hospitalier, nous sommes allés déjeuner au *resto* et nous avons passé l’après-midi avec ces soldats-auteurs, porte-paroles de leurs camarades, avec, au fond de nos cœurs blessés, un petit message aux barbares :
Regardez, « Mesdames » et « Messieurs » (sic) les Djihadistes. Avons-nous l’air d’avoir peur ?
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« Entendez-vous, dans nos campagnes, mugir ces féroces soldats ?
Ils viennent, jusque dans vos bras, égorger vos fils, vos compagnes.
Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! »
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Photos publiées sur notre page FaceBook aux lendemains des assauts à Saint-Denis et Bamako